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Actualités - OPINION

LE POINT À bout de souffle

Pour un peu on aurait hissé le « Star and Stripes » et, la main sur le cœur, entonné le « Star-Spangled Banner ». Le président est allé jusqu’à payer de sa personne, se lançant à l’abordage, sabre au clair : « Les membres de l’armée des États-Unis sont très intelligents et très braves. Le sénateur du Massachusetts leur doit des excuses », a-t-il dit lors d’une réunion de campagne en Géorgie. La défense vaut ce qu’elle vaut, prononcée par un homme qui avait vaillamment choisi d’effectuer son service militaire dans le corps des gardes-côtes plutôt qu’au Vietnam. et dont les innombrables « bushisms » font la joie des animateurs des « late night shows ». Mais enfin, c’est vrai que ce pauvre John Kerry, qui n’en est pas à une bévue près, avait raté une belle occasion de se taire lorsqu’il avait conseillé à un groupe de jeunes Californiens de bien étudier « pour ne pas se retrouver coincés en Irak ». Ah ! L’Irak... Comment croire que les grandes assises du 7 novembre vont se dérouler à l’ombre, entre autres, d’une guerre engagée, il y a trois ans et demi, dans l’allégresse générale pour, faisait-on valoir alors, se saisir des armes de destruction massive, abattre un tyran sanguinaire et établir la démocratie sur les bords de l’Euphrate, premier pas sur la voie d’un Grand Moyen-Orient que tous les Arabes appellent de leurs vœux. La suite, on la connaît et il serait cruel de revenir sur un sujet qui doit hanter les nuits de l’infortuné Donald Rumsfeld. John Warner, le très respecté président de la commission sénatoriale des Forces armées, vient de lâcher un énorme pavé dans la mare gouvernementale. « C’est la dérive », a-t-il jugé. Avant de donner deux ou trois mois à l’équipe Maliki pour redresser la barre. Sinon, il nous appartiendra de changer le cours des choses, a-t-il menacé, fort de l’appui de James Baker. Face à ce coup de Jarnac, George W. continue à faire le bravache, déclarant : « Je ne les ai pas entendus nous conseiller de nous retirer avant d’avoir achevé le travail. » Peut-être pas, mais on n’en est pas loin. Passe encore s’il n’y avait que cette déconvenue – majeure, on en conviendra. Les grands thèmes de la campagne électorale sont tout aussi importants pour l’Américain moyen. À commencer par celui de la sécurité nationale – le combat décisif du XXIe siècle ne cesse de marteler l’hôte de la Maison-Blanche –, un principe que l’on brandit pour mieux tordre le cou aux valeurs que l’Amérique est censée incarner et qu’elle cherche à imposer au monde. Au nom du sacro-saint principe de la défense du sol national, on a entrepris d’édifier une barrière pour ralentir, sinon contenir, la déferlante hispanique sur la Californie. Sans parler du Big Brother qui guette désormais le moindre mot saisi par ses grandes oreilles satellitaires. Comme à chaque grande étape de la vie politique yankee, l’économie n’est jamais absente des débats, surtout que ces gloutons d’Américains viennent d’éprouver la frayeur de leur vie avec les cours du pétrole qui ont frôlé 3 dollars le gallon avant de revenir à des prix (insensiblement) plus raisonnables. Tout de même, on a eu chaud – ou plutôt on a failli avoir froid, au moment où le thermomètre entamait sa plongée vers des températures polaires. Sagement, la Réserve fédérale a choisi de ralentir le rythme auquel elle relevait les taux d’intérêt. Il était temps : la hausse est intervenue, en un délai relativement court, à seize reprises. Mais c’est surtout grâce à la baisse des impôts que les importations se sont lancées dans un sprint qui a affolé les chiffres du déficit, les portant à des cimes jamais atteintes à ce jour. Le sort, mardi prochain, des élus du Grand Old Party va se jouer aussi autour des scandales qui ont jalonné le parcours de certains d’entre eux : Mark Foley et ses galipettes sur l’Internet avec les jeunes pages du Congrès, Dennis Hastert soupçonné d’avoir tardé à réagir, le lobbyiste Jack Abramoff accusé de s’être emmêlé dans ses comptes, l’ancien leader de la majorité républicaine à la Chambre des représentants Tom DeLay, éclaboussé dans cette désolante confusion... La multiplication des « affaires » a fini par assombrir le climat politique au point que l’homme de la rue commence à se poser des questions sur l’aptitude du chef de l’Exécutif à diriger l’Union. Le résultat, on le trouvera dans les urnes, au soir du 7 novembre. Ils sont majoritaires ceux qui voudraient voir les démocrates l’emporter au sein des deux Chambres. Il suffira d’un glissement de quelques sièges pour ternir les deux années à venir du second mandat d’un homme qui avait entamé sa présidence au pas de charge et qui s’apprête à l’achever en clopinant. Dur, dur d’être président au pays de l’Oncle Sam. Christian MERVILLE

Pour un peu on aurait hissé le « Star and Stripes » et, la main sur le cœur, entonné le « Star-Spangled Banner ». Le président est allé jusqu’à payer de sa personne, se lançant à l’abordage, sabre au clair : « Les membres de l’armée des États-Unis sont très intelligents et très braves. Le sénateur du Massachusetts leur doit des excuses », a-t-il dit lors d’une réunion de campagne en Géorgie. La défense vaut ce qu’elle vaut, prononcée par un homme qui avait vaillamment choisi d’effectuer son service militaire dans le corps des gardes-côtes plutôt qu’au Vietnam. et dont les innombrables « bushisms » font la joie des animateurs des « late night shows ». Mais enfin, c’est vrai que ce pauvre John Kerry, qui n’en est pas à une bévue près, avait raté une belle occasion de se taire lorsqu’il...