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Actualités - CHRONOLOGIE

Le manifeste de la Rencontre démocratique Pour « un Liban à l’image de ce que ses enfants ont choisi »

Voici de très larges extraits du manifeste de la Rencontre démocratique, dont lecture a été donnée hier par son chef, Walid Joumblatt : « Les développements politiques que le Liban a connus au cours des derniers mois ont projeté une lumière sur de larges pans de la crise dont souffre le système. Une crise dont les manifestations sont apparues à divers niveaux du pouvoir et qui ne s’arrêtera pas avec la violation de la Constitution et le gel de la vie démocratique, à travers la domestication de l’action politique au Liban et sa soumission au concept de l’État fermé, du prêt-à-penser, des décisions venues d’en haut et des orientations délivrées sur le mode des directives policières. « Il était naturel que ces développements aient un impact énorme sur l’opinion publique libanaise, et plus particulièrement sur les forces vives démocratiques, et suscitent chez elles colère, inquiétude et stupéfaction. De larges secteurs de la société nationale ont exprimé ces sentiments, traduits avec courage, honneur, dignité et détermination par une minorité de représentants du peuple à la Chambre, ainsi que par des centaines de voix qui se sont élevées à travers les médias et les tribunes politiques, syndicales, culturelles et populaires. « Le plus regrettable, c’est que ces voix hostiles à l’amendement de la Constitution ne sont pas parvenues à dissuader les parties influentes au sein du pouvoir de persister dans leur projet. Au contraire, celles-ci ont mis sur pied une campagne sans précédent d’intimidation politique, médiatique et sécuritaire au service de ce projet. Elles ont ainsi réussi à obtenir par la contrainte une majorité en faveur de la prorogation du mandat présidentiel et ont de ce fait empêché le Parlement libanais de saisir l’occasion historique qui se présentait de faire preuve de son utilité dans la protection du système démocratique. « Le sentiment d’amertume s’est trouvé encore accru face à l’insistance coupable à se prévaloir des intérêts stratégiques du Liban et de la Syrie pour mener l’opération de violation de la Constitution. « Les relations privilégiées entre le Liban et la Syrie constituent le pilier de la stabilité des deux pays, de leur développement et du renforcement de leur capacité à faire face aux défis. Mais ces relations et ce qu’elles comportent d’intérêts stratégiques ne doivent en aucun cas être soumises à des intérêts personnels, ni faire l’objet d’une transaction impliquant l’identité démocratique du Liban. « La dernière violation de la Constitution libanaise n’est pas le fruit d’un instant politique, celui de la décision de proroger le mandat du président de la République. Elle est le résultat de toute une ère grouillant de politiques, d’agissements, d’erreurs et d’ingérences qui ont torpillé les capacités d’édifier un État en mesure d’appliquer entièrement le document de Taëf. Au lieu de cela, nous avons assisté à la naissance d’un État tenu de l’extérieur et dans lequel les prérogatives, les allégeances, les institutions, les présidences et les politiques sont éparpillées. « La Rencontre démocratique reconnaît avoir donné son aval ou participé à certaines politiques, parfois fermé les yeux sur d’autres. Elle n’entend pas pour autant se priver de lancer des doigts accusateurs dans tous les sens, non point pour diffamer quiconque, mais dans le but d’inciter à commencer le travail consistant à traiter les causes du mal. « Conscients des différentes facettes de la crise, les Libanais n’ont d’autre choix que de s’unir pour la résorber et pour rejeter les tentatives en cours visant à l’ignorer, sous prétexte qu’il faut craindre pour nos intérêts nationaux et stratégiques. – Nous sommes face à une crise nationale dont les principales caractéristiques sont la violation permanente des accords de Taëf et le refus de la réconciliation réelle entre l’État et l’ensemble du peuple libanais ; – une crise constitutionnelle illustrée par les coups portés à la culture démocratique des Libanais, le sabotage des institutions, le viol des lois et les atteintes à l’alternance du pouvoir ; – une crise politique qui se manifeste par l’absence de participation au pouvoir et par la lutte que se livrent successivement les diverses institutions constitutionnelles entre elles ; – une crise administrative qui s’exprime par l’extension de la corruption financière, le pourrissement politique et le sous-développement administratif à tous les niveaux de l’État ; – une crise judiciaire marquée par les ingérences du pouvoir, à travers ses appareils sécuritaires et politiques, dans les affaires de la justice et la soumission d’une partie du corps judiciaire à l’égard du pouvoir ; – une crise économique, avec le gonflement de la dette, le refus d’appliquer Paris II et le risque pour le Liban de tomber dans l’inconnu ; – une crise sociale, avec l’accroissement de la pauvreté et de la misère au Liban et la hausse du chômage parmi les jeunes et les catégories instruites ; – une crise d’État, qui s’exprime par la question suivante : Qui gère l’État libanais ? ou par celle-ci : La gestion commune libano-syrienne de la chose publique libanaise depuis le début des années quatre-vingt-dix a-t-elle réussi ou échoué ? « Sur base de tout ce qui a précédé, la Rencontre démocratique proclame ce qui suit : Un : De la Constitution, la gestion de la chose publique et des libertés « L’amendement de l’article 49 est le couronnement d’une série d’atteintes qui ont fait de notre Loi fondamentale, tant dans sa lettre que dans son esprit, une feuille de vigne déchirée pour un régime qui, de la démocratie parlementaire, n’a plus que le nom. Le Conseil des ministres a été mis en panne, le Parlement a été écarté, les Conseils constitutionnel, économique et social et de l’Audiovisuel ont vu leur rôle confisqué. « Par la pratique, notre système est devenu bâtard, tirant sa paternité secrète des républiques bananières et sa maternité des fantômes des services de sécurité et des pouvoirs paralèlles. Tous les principes, tous les articles et les chapitres ont été violés. Le vrai gouvernant est devenu irresponsable et le responsable réel ne gouverne plus. L’État, à travers toutes ses institutions, s’est dévoyé vers un régime policier où les gouvernements sont formés par des forces de l’ombre, auxquelles ils obéissent. Des forces qui, à la base, n’ont aucune qualité et aucune prérogative. Il n’y a plus de frontière entre sécurité, politique, économie et justice. Toutes les institutions constitutionnelles (...) sont tombées dans une mare de corruption. Tous les principes de la séparation des pouvoirs et leur coopération ont disparu. Les caractéristiques du pouvoir se résument aujourd’hui à l’ingérence, aux jeux de l’influence, à l’espionnage, au chantage et à l’intimidation. « La Rencontre démocratique rejette la tentative visant à salir la politique et les hommes et partis politiques dans le but de dissimuler les abus commis par la nouvelle classe dirigeante formée de certains policiers, conseillers, juges et autres profiteurs qui ont brandi le slogan de la lutte contre la corruption. « Pour ce qui est des libertés publiques, la Rencontre démocratique se contentera de rappeler la série de violations qui ont été commises, en commençant par la répression des manifestations estudiantines, le putsch contre les résultats de l’élection partielle du Metn, la fermeture de certains médias audiovisuels, les pressions exercées sur les autres, y compris la presse écrite, les ingérences dans les affaires des formations syndicales et celles des partis politiques, la mainmise sur ces formations, la terreur pratiquée à l’encontre du Parlement, contraint de revenir sur son vote concernant le code de procédure pénale. « L’arrêt de toutes ces pratiques et le retour aux règles constitutionnelles et au respect des institutions sont aujourd’hui une priorité nationale. Le préalable en serait une initiative visant à revenir sur la violation de la Constitution. Deux : De l’entente nationale et de Taëf « Le respect des constantes faisant l’objet d’un consensus entre les Libanais est un pilier essentiel de notre unité nationale. « La Rencontre démocratique souligne l’importance d’une action visant à redorer le blason de Taëf, et cela par le biais de son application et par la consécration du principe de la participation à toutes les décisions. Il faudra notamment s’engager au respect du Préambule de la Constitution, surtout en matière de libertés publiques, de séparation des pouvoirs, de réforme financière et économique et de retour des déplacés. Une telle opération ne pourrait s’accomplir qu’à travers le lancement d’un vaste dialogue entre les Libanais, fondé sur la reconnaissance de tous, l’abandon de toutes les accusations de trahison et d’isolationnisme, et l’acceptation du modèle pluraliste pour la société politique libanaise. « Toute négation de ce modèle équivaut à annuler la signification et le rôle du Liban. L’État qui affirme vouloir engager un dialogue confiné uniquement aux institutions constitutionnelles est un État qui veut monopoliser la politique. Trois : De la loi électorale « Depuis le début des années 90, les lois électorales ont été taillées à la mesure de situations précises, allant à l’encontre de nombreux objectifs fixés par Taëf. Elles ont contribué à approfondir les divisions communautaires et confessionnelles, à porter un coup au principe de la représentation parlementaire authentique, à neutraliser la valeur de la voix de l’électeur, et sont devenues un instrument pour écarter et marginaliser certaines parties. « Tout en soulignant la nécessité de ramener la majorité électorale à 18 ans, la Rencontre démocratique met en garde contre toute loi prévoyant un découpage électoral qui considère le Liban comme une circonscription unique. Toute loi électorale qui ne prendrait pas en considération la composition et la diversité de la société libanaise ainsi que les principes qui assurent une représentation authentique de la population serait en réalité un projet destiné à imposer une hégémonie quantitative et à porter un coup au principe de la participation garantie par la Constitution. « La Rencontre démocratique appelle à un vaste dialogue autour d’une loi électorale qui prévoit un découpage électoral fondé sur la petite circonscription. Quatre : De la crise socio-économique « La situation économique nécessite une étude approfondie des moyens de sortir du sombre tunnel de l’endettement. « Tout en soulignant les nombreux facteurs qui ont contribué à l’exploitation de la matière économique dans les tiraillements politiques internes, la Rencontre démocratique met l’accent sur la nécessité d’établir des politiques de salut social et économique, prenant en considération (entre autres) les mesures pratiques susceptibles de régler le problème de la dette, les causes de la corruption et du gaspillage, ainsi que l’élaboration d’un plan de réforme de tous les secteurs, civils et militaires, de l’État. Cinq : Des relations libano- syriennes « Taëf a défini les fondements des relations libano-syriennes, sur base de coordination et de coopération, appelées à prendre corps à travers des accords dans tous les domaines. De manière à servir l’intérêt des deux pays, dans un cadre de souveraineté et d’indépendance respectives. Étant entendu que le Liban ne servirait ni de passage ni de base pour aucun État, aucune organisation visant la sécurité de la Syrie. De même, la Syrie ne permettrait aucune action menaçant la sécurité, la souveraineté et l’indépendance du Liban. Ces paramètres constituent l’essence même de ces intérêts stratégiques que les Libanais, unanimes, entendent cultiver. « Mais l’unanimité de l’engagement n’occulte pas la réalité de transgressions et des procédés utilisés pour les concrétiser. « On met généralement en relief, dans ce cadre, le rôle que la Syrie joue dans l’administration de dossiers libanais intérieurs. Ainsi que les interventions qui n’ont pas de rapport avec la sécurité pannationale, sa conception ou l’autorité dont elle dépend. Il en va de même pour l’exploitation nuisible des postes de pouvoir de la part de ce que l’on appelle “les mafias mixtes” des deux pays. « Il importe, pour la Rencontre démocratique, de souligner dans ce contexte que la source véritable du clivage concernant le rôle syrien au Liban reste la propension constante à faire prévaloir le facteur sécuritaire sur le facteur politique, dans la gestion des relations bilatérales. Ce qui ouvre la voie, spontanément, à une ingérence dans les fragments des affaires intérieures libanaises, loin des impératifs de la sécurité pannationale. Alors qu’il faudrait conforter ces relations sur des bases politiques constantes, que cela soit à l’ombre de la présence militaire syrienne ou après son retrait. « La Rencontre se doit de confirmer les constantes proclamées par son président au sujet de la présence syrienne et des perspectives relationnelles entre les deux pays frères. Elle réitère son étonnement désapprobateur à l’encontre des positions qui s’acharnent à lier les relations libano-syriennes, dans toutes leurs dimensions, à la présence militaire syrienne. La Rencontre voit dans ces positions une offense à l’expérience de la coordination, de la lutte historique commune menée par les deux peuples. Elle y voit également une atteinte réductrice à toutes les réalisations développées pour consolider et pérenniser des rapports bilatéraux qui, à notre avis, n’ont nul besoin d’un bouclier militaire pour perdurer. « Nous voulons que les relations libano-syriennes soient naturelles, bien ciblées, privilégiées, profitant également aux deux pays. Nous les voulons donc globales, à tous les niveaux, notamment économiques, culturels, politiques et sécuritaires. Toujours à travers les deux gouvernements et le Conseil supérieur libano-syrien dont on doit faire évoluer les structures pour promouvoir les piliers de la coopération entre les deux peuples comme entre les deux États. Sur des bases d’équilibre et de parité égalitaire. À travers une praxis respectant les règles constitutionnelles de chacun des deux États. Cela pour que la fraternité historique puisse vraiment s’épanouir. Il ne faut plus que certaines figures du pouvoir se camouflent derrière des slogans éculés pour faire passer des politiques erronées, déviantes. Six : De l’implantation, du droit de retour et de l’arsenal palestinien « La Rencontre démocratique, fermement attachée au droit de retour des frères palestiniens comme à ce rejet de l’implantation qui exprime une position libano-palestinienne unie, estime qu’il est nécessaire d’extirper cette question du cercle de chantage où elle se trouve exploitée. « Elle appelle de même au retrait de l’arsenal palestinien entassé dans les camps, en accord avec les représentants du peuple palestinien au Liban. En veillant à entourer la présence palestinienne dans les camps de soins humanitaires et de prestations sociales. « La Rencontre démocratique, qui soumet ces positions et ces orientations à l’ensemble des Libanais, souhaite voir toutes les forces démocratiques s’unir dans la défense des intérêts supérieurs du Liban. « L’unité nationale doit rester, et restera, le label porteur de notre volonté de protéger la stabilité de notre pays. Et de renforcer la communauté d’existence, de vie, liant tous les Libanais. « La démocratie doit rester, et restera, le label de notre engagement à défendre nos libertés. Et de notre rejet de tous les aspects traduisant un quelconque hégémonisme, une mainmise sur notre système démocratique. « Nous voulons un Liban à l’image de ce que ses enfants, son peuple, ont choisi. Et pas du tout à l’image retenue par les services et les chambres noires qui ponctuent les catacombes des SR. « C’est sur de telles bases que nous signons notre détermination. Et que nous continuerons à appeler à l’épuration de la vie politique libanaise, polluée par les émanations des intrus qui envahissent le système démocratique. »
Voici de très larges extraits du manifeste de la Rencontre démocratique, dont lecture a été donnée hier par son chef, Walid Joumblatt :

« Les développements politiques que le Liban a connus au cours des derniers mois ont projeté une lumière sur de larges pans de la crise dont souffre le système. Une crise dont les manifestations sont apparues à divers niveaux du pouvoir...