Le oui fatidique à Detlev Mehlis, la Syrie, fidèle à sa bonne vieille politique du bord du gouffre, aura attendu le tout dernier moment, c’est-à-dire l’expiration de l’ultimatum qui lui était adressé, pour le prononcer. Plus de trois semaines en effet se seront écoulées en arguties et en palabres, depuis l’adoption à l’unanimité, par le Conseil de sécurité de l’ONU, de...
Actualités - OPINION
L’ÉDITORIAL de Issa GORAIEB Une valse, général ?
le 26 novembre 2005 à 00h00
Le oui fatidique à Detlev Mehlis, la Syrie, fidèle à sa bonne vieille politique du bord du gouffre, aura attendu le tout dernier moment, c’est-à-dire l’expiration de l’ultimatum qui lui était adressé, pour le prononcer. Plus de trois semaines en effet se seront écoulées en arguties et en palabres, depuis l’adoption à l’unanimité, par le Conseil de sécurité de l’ONU, de la résolution 1636. Celle-ci, pourtant, était on ne peut plus claire : elle sommait Damas de prêter ses ressortissants – simples individus ou responsables – aux questions de la commission internationale enquêtant sur l’affaire Hariri. Et elle donnait entière latitude à celle-ci de mener ses interrogatoires comme elle l’entendait, où elle l’entendait.
Compromis, garanties : ces deux mots revenaient tel un leitmotiv dans la conférence de presse organisée hier à Damas pour annoncer la bonne nouvelle. Ils veulent tout dire et rien dire à la fois. Ce que ces mots voudraient très probablement suggérer en effet, c’est que la Syrie baassiste, innocente du sang de Hariri et victime d’une cabale à l’échelle planétaire mais forte de la caution de la Russie, est parvenue, à force de pugnacité et de négociation, à concilier l’eau et le feu : à afficher sa bonne foi tout en sauvegardant sa souveraineté et sa dignité nationales. Fort bien. Mais ce que ces mots risquent de laisser entendre aussi, malgré les protestations offusquées de MM. Mouallem et Daoudi, c’est qu’un marché à caractère politique, et non plus judiciaire, est intervenu quelque part, fixant à point nommé les limites d’un jeu qui commençait à aller trop loin.
Il faudra davantage cependant que de tortueux non-dits pour jeter le doute sur la commission d’enquête, en laquelle Damas persiste à voir un instrument de pression aux mains des puissances occidentales. Ni Monteverde ni le Golan, mais Vienne, terrain neutre par excellence : aux Syriens boutés hors du Liban, le procureur Mehlis a judicieusement épargné une humiliation somme toute inutile. Mais c’est surtout au gouvernement libanais lui-même qu’il a fait faire l’économie d’un bien encombrant présent, d’une revanche morale délicate à gérer au double plan interne et des relations futures avec le voisin syrien.
L’essentiel, en fait, c’est que les généraux du renseignement syrien, assistés de leurs conseillers légaux, seront entendus dans des bureaux de l’ONU. Que les Syriens ont dû renoncer à leur prétention de réécrire la résolution 1636 avec leur exigence d’un protocole d’accord judiciaire similaire à celui accordé au Liban. Que le procureur Mehlis garde évidemment intact son pouvoir de les désigner souverainement ou non comme suspects. Que si devaient se confirmer les soupçons premiers du juge allemand, dûment formulés dans ses rapports d’étape au Conseil de sécurité, Damas serait bel et bien tenu d’incarcérer ces officiers. Il est clair enfin que le choix qui s’est porté sur la capitale autrichienne pour ces interrogatoires laisse augurer de la constitution, à terme, d’un tribunal international pour juger les planificateurs et exécutants de l’attentat du 14 février.
Reste la transparente énigme de ce sixième général charitablement exempté de valse viennoise. Ce n’est pas la première fois en réalité (rappelez-vous les deux versions, papier et électronique du rapport Mehlis) que des noms de responsables très proches du président Bachar el-Assad filtrent comme par inadvertance, avant de disparaître dans la trappe. Fuites calculées, jeu du chat et de la souris, guerre des nerfs ? C’est sans doute un peu de tout cela qu’est bien obligé de pratiquer le redoutable joueur d’échecs chargé de faire la lumière sur l’assassinat de Hariri.
Que les hôtes syriens de l’Autriche tiennent pour l’instant dans les doigts d’une main n’a, en tout cas, rien de définitif : c’est la progression de l’enquête – et elle seule – qui, le cas échéant, devrait étoffer la liste des singuliers, des peu recommandables invités.
Le oui fatidique à Detlev Mehlis, la Syrie, fidèle à sa bonne vieille politique du bord du gouffre, aura attendu le tout dernier moment, c’est-à-dire l’expiration de l’ultimatum qui lui était adressé, pour le prononcer. Plus de trois semaines en effet se seront écoulées en arguties et en palabres, depuis l’adoption à l’unanimité, par le Conseil de sécurité de l’ONU, de...
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