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Actualités

Un Iran maître de la confrontation et loin des clichés exposé à Amsterdam

Le musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg (Russie) expose pendant cinq mois à Amsterdam ses chefs-d’œuvre persans dans le but affiché de déminer les clichés sur la culture iranienne, tout en soulignant qu’elle s’est construite par la confrontation avec l’Occident. «Tout à coup, cette exposition se trouve au cœur de l’actualité. Mais la confrontation avec l’Iran d’aujourd’hui n’est pas nouvelle (...). Toute l’histoire de la civilisation grecque et de l’Occident a été marquée par la permanente bataille contre la Grande Perse», a rappelé Mikhaïl Piotrovski, le conservateur en chef de l’Ermitage. Aussi, présentant les plus belles pièces orientales du célèbre musée russe, l’exposition «La Perse, trente siècles d’art et de culture» a pour ambition de faire découvrir aux visiteurs des facettes inattendues de la richissime et mouvementée histoire de la région. «Nous Iraniens raffolons des fleurs, des plantes, êtres humains et animaux. Le Prophète (...) nous a défié d’avoir des prétentions divines et d’appeler à la vie l’homme et l’animal par leur reproduction», explique Nasir ad-Din Shah Qajar, féru de l’Occident, qui entreprit trois voyages en Europe et Russie au cours de son règne (1848-1896) et dont les commentaires jalonnent l’exposition. «Nos artistes n’ont pas pu résister à cette tentation, surtout parce qu’ils voulaient montrer Sa création afin d’en faire la louange», poursuit-il en conteur digne des Mille et Une Nuits. Dès l’entrée, les vases à bec d’oiseau, dont l’Ermitage présente un exemplaire vieux de 3000 ans, illustrent son propos. Aujourd’hui encore, les Iraniens fabriquent de cafetières similaires. Un peu plus loin, une carafe de bière en terre cuite vient rappeler que «les Égyptiens, Perses et Assyriens buvaient de la bière. Seuls les Grecs buvaient du vin (dilué), ils pensaient que la bière était une boisson “barbare”», selon le petit guide explicatif distribué en début de visite. Les Grecs et en premier lieu Alexandre le Grand étaient les ennemis jurés de l’Empire perse, mais aussi une source d’inspiration artistique. Hérodote s’étonne de l’engouement des Perses pour les habits médiques. «Aucun peuple n’adopte aussi facilement les mœurs étrangères qu’eux», a-t-il écrit. Plusieurs siècles plus tard, les occupants de l’Iran actuel s’inspireront de la porcelaine chinoise, maîtriseront jusqu’à la perfection les différentes graphies arabes et souffleront le verre avec une telle maestria que les Vénitiens s’en émerveillèrent. Au XVe siècle, la nudité même n’était pas taboue. Plusieurs calligraphies de l’époque illustrant des épopées, comme la vie d’Alexandre le Grand, font figurer des femmes à la baignade, torse nu et se peignant lascivement les cheveux. Un peu plus loin, dans une calligraphie du début du XVIIe siècle, un jeune homme allongé sur des coussins bariolés paraît tellement androgyne qu’il faut que le conservateur néerlandais de l’exposition pointe le poignard attaché à sa taille pour convaincre l’assistance. «Regardez ce portait des Amoureux (début du XIXe siècle), on dirait deux femmes enlacées», s’émerveille Vincent Boele, l’un des conservateurs néerlandais. «Pour l’exposition, j’ai dû me rendre en Iran, et j’ai été troublé du nombre de femmes portant talons aiguilles!» confie-t-il. Alix RIJCKAERT

Le musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg (Russie) expose pendant cinq mois à Amsterdam ses chefs-d’œuvre persans dans le but affiché de déminer les clichés sur la culture iranienne, tout en soulignant qu’elle s’est construite par la confrontation avec l’Occident.
«Tout à coup, cette exposition se trouve au cœur de l’actualité. Mais la confrontation avec...