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Actualités

Basta!

Parce que vous avez été l’idole de mes 20 ans. Parce que je fus une fan inconditionnelle de la première heure. Parce que je fus bouclier humain à Baabda à l’insu de mes parents qui me croyaient à l’abri à l’hôpital où je faisais mon internat. Parce que votre croisade fut celle de toute une génération avide de liberté et de souveraineté. Parce que votre retour se devait de sonner le glas des axes, du suivisme et du clientélisme, et paver la voie à l’émergence de l’État de droit. Parce que je me fis des ennemis, même parmi mes proches, en vous défendant avec acharnement pendant quinze ans. Parce que quatre générations de Libanais, triste record, ont vécu les affres de cette guerre interminable et ses retombées tentaculaires. Parce qu’on ne peut être donneur de leçons en étant entouré des sbires de Damas. Parce que vous avez combattu férocement les milices au nom de l’exclusivité des armes aux mains de la légalité et qu’actuellement vous cautionnez celles du Hezbollah, les liant tout récemment au conflit arabo-israélien alors que notre pauvre peuple a largement payé sa dette envers la «oumma». Parce que, pour la première fois depuis dix ans, je suis allée aux urnes en 2005 car vous y participiez personnellement et que mon vote à mes yeux – je ne sais pas aux vôtres – est sacré. Parce que les Émirats arabes, grâce à leurs dirigeants visionnaires et ambitieux, ont transformé leur pays désertique en paradis en y créant des musées Guggenheim et Louvre, en construisant des îles prestigieuses pour attirer les capitaux et les fortunes du monde entier, en organisant des open internationaux de golf, de tennis, d’équitation, des compétitions de Formule 1, et même des ventes aux enchères de Christie’s alors qu’on sombre dans l’obscurantisme, le totalitarisme, qu’on saccage, qu’on paralyse, qu’on fragilise et qu’on divise. Parce qu’aucun titre, poste, pouvoir ou privilège ne peut justifier cette mise à mort du Liban, programmée et commanditée par nos ennemis et exécutée scrupuleusement par ses fils. Parce qu’il y a encore dans ce pays des Libanais idéalistes, kamikazes ou masochistes – appelez-les comme vous voulez –, qui sont enracinés dans cette terre et ne veulent pas succomber aux sirènes des gains faciles dans les pays du Golfe ou à la douceur de vivre des pays européens. Parce que nous nous sommes évertués, et nos enfants le feront après nous, à décrocher des diplômes d’universités américaines et européennes et non de Chiraz ou de Damas. Parce que les Libanais se bousculent devant les consulats occidentaux et non devant celui de la République islamique dans l’espoir d’obtenir le précieux sésame: un passeport pour la dignité. Parce que si axe il faut, la logique serait de préférer celui de l’ONU et de la communauté internationale à celui de la théocratie et de la démagogie… Parce qu’un proverbe bien de chez nous dit: «Je suis avec mon frère contre mon cousin et avec ce dernier contre l’étranger.» Parce que le jugement de l’histoire est impitoyable. Pour tout cela et encore plus, je vous dis: Basta, mon général. Assez de surenchères inutiles, d’ego surdimensionnés, de prises de position contradictoires qu’on justifie en les qualifiant de stratégiques, assez de reniement de ce qui vous a permis l’adhésion sans réserve de 70 pour cent de l’électorat chrétien – chiffre magique qu’il faudrait revoir à la baisse. Assez de discours incendiaires qui promettent l’hallali et jettent nos jeunes sur le chemin de l’exil. Les enjeux sont bien plus graves qu’une participation au gouvernement ou des postes ministériels. Je vous conjure d’être à la hauteur des sacrifices et des souffrances de ce peuple, de les honorer en adoptant une attitude historique et désintéressée, digne de votre dimension nationale. En un mot comme en cent: faites la paix des braves. Pour que notre pays ne soit pas une énième fois sacrifié sur l’autel des querelles géopolitiques de la terre entière. Pour que nous retrouvions notre place légitime de plaque financière, touristique et culturelle du Moyen-Orient. Pour que nous ayons enfin les préoccupations futiles de tout un chacun: choix des vacances, des loisirs, des colonies pour nos enfants. Pour que nos enfants connaissent le sentiment d’appartenance à une patrie, qu’ils puissent y naître, y grandir, y travailler et y vieillir. Pour que nous ayons enfin, comme tout citoyen du monde, le droit si légitime et pourtant si galvaudé ici, à une nation à nous, bien à nous et surtout rien qu’à nous. Dr Maria BASSIL Article paru le Mardi 13 Mars 2007
Parce que vous avez été l’idole de mes 20 ans. Parce que je fus une fan inconditionnelle de la première heure.
Parce que je fus bouclier humain à Baabda à l’insu de mes parents qui me croyaient à l’abri à l’hôpital où je faisais mon internat.
Parce que votre croisade fut celle de toute une génération avide de liberté et de souveraineté.
Parce que votre retour se...