Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

ANALYSE - La succession d’Émile Lahoud sans doute au cœur de la rencontre syro-US du 2 août Washington matraque et cible : La Constitution libanaise est sacrée

Le 2 août prochain sera l’occasion de voir se concrétiser, en principe, la première (et importante) étape d’un processus certes très long mais de moins en moins virtuel, qui pourrait éventuellement se conclure par la levée d’une partie ou de toutes les sanctions américaines contre la Syrie. Des experts américains et syriens en tous genres se retrouveront ainsi autour de la même table, à Washington, pour négocier – ce sera compliqué, rude, ardu – les nombreux points de la salsa, ce désormais fameux Syria Accountability and Lebanese Sovereignity Restoration Act. Ce qui veut dire que le dossier libanais se taillera une part assez grosse de ce dialogue préparé de main de maître par la ministre syrienne des Émigrés, la surprenante Boutheina Chaabane. Même si, comparée aux volets irako-syrien et israélo-syrien, la question libanaise n’est que la partie visible de l’iceberg régional. Il n’empêche, pour qui évoque la question libanaise (abstraite, certes utopiquement, de son environnement régional) dans le cadre d’un mano a mano entre Washington et Damas, il y a, de facto, quelques thèmes inéluctables à prendre en compte et sur lesquels s’axeront, bon gré mal gré, les négociations : la présence militaire syrienne au Liban, la tutelle politique de Damas, le statut du Hezbollah (et là Téhéran est incontournable), l’armée au Liban-Sud, les camps de réfugiés palestiniens, et, « last but not least », saisons électorales obligent, la présidentielle 2004. Et parce qu’il est particulièrement difficile, voire impossible, d’accéder à un second niveau, puis aux suivants, sans avoir terminé et réussi le premier, parce que la locomotive ne peut pas avancer si le wagon de tête est bloqué, l’échéance automnale revêt désormais une importance majeure. Pour tous – à commencer par les Américains. L’élection du successeur d’Émile Lahoud sera ainsi, de tous les sujets, celui qui pourrait faire l’objet de toutes les intransigeances. Et depuis deux petites semaines, les Américains font le travail en amont. Sans tambour ni trompette, mais avec un sens particulièrement aigu de l’efficacité. En n’oubliant ni Richard Armitage ni Ray LaHood, c’est le président américain qui a ouvert le bal. « Le Liban a été l’un des premiers à édifier des institutions démocratiques au Moyen-Orient et a toujours été un pont entre l’Orient et l’Occident. Cette année est importante pour le Liban sur le plan des échéances électorales. Les États-Unis souhaitent que ces élections à venir respectent la Constitution libanaise, et qu’à l’avenir le Liban soit indépendant, totalement souverain et libre des ingérences extérieures et de la domination. (...) Lorsque la Syrie participera à la construction d’un Moyen-Orient stable, sûr et libre du terrorisme et de la violence – ce qui suppose un Liban libre et indépendant –, les États-Unis répondront positivement », a dit George Bush, le 16 juillet, s’adressant aux participants au 41e Congrès maronite qui s’est déroulé à Orlando. Sachant que quelques heures à peine avant les cérémonies du 60e anniversaire du jour J, en France, le locataire de la Maison-Blanche avait déjà évoqué, en compagnie de Jacques Chirac, ce nécessaire respect, dans le cadre de l’élection présidentielle libanaise à venir, de la loi fondamentale. Moins d’une semaine plus tard, le 22 juillet, lors de l’investiture officielle du nouvel ambassadeur US à Beyrouth, Jeffrey Feltman, le sous-secrétaire d’État américain, Marc Grossman, enfonçait le clou : « Au cours des mois à venir, le Liban connaîtra des élections présidentielle et législatives. Elles devront être libres et justes, respecter la Constitution libanaise et se tenir à l’abri des interventions de quelque pays étranger que ce soit. (...) Le président Bush a été clair en soulignant la volonté américaine de promouvoir les libertés, la démocratie et la paix à travers le M-O, et le Liban est naturellement au cœur de cette volonté », a dit le diplomate américain. Mêmes mots, mêmes références et même ton pour le successeur de Vincent Battle, répondant à Marc Grossman. « Le Liban est entré dans sa période d’élections – lesquelles, si l’on s’en tient à la Constitution libanaise, devraient désigner, au cours de l’automne à venir, un nouveau président, puis, au prochain printemps, un nouveau Parlement. Nous espérons que le Liban va montrer à ses amis et à ses voisins qu’il a radicalement dépassé la tragédie qu’il a vécue dans le passé, et qu’il est prêt à faire face à tous les défis – économiques, sécuritaires et politiques –, seul, sans interventions étrangères », a martelé Jeffrey Feltman. Avant de faire référence, comme autant d’indices subliminaux sur sa conception de la région en général et du Liban en particulier, à ceux qui l’ont le plus aidé, et influencé : William Burns, David Satterfield et Martin Indyk, entre autres. Les Américains ne sont ni philanthropes, ni humanistes, ni mécènes ; il se pourrait cependant qu’ils aient compris et admis – au-delà de leur poker endiablé avec la Syrie et de cette carte libanaise que Washington (tout autant que Damas d’ailleurs) voudrait bien utiliser à bon escient, et à cause de (ou grâce à) la guerre en Irak et ses conséquences imprévues –, qu’une contamination positive et constructive des pays de la région et une démocratisation de leur système politique ne pourraient aucunement se faire par le truchement de leur allié de toujours, l’État hébreu. Reste, naturellement, le Liban. Ainsi ont-ils visiblement décidé de commencer, aux plus hauts échelons de leur Administration, un matraquage et un ciblage en bonnes et dues formes. Dont la quintessence et la traduction sont les mêmes : le respect de la Constitution libanaise lors de la présidentielle à venir est le mieux à même de conforter, dans leur esprit comme dans leur lettre, la démocratie et l’État de droit. Et, peut-être, faire tache d’huile. Tout cela sans tomber, pour l’instant, dans le piège mortel de l’ingérence ; sans exiger, du moins officiellement, tel ou tel présidentiable comme successeur d’Émile Lahoud. Et, toujours pour l’instant, Bachar el-Assad semble abonder dans ce sens : il a souhaité, publiquement, que les Libanais s’expriment et s’entendent entre eux – sachant que le futur locataire du palais de Baabda ne devrait en aucun cas être un ennemi de la Syrie. Sauf que personne à Damas n’a encore évoqué la sacralité de la Constitution libanaise. Cela ne se fera, sans doute, que si le dialogue syro-américain n’avorte pas. Le mois d’août sera prépondérant. Ziyad MAKHOUL
Le 2 août prochain sera l’occasion de voir se concrétiser, en principe, la première (et importante) étape d’un processus certes très long mais de moins en moins virtuel, qui pourrait éventuellement se conclure par la levée d’une partie ou de toutes les sanctions américaines contre la Syrie. Des experts américains et syriens en tous genres se retrouveront ainsi autour de...