D’un côté, un général s’imaginant, moderne...
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Le point Piège pour deux
Par MERVILLE Christian, le 19 juillet 2004 à 00h00
Surtout ne pas laisser le bouillonnement en cours dans les Territoires autonomes occulter les événements qui, depuis quelques jours, ont pour théâtre Israël. Pour se poser une question primordiale : tout comme la révolution dont parlait Georg Büchner, la douloureuse question de Palestine serait-elle en train de dévorer ses enfants ?
D’un côté, un général s’imaginant, moderne Arik, investi de la destinée de sauveur de son pays, refusant de décrocher et s ’obstinant à faire de la politique au lance-flammes, comme il faisait hier la guerre ; d’un autre côté, un vieux routier miné par la maladie, dépassé par les événements, s’accrochant à son statut de chef alors qu’il n’est plus, au mieux, qu’un symbole. Et en Cisjordanie autant qu’à Gaza, ici plus que là peut-être, un peuple palestinien écartelé entre sa fidélité à ses dirigeants – historiques certes, mais rongés par la perte de foi en une cause dont ils furent, en d’autres temps, les ardents défenseurs – et son désir de construire enfin un avenir qu’on ne cesse de lui refuser.
Le constat établi il y a peu de temps par Mohammed Dahlan, d’une terrible et combien amère lucidité, demeure d’actualité : « Nous avons échoué à faire la guerre ; nous avons échoué à faire la paix, avait-il reconnu au début de l’été devant un parterre féminin. Maintenant, il nous faut faire le choix. » Lequel ? Tout simplement, à quelques mois du retrait israélien, celui de la nature du pouvoir appelé à se mettre en place. L’enