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Actualités - ANALYSE

ANALYSE - Le président de la Chambre estime qu’il est trop tôt pour se prononcer Entre le souci de la communauté chiite et les questions sociales, Berry esquive la présidentielle

Avec ce qui se passe à Najaf, la rencontre de deux heures entre l’ayatollah Ali Sistani et le président de la Chambre, Nabih Berry, vendredi 6 août à l’AIB, revêt une grande importance. Tous les yeux étant désormais tournés vers Najaf – plongée dans le chaos et privée de son grand chef religieux, parti se faire soigner à Londres – la communauté chiite est devenue au cœur de l’actualité, au Liban, en Irak et un peu partout dans le monde. D’ailleurs, Nabih Berry ne s’y est pas trompé puisque depuis quelque temps, plus exactement depuis la fin des élections municipales, son principal souci est de restructurer cette communauté au Liban, à commencer par son mouvement, Amal. Selon les informations recueillies, c’est l’ayatollah Sistani qui aurait demandé à faire une escale à Beyrouth, au cours de son voyage vers Londres à bord de l’avion privé spécialement affrété pour lui. C’est aussi lui qui aurait demandé à être accueilli à l’AIB, pour l’escale de deux heures, par le président de la Chambre. Bien que les deux hommes ne se connaissent pas personnellement, M. Berry a toujours éprouvé un grand respect pour cette référence religieuse que constitue l’ayatollah Sistani. D’ailleurs, sa famille a toujours versé la « zakat » à l’ayatollah, plutôt qu’à d’autres recours religieux. Berry ne s’étant jamais rendu en Irak, du temps de l’ancien président Saddam Hussein, il n’avait pas eu la possibilité de rencontrer l’ayatollah. Mais sa fille, Silan, en pèlerinage à Najaf, avait eu la chance d’être reçue par lui, il y a plus d’un an, dans un hommage clair de la part de l’ayatollah au président de la Chambre. Que se sont dit les deux hommes, conscients de la gravité de la situation dans la région ? Des sources proches du président de la Chambre affirment que ce dernier est resté très discret, insistant toutefois auprès de son interlocuteur sur la nécessité d’éviter toute partition de l’Irak – qui pourrait avoir de terribles répercussions sur l’ensemble du Moyen-Orient – et de privilégier le dialogue entre les communautés, pour déjouer les plans d’effrittement de l’Irak. Les mêmes sources précisent que le président de la Chambre a souhaité une plus grande « arabisation » de la communauté chiite, au détriment d’une éventuelle iranisation, afin que Najaf redevienne le recours principal de cette communauté dans la région. Dans ce même ordre d’idées, il aurait ainsi prôné un rapprochement avec la Syrie, qui reste, surtout à l’heure actuelle, « un bastion de l’arabité et de la lutte contre les projets israéliens ». Bien sûr, les deux hommes ont vivement déploré la situation à Najaf, appelant de tous leurs vœux un retour au calme et une participation de toutes les composantes de la société irakienne au congrès national. Éviter les remous de la présidentielle Pour Berry, le thème chiite est un de ses principaux soucis actuellement. Et lorsqu’il a dit aux journalistes, mercredi dernier, « ne me parlez pas de la présidentielle avant le 25 octobre », il ne s’agissait pas seulement d’une boutade, mais d’une volonté réelle de ne plus évoquer cette question dans les médias, pour se concentrer sur des problèmes plus urgents : la communauté chiite et les questions sociales libanaises. Selon les sources qui lui sont proches, Berry estimerait que la féroce campagne menée contre lui pendant quelques mois par des pôles d’influence libanais était essentiellement destinée à le pousser à prendre position clairement sur le thème de la présidentielle. Et lui s’est efforcé tout au long de ces derniers mois de montrer qu’il ne cèdera pas devant un tel chantage. Aujourd’hui, le message est sans doute passé et la campagne a baissé d’intensité. Ceux qui espéraient utiliser la position du président de la Chambre – qui est aussi le chef du plus important bloc parlementaire – pour tenter de pousser la Syrie à donner son opinion sur la question auraient donc compris que ce projet-là ne pouvait aboutir et que ce n’est pas de cette manière qu’ils réussiront à convaincre les autorités syriennes de dévoiler leurs intentions avant le moment propice. Le dialogue syro-américain sur le point d’être relancé Selon les proches de Berry, toutes les options seraient encore ouvertes, aussi bien la reconduction du président Lahoud que l’élection d’un nouveau chef de l’État. Le fait d’annoncer que la page de la reconduction est tournée s’inscrit, selon lui, dans le cadre de la campagne antiprorogation, bien plus que dans la réalité des faits. Preuve en est qu’aucun grand bloc parlementaire n’a encore officiellement pris partie contre cette option ou en faveur de tel ou tel candidat. Même le bloc Hariri, qui milite clairement contre la reconduction à travers ses médias et les déclarations de ses membres, ne s’est pas encore officiellement déclaré, encore moins le bloc Joumblatt ou celui du Hezbollah. C’est dire qu’effectivement toutes les options sont encore ouvertes et aucun bloc ne souhaite se déclarer avant de connaître la volonté des Syriens. En disant donc aux journalistes : « Rendez-vous le 25 octobre », Berry sait très bien qu’à ce moment-là, les dés auront été jetés et que l’identité du futur locataire de Baabda sera alors probablement connue. En attendant, Berry ne souhaite pas être entraîné, malgré lui, dans de nouvelles zizanies et dans des conflits stériles, puisqu’il a compris que les Syriens ne se prononceront pas avant le moment qu’ils jugeront propice pour eux. Car les signaux contradictoires émanant de l’Administration américaine prouvent une chose, selon les proches du président de la Chambre : le dialogue syro-américain a commencé et ce n’est certes pas en période de prénégociation que les autorités syriennes vont abattre leurs cartes. Selon Berry – et il s’emploie lui-même à le faire –, il serait bien plus utile, à l’heure actuelle, de s’occuper des problèmes sociaux des citoyens, de resserrer les rangs internes et de garder les yeux fixés sur les développements en Irak. La réponse aux nombreuses questions que se posent les Libanais pourrait bien venir de là. Scarlett HADDAD
Avec ce qui se passe à Najaf, la rencontre de deux heures entre l’ayatollah Ali Sistani et le président de la Chambre, Nabih Berry, vendredi 6 août à l’AIB, revêt une grande importance. Tous les yeux étant désormais tournés vers Najaf – plongée dans le chaos et privée de son grand chef religieux, parti se faire soigner à Londres – la communauté chiite est devenue au...