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INVASION - Pas de motifs sérieux de crainte, selon Georges Tohmé Le criquet, plus dangereux au stade de larve qu’adulte

« La situation est sous contrôle. » C’est par ces mots que le directeur général du ministère de l’Agriculture, Louis Lahoud, a affirmé une fois de plus à « L’Orient-Le Jour » que l’invasion de criquets pèlerins à Jbeil a été maîtrisée, et que les spécimens aperçus hors de cette ville soit appartenaient à d’autres espèces, soit étaient isolés, donc non dangereux. « Nous pouvons assurer que c’est ce que nous avons observé sur le terrain, bien que nous ne puissions pas savoir s’il en existe d’autres dans la nature », a-t-il dit. Il a rappelé que, selon les experts universitaires interrogés par le ministère et selon la FAO, les conditions climatiques ne sont pas réunies pour une reproduction de l’insecte au Liban en cette saison. Malgré cela, « le ministère est toujours préparé à intervenir en cas d’urgence, et le haut comité de secours se prépare à nous doter des quantités nécessaires d’insecticides », a poursuivi M. Lahoud. En outre, « nous avons mis au point, dans le cadre du programme régional de lutte contre le criquet, un plan d’urgence avec la FAO en cas de réapparition de l’insecte, en vertu duquel l’organisation devrait nous accorder équipements et insecticides », a-t-il ajouté. Pour ce qui est des personnes qui ont exprimé leur crainte de voir des vagues d’insectes resurgir sous forme de larves au printemps prochain (si les criquets arrivés au Liban depuis dimanche ont eu le temps de pondre), le directeur général a souligné que « certains ont intérêt à causer une panique auprès de la population dans le but de vendre des produits ». Alors, qui croire ? Nous avons interrogé Georges Tohmé, président du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS), qui a donné d’amples informations sur l’insecte, tout en déclarant que, selon lui, son arrivée en cette saison ne représente pas un danger majeur. Il explique que les criquets ou acridiens se présentent sous deux formes, grégaire (en groupe, de couleur rouge) ou solitaire (de couleur verte). Les criquets grégaires, migrateurs et voraces, ont été qualifiés de « fléau de Dieu depuis la Genèse ». Leurs invasions ont lieu à des intervalles irréguliers et imprévisibles parce qu’on n’en connaît pas le déterminisme, selon M. Tohmé. « Les variations climatiques ne suffisent pas à expliquer les vagues d’émigration », explique-t-il. C’est l’instinct de reproduction qui pousse apparemment les essaims d’insectes à rechercher les conditions climatiques favorables. « L’accouplement et la ponte ont lieu de manière immédiate dès l’arrivée des insectes à destination, poursuit-il. La ponte se fait par introduction de l’abdomen de la femelle dans le sol, dans une poche appelée oothèque, protectrice des œufs. Contrairement à la sauterelle verte, la femelle du criquet n’a pas ce qu’on appelle un “couteau” qui peut fendre la terre. Elle doit donc pondre dans un sol humide. » L’insecte passe par plusieurs étapes, de l’œuf à la larve marcheuse (de 3 à 4 mm), puis sauteuse (deuxième mue). C’est à ce stade que les larves s’avèrent dangereuses parce qu’elles peuvent constituer des troupes immenses et attaquer les plantations. L’insecte adulte, lui, ne tarde pas à mourir après la reproduction. Pour ce qui est de la vague observée actuellement au Liban, il n’y a pas de motifs de crainte sérieux selon M. Tohmé parce qu’il est peu probable que les femelles adultes arrivées dans les essaims à Jbeil aient été en mesure de pondre, le sol étant trop sec. D’un autre côté, même si un certain nombre de criquets a pu pondre, la baisse de température en hiver devrait empêcher les œufs de se développer en larves, d’où le fait que les vagues de criquets sont beaucoup plus dangereuses si elles déferlent au printemps. Il existe une autre raison d’être plus tranquille : la polyculture n’est pas propice à la propagation des criquets qui préfèrent se nourrir d’un seul type de culture. « La raison pour laquelle les criquets avaient causé autant de dégâts en 1916 au Liban, c’est que les mûriers étaient pratiquement la seule culture du pays, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui », explique M. Tohmé. Il rappelle que, contrairement à ce qui a été souvent répété ces derniers jours, la dernière apparition des criquets ne date pas de 1914 puis 1916, mais que d’autres vagues ont été observées notamment en 1945 et en 1986, selon ses souvenirs. Mais c’est la première invasion du siècle dernier qui a surtout marqué les esprits et demeure dans la mémoire collective, parce qu’elle a été dévastatrice et meurtrière, contrairement aux autres. Comme moyens de lutte, M. Tohmé cite les procédés traditionnels, comme le ramassage, ou d’autres comme les appâts empoisonnés ou les barrages (en verre, en acier...), qu’il préfère à la pulvérisation de substances chimiques pouvant nuire à la nature. Il estime cependant que « le ministère de l’Agriculture a bien réagi et manifesté de l’intérêt pour le sujet, se basant sur des consultations avec des experts ». S.B.

« La situation est sous contrôle. » C’est par ces mots que le directeur général du ministère de l’Agriculture, Louis Lahoud, a affirmé une fois de plus à
« L’Orient-Le Jour » que l’invasion de criquets pèlerins à Jbeil a été maîtrisée, et que les spécimens aperçus hors de cette ville soit appartenaient à d’autres espèces, soit étaient isolés, donc...