Elle a pour nom indépendance. Son anniversaire, elle le célèbre cette année à deux niveaux, à deux vitesses. Dans le premier cas, dans l’isolement et l’opprobre, dans le second, dans la communion et l’espoir. Entre le Liban d’en...
Actualités - OPINION
Le dernier verrou
Par Nagib AOUN, le 21 novembre 2005 à 00h00
Elle est sexagénaire, elle porte les stigmates de l’âge, elle a subi les derniers outrages, mais elle garde toutes ses dents et peut encore mordre.
Elle a pour nom indépendance. Son anniversaire, elle le célèbre cette année à deux niveaux, à deux vitesses. Dans le premier cas, dans l’isolement et l’opprobre, dans le second, dans la communion et l’espoir. Entre le Liban d’en haut, réduit à sa portion congrue, et le Liban d’en bas, le fossé est large, énorme, une faille impossible à combler.
Demain mardi au palais de Baabda, les images seront celles du temps passé : une continuation dans l’illégitimité, la perpétuation d’une agression contre les élus de la nation, une prise d’otages aliénant la volonté de tout un peuple.
Les Syriens ont pris la porte, mais la trace de leur dernier forfait subsiste, s’affiche, un défi, par procuration, aux Libanais et à l’ensemble de la communauté internationale.
Demain mardi, le locataire du Palais vivra l’illusion d’une popularité retrouvée lorsque s’animeront les allées de la résidence. Mais c’est contraintes, résignées, par respect de la tradition ou par obligation protocolaire, que les délégations raréfiées s’y rendront.
Les voix qui se feront entendre, bien haut, expression incisive d’un désaveu, seront celles des absents : les ambassadeurs américain et européens et les nombreuses personnalités qui ont façonné le 14 mars. L’esprit de l’indépendance, le vrai, l’authentique, a déserté les hauteurs de Baabda depuis bien longtemps, depuis la funeste prorogation du mandat présidentiel. Il s’est installé, ancré dans le cœur de tous ceux qui ont fait de la place des Martyrs celle de la liberté reconquise. Il se manifestera dans la rue, trois jours durant, à l’initiative de Fouad Siniora : marches populaires, concerts, spectacles de danse, théâtre et, surtout, un symbole : la réinstallation de la statue de Béchara el-Khoury, père de l’indépendance... en l’absence forcée d’Émile Lahoud.
Dans la rue, donc, la fête, la célébration de la souveraineté retrouvée et, au Palais, les défilés robotisés, les sourires de circonstance, la caricature d’une fête. Le répit sera bref : après-demain, l’homme sera, de nouveau seul, face à son obstination. Seront là pour le réconforter, pour le soutenir ceux-là mêmes qui menacent les Libanais d’un retour au chaos, à la guerre civile, ceux-là mêmes qui n’ont pas fait leur deuil du départ sans gloire des forces syriennes.
Indépendance, que de crimes sont commis en ton nom ! Et pourtant, jamais, dans sa tumultueuse histoire, le Liban n’a bénéficié d’un appui international aussi unanime à sa souveraineté, à son entière intégrité. Un parapluie protecteur martelé, réaffirmé, par les Nations unies, semaine après semaine, mois par mois.
Mais les verrous ont la vie longue, ils s’encrassent au fil des jours et paralysent les institutions. Les faire sauter, c’est permettre à la majorité issue des élections d’assumer pleinement ses fonctions, ses devoirs. Consensus, oui, blocage, non. De Baabda au Hezbollah, une double négation est exercée au sein du gouvernement, un grain de sable délibéré, un chantage concerté, le torpillage de tout effort de redressement, de réforme.
La démission de l’un, le départ des autres libéreront le jeu démocratique, réconcilieront le pays avec le simple exercice du duel majorité-opposition. Mais à ce jour, ni l’un ni les autres ne font mine de partir, encore moins de collaborer.
Et l’intérêt national bien compris ? Question naïve ! Le dernier verrou, c’est en Syrie qu’il faut le chercher, dans l’antre abyssal des Assad. La clé ? C’est Detlev Melhis qui la détient. Un jour, prochain, il en fera usage et tout alors basculera...
Nagib AOUN
Elle est sexagénaire, elle porte les stigmates de l’âge, elle a subi les derniers outrages, mais elle garde toutes ses dents et peut encore mordre.
Elle a pour nom indépendance. Son anniversaire, elle le célèbre cette année à deux niveaux, à deux vitesses. Dans le premier cas, dans l’isolement et l’opprobre, dans le second, dans la communion et l’espoir. Entre le Liban d’en...
Elle a pour nom indépendance. Son anniversaire, elle le célèbre cette année à deux niveaux, à deux vitesses. Dans le premier cas, dans l’isolement et l’opprobre, dans le second, dans la communion et l’espoir. Entre le Liban d’en...
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