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Actualités - CHRONOLOGIE

DÉBAT DE CONFIANCE - Hier, un seul député a annoncé qu’il votera « oui », et pour les neuf de l’opposition, ce sera « non » Le bloc Joumblatt, Harb et Safadi éreintent le gouvernement Karamé (Photo)

Une fois n’est pas coutume : l’opposition, toute l’opposition (le Rassemblement démocratique de Walid Joumblatt, Kornet Chehwane, le bloc tripolitain) était maîtresse, hier, de l’hémicycle. Et le gouvernement Karamé a entendu, en plus de trois heures, presque autant que les deux cabinets Hariri en quatre ans. Et sur les dix intervenants de la séance nocturne, seul le baassiste Abdel-Rahman Abdel-Rahman a annoncé qu’il allait donner sa confiance à la nouvelle équipe. À telle enseigne qu’en quittant la place de l’Étoile, le Premier ministre, pour lequel beaucoup d’opposants ont de la sympathie et du respect, a lâché un très amer et très éloquent : « Cette division du pays me désole et m’attriste... » Les neuf autres se sont tous déchaînés, avec plus ou moins de virulence, annonçant tous ou laissant présager un « non » retentissant au moment du vote : Ghazi Aridi, Akram Chehayeb, Antoine Ghanem, Salah Honein, Alaëddine Terro, Georges Dib Nehmé et Abdallah Farhat, qui ont réussi ou presque à compenser l’absence de leur chef de bloc, Walid Joumblatt, ainsi qu’un des ténors de KC, Boutros Harb, qui a déclenché les fureurs de Adnane Addoum, sans oublier Mohammed Safadi en son nom et au nom de deux autres Tripolitains, Maurice Fadel et Mohammed Kabbara. Pratiquement tous ont émis de sérieux doutes sur la qualité, la représentativité et l’équité de la loi électorale à venir ; relevant également le manque de compétence d’une grande partie du cabinet ainsi que l’incapacité de ce dernier à faire face aux innombrables défis qui secouent le Liban. Et tous, en rappelant leur attachement à des relations privilégiées avec la Syrie, ont mis l’accent sur la nécessité d’en finir avec les ingérences des SR dans la vie quotidienne et les affaires internes, et exhorté à l’application intégrale de l’accord de Taëf. C’est Ghazi Aridi qui a d’abord pris la parole en établissant, à partir de la tribune de l’hémicycle, un parallèle entre le rouge des criquets pèlerins « qui ravagent là-bas », à Jbeil ou ailleurs, et le rouge des criquets pèlerins « qui ravagent ici », sur les bancs réservés aux ministres. Après s’être attiré une réplique en règle de la part de Omar Karamé – « Mais qu’est-ce que vous voulez que l’on ravage ? Vous n’avez rien laissé » –, Ghazi Aridi a continué sur sa lancée et s’est employé, après avoir dynamité l’entité du cabinet, à démonter sa déclaration ministérielle. « Il y a unanimité pour dire que cette équipe est uniquement un gouvernement d’élections, chargé de garantir le succès des candidats en son sein, qui se présenteront » au printemps prochain, a dit l’ancien ministre de la Culture en se posant des questions sur la présence dans ce cabinet de personnes ayant été affaiblies ou laminées lors des municipales et des législatives précédentes. Mettant aussi en garde contre les éventuelles tentatives du pouvoir visant à « exercer des pressions sécuritaires » sur l’opposition, à l’affaiblir, « à semer la discorde ». Et Ghazi Aridi de se demander si « nous ne sommes pas à la veille de revanches », si les difficultés liées à la vie quotidienne des Libanais ne vont pas être « utilisées » pour contrer cette opposition. Il fait ensuite assumer au pouvoir toute la responsabilité de la sécurité des élections, qu’il souhaite démocratiques, justes et basées sur la petite circonscription. « Nous espérons que cela se passera ainsi avec Sleimane Frangié à la tête du ministère de l’Intérieur », a-t-il dit. Avant de rappeler au gouvernement que « la réconciliation nationale » a été achevée lors de la tournée du patriarche Sfeir dans la Montagne, et que « l’entente nationale » ne veut pas dire adéquation totale de la position et des points de vue des Libanais. Concernant les relations libano-syriennes, « pour lesquelles nous avons signé de notre sang avant que d’autres ne le fassent sur le papier », Ghazi Aridi a souhaité qu’elles soient basées sur la confiance, qu’elles soient productives dans l’intérêt des deux peuples, débarrassées des lacunes qui la grèvent. Pour lui, elles ont besoin d’un suivi et d’une évaluation quotidiens, et « cela n’a pas été fait, à quelque niveau que ce soit, depuis des années ». Refusant catégoriquement les accusations de traîtrise assénées par « des hommes liges de Damas qui n’ont rien à perdre, tout à gagner, mais qui nuisent au Liban et à la Syrie », il a souhaité que le Conseil supérieur mixte devienne une institution au vrai sens du mot. Le député de Beyrouth a également disséqué « les lacunes flagrantes » dans l’appréhension, par le gouvernement de la résolution 1559. Il a demandé à la nouvelle équipe de clarifier ses positions, notamment au sujet des propos de Omar Karamé et d’Élie Ferzli sur l’identité de la partie qui appliquera cette résolution au cas où « les moyens seraient mis en place ». Enfin, se penchant sur la multitude de promesses et de belles intentions du gouvernement sur le plan local (lutte contre la corruption, protection