Rechercher
Rechercher

Actualités

CORRESPONDANCE - Festival In d’Avignon, 59e édition Déferlante flamande sur les planches de la cour d’honneur du Palais des Papes «L’histoire des larmes», de Yan Fabre (photo)

AVIGNON, d’Aline GEMAYEL Ouverture du Festival In d’Avignon, dans la cour d’honneur du Palais des Papes, avec L’histoire des larmes du plasticien et metteur en scène flamand Yan Fabre. Au centre de la scène, une harpiste tout de blanc vêtue. Autour, neuf danseurs, recroquevillés par terre. Sur les côtés, d’autres danseurs frottent, nettoient et essuient des vases, des récipients en verre de différentes formes. Les premières notes de harpe qui s’élèvent dans la nuit avignonnaise donnent le signal: un véritable concert de vagissements exécutés par les danseurs à terre. Ils sont sur le dos, les quatre membres en l’air, hurlant à gorge déployée. Les danseurs qui les rejoignent tentent en vain de les apaiser, en les berçant dans leurs bras. Peine perdue. Ni caresses, ni fessées ne viennent à bout de ce tintamarre. Les danseurs adultes finissent par étouffer ces bébés inconsolables… Premier tableau d’une œuvre où le corps et ses fluides occupent une place centrale. Trois flux primaires sont ainsi mis en avant: la sueur, les larmes et l’urine. Une vingtaine d’acteurs, de danseurs et de musiciens qui évoluent sur scène reflètent la quête du chevalier du désespoir. Ce personnage autour duquel tourne cette pièce célèbre le corps et ses sécrétions. «Pissons, suons, pleurons, sans discontinuer», lance-t-il. Il est fier de ses larmes, de sa sueur, de son urine. Elles sont pour lui le moyen d’échapper au carcan d’un monde aseptisé, bien-pensant, politiquement correct. «Notre sueur, notre pisse, nos larmes sont dangereuses, elles ne doivent pas être vues. Les sécrétions sont impures, indécentes, menaçantes…», assène-t-il. Les tambours roulent en un orage furieux. Sur scène, les acteurs composent de très beaux tableaux. Leurs corps, souvent dénudés, suintent la sueur. Des bocaux recueillent leurs urines et leurs larmes. Une frénésie étourdissante de mouvements et de sons qui se termine en apothéose: les larmes qui se déversent du ciel, purifiant tout jusqu’à l’inondation… «Ce sont les larmes en tant que langage qui m’intéressent, explique Yan Fabre dans une interview publiée par le supplément du journal Le Monde consacré à la 59e édition du Festival In d’Avignon. Larmes érotiques, d’extase, larmes de l’urine, mais aussi larmes de la peau constituées par la sueur. Sur l’urine, c’est surtout Rabelais qui m’a inspiré, les scènes de Bosch, de Rembrandt dans lesquelles hommes et femmes pissent avec naturel. Il faut réapprendre à pleurer et, de préférence, avant les catastrophes.» Exit le politique qui avait mené la danse lors de l’édition 2004. Cette première représentation place le Festival 2005 sous le signe de l’humain. L’intime entre dans le jeu.

AVIGNON, d’Aline GEMAYEL

Ouverture du Festival In d’Avignon, dans la cour d’honneur du Palais des Papes, avec L’histoire des larmes du plasticien et metteur en scène flamand Yan Fabre.
Au centre de la scène, une harpiste tout de blanc vêtue. Autour, neuf danseurs, recroquevillés par terre. Sur les côtés, d’autres danseurs frottent, nettoient et essuient des...