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Actualités - OPINION

ÉCLaIRAGE Pas de changement ministériel avant le 2 octobre, affirme Berry Le nouveau gouvernement en gestation est sur la « waiting list »

Une fois de plus, le Liban entre de plain-pied dans une période de quasi-paralysie au niveau de l’Exécutif. S’il faut en croire, en effet, les propos du président de la Chambre, Nabih Berry, le nouveau cabinet ne verra pas le jour avant le mois d’octobre. Une manière habile de marquer une pause sur la scène politique, en attendant les développements sur la scène internationale et les retombées de la dynamique initiée par la résolution 1559 du Conseil de sécurité. En attendant, aussi et surtout, le rapport que le secrétaire général de l’Onu doit élaborer sur la situation au Liban à la lumière de la 1559 : retrait syrien du Liban, respect de la souveraineté et de la démocratie libanaises, démantèlement des milices et déploiement de l’armée sur l’ensemble du territoire libanais. Même si elle n’a pas été exprimée clairement, une volonté saute aux yeux : celle de marquer une pause pour permettre aux décideurs extralocaux de décrypter la situation avant de décider – jeu d’échecs diplomatique oblige – quel « pion » avancer, et, partant, quelle formule ministérielle mettre en place. C’est en effet sur base du rapport Annan (prévu pour le 3 octobre) et de l’évolution du processus en cours dans un sens ou un autre, que Damas – et accessoirement Beyrouth – décidera s’il faut mettre en place un gouvernement aguerri et prosyrien, que le caractère d’urgence de la situation impose à la Syrie (tout comme il a imposé Assem Kanso, Abdel Rahim Mrad et les autres à la veille de l’offensive US sur Bagdad). Ou une formule plus « soft », dont la fonction latente serait une indispensable légitimation du régime du président Lahoud, après le coup de force du 4 septembre, place de l’Étoile. Un tel cabinet s’inscrirait dans la suite logique des appels au dialogue lancés, depuis, par Baabda. C’est dans ce cadre qu’il faut interpréter la position de M. Berry, qui a affirmé hier à l’issue de la rencontre hebdomadaire avec le président de la République, le général Émile Lahoud, qu’il avait souhaité un report de la démission du gouvernement jusqu’à après son retour, le 2 octobre, de Genève où il doit participer aux réunions de la Fédération internationale des parlementaires. « Cette réunion est très importante, et j’avais déjà annoncé que je m’y rendrai personnellement parce qu’il s’agit d’une occasion rare de réunir tous les Parlements du monde et expliquer la portée et les dessous de la résolution 1559 du Conseil de sécurité, ainsi que ses dangers sur la démocratie nationale de chaque pays », a indiqué M. Berry. Les deux hommes ont également évoqué le communiqué de la Ligue arabe. M. Berry a indiqué qu’il aurait préféré que « la décision de la Ligue ait plus de poigne et prenne le parti du Liban, sauf si la coordination entre les pays arabes doit désormais être justifiée ». Le président de la Chambre a ensuite contacté par téléphone le Premier ministre, Rafic Hariri, souhaitant à ce dernier d’ajourner sa démission à la première semaine du mois prochain. M. Hariri a réagi favorablement à la démarche du chef du Législatif. Par ailleurs, Nabih Berry a indiqué hier, devant un groupe d’une trentaine de parlementaires, qu’il « s’attend à une démission du gouvernement le 2 octobre prochain ». Interrogé par les députés sur sa vision du prochain gouvernement, M. Berry a souligné la nécessité de « ne pas anticiper ou hâter le cours des choses », affirmant qu’il appellera de son côté à « un cabinet d’union nationale qui pourra garantir l’unité des Libanais face aux défis fondamentaux ». Il a par ailleurs mis l’accent sur la nécessaire « protection des amitiés traditionnelles du Liban que l’on veut sciemment ébranler par le biais de la divergence de positions sur la résolution 1559 ». « À commencer par la France, qui ne doit épargner aucun effort dans sa bataille visant à se retrouver de nouveau au côté des causes nationales arabes », a-t-il ajouté. Mais la question du gouvernement pose également, au niveau interne, une multitude de problèmes, relatifs à trois pôles politiques : le Hezbollah, Rafic Hariri et Walid Joumblatt. Le Hezbollah a affirmé hier, par la voix du chef de son bloc parlementaire, Mohammed Raad, qu’il prendrait part au nouveau cabinet si un certain nombre de paramètres « nationaux et économiques sont réunis » : la solidarité nationale « face aux agressions américaines qui visent à appliquer le projet d’hégémonie israélien sur le Liban, la Syrie et la région », la priorité à octroyer à la crise économique pour consacrer la résistance, la fin de la corruption et du gaspillage au niveau des fonds publics, et l’intérêt à accorder au dossier administratif. Il faut noter au passage que le Hezbollah, qui refusait toujours d’assumer des responsabilités au sein de l’Exécutif par un savant dosage visant à garder la Résistance hors des rouages du système politique, évoque pour la première fois aussi sérieusement son éventuelle participation au gouvernement. Soumis à d’intenses pressions internationales, son entrée au gouvernement l’aiderait à acquérir un peu plus de légitimité démocratique ou, tout au moins, une couverture politique. Reste à savoir quelle serait la réaction des États-Unis face à une telle initiative. Rafic Hariri aurait, lui aussi, ses propres conditions pour reprendre la tête du gouvernement, dont il discutera prochainement avec Damas et Émile Lahoud. C’est pourquoi, pour l’instant, il n’a toujours pas, dit-on, pris de décision à ce niveau. L’une des conditions du Premier ministre serait la participation du bloc joumblattiste au gouvernement, sans quoi la présence de Walid Joumblatt au sein d’un front d’opposition élargi pourrait poser un grand problème, notamment lors des prochaines législatives. Or le seigneur de Moukhtara et son bloc refusent toujours de participer au gouvernement, malgré les rumeurs selon lesquelles l’on chercherait à séduire l’un ou l’autre des députés maronites de la Rencontre démocratique, pour les gagner, ultime coup de Jarnac, à la cause du gouvernement et du loyalisme « lahoudiste ». Pour les joumblattistes, aucun élément ne mérite actuellement un changement de position à ce sujet. D’autant que depuis le 4 septembre, aucune vision globale, aucune proposition cohérente, dotée d’une perspective, n’a véritablement émergé sur le terrain politique, indiquent-ils. Conclusion pratique : la scène politique libanaise, formée d’une conjonction de négations, se passe bien volontiers, pour l’heure, d’un nouveau gouvernement. Qui devra donc attendre Kofi Annan. Michel HAJJI GEORGIOU
Une fois de plus, le Liban entre de plain-pied dans une période de quasi-paralysie au niveau de l’Exécutif. S’il faut en croire, en effet, les propos du président de la Chambre, Nabih Berry, le nouveau cabinet ne verra pas le jour avant le mois d’octobre. Une manière habile de marquer une pause sur la scène politique, en attendant les développements sur la scène...