des libertés, etc.), Ghazi Aridi a émis les plus grands doutes sur leur faisabilité, assurant le gouvernement qu’il serait le premier à le féliciter au cas où il réussirait, et le remerciant de ne pas avoir utilisé, dans sa déclaration ministérielle, le mot « transparence ». Quant à Salah Honein, il n’y est pas allé par quatre chemins. « Sans la volonté des Libanais, sans leur attachement à la coexistence, à la démocratie, aux libertés, notre pays ne serait qu’une gageure », a-t-il dit. Et estimant que le simple fait de penser que la présence syrienne et « son influence dans la gestion du pays peuvent aider à l’établissement d’un système démocratique est une hérésie politique qui a dépassé toutes les limites », le député de Baabda, également membre de KC, s’est demandé, en répétant tout haut ce que la très grande majorité des Libanais pense tout bas, comment « peut-on admettre qu’un régime absolument hermétique à tout schéma démocratique puisse aider le peuple libanais, qui porte en lui les gènes même de la démocratie, à édifier un pouvoir libéré et évolué ». Rappelant que les Libanais doivent s’autogérer et atteindre un équilibre stable et durable, il a estimé qu’il faut pour cela respecter le facteur temps et se souvenir que les baguettes magiques n’existent pas ; mettre sur pied les mécanismes démocratiques adéquats, dont la loi électorale ; aboutir à un pouvoir « éclairé, sage, à l’opposé de celui qui règne actuellement, et qui multiplie les violences, qu’elles soient physiques ou morales » ; installer la « coexistence politique », exercer en commun la chose publique loin de tout extrémisme et faire en sorte que le règlement des problèmes interlibanais « sans l’hégémonie d’un quelconque intermédiaire » puisse éviter que ces obstacles ne se répètent ; adopter, enfin, une vision calme et globale du devenir du Liban. « Ainsi, au lieu de resssusciter les vents mauvais, comme certains l’ont fait récemment, essayons de réduire leur force, leur intensité. Essayons de contrer les intentions cachées de ces usurpateurs qui essaient de semer la peur pour entraîner les Libanais dans les dédales de la division », a assuré Salah Honein, répondant indirectement à ceux qui souhaitaient, ici et là-bas, « anéantir la réconciliation que le Liban a réussi à mener à bout et la démocratie qui est la sienne ». Le député de Aley, Akram Chéhayeb, a commencé en évoquant le gouvernement du « cela n’a pas été possible » et en résumant la déclaration ministérielle « du fait accompli » à du « non-travail, du non-suivi et de la non-tentative ». Il a exigé qu’un gouvernement « impartial » supervise les prochaines législatives, étant donné que l’équipe actuelle, « si elle est prête à les mener, est totalement incapable de rester neutre : nous en sommes sûrs, elle est trop monochrome », a-t-il dit. Et pour que les relations libano-syriennes soient les plus saines possible, débarrassées des interventions des SR dans les affaires internes du Liban et dans les détails de la vie quotidienne, Akram Chéhayeb a demandé l’application intégrale de l’accord de Taëf. « Le Liban est adulte », a-t-il dit, rappelant en outre que la situation économique du pays « nécessite réellement autre chose que les remarques du gouvernement ». Et comme tous ses collègues, il exigera que toute la lumière se fasse autour de la tentative d’assassinat de Marwan Hamadé, l’un des piliers du Rassemblement démocratique. Pour sa part, Antoine Ghanem (également membre de KC), qui a rappelé à Omar Karamé que le minimum de respect exige qu’il l’écoute quand il parle, comme lui-même le fait, a repris les antiennes de ses colistiers, notamment au sujet de la loi électorale, des relations libano-syriennes et de la résolution 1559, pour s’arrêter ensuite longuement sur un problème qu’il connaît bien : celui de l’appareil judiciaire. « Le gouvernement a décidé de brandir l’épée de la justice contre toutes les corruptions, tous les corrupteurs. Mais il a oublié que cette épée n’est pas indépendante ni assez tranchante en raison des interventions du pouvoir politique. Certains juges – certes minoritaires – prennent ainsi en charge la mission de la police judiciaire pour le compte des services de sécurité, emprisonnant ou libérant selon les consignes reçues », a dénoncé le député de Baabda. Même son de cloche pour les trois autres colistiers : Alaëddine Terro, Georges Dib Nehmé et Abdallah Farhat. Le premier a mis en garde contre la dégénérescence qui risque de frapper très vite les valeurs démocratiques qui ont fait le Liban, le second a rappelé que l’avenir du pays réside dans le dialogue national et l’attachement à l’accord de Taëf. Quant au jeune député de Aley, il a rappelé que le document de Clemenceau du Rassemblement démocratique avait fait la part belle au dialogue national, invitant le gouvernement à s’en inspirer. Z. M.
Une fois n’est pas coutume : l’opposition, toute l’opposition (le Rassemblement démocratique de Walid Joumblatt, Kornet Chehwane, le bloc tripolitain) était maîtresse, hier, de l’hémicycle. Et le gouvernement Karamé a entendu, en plus de trois heures, presque autant que les deux cabinets Hariri en quatre ans. Et sur les dix intervenants de la séance nocturne, seul le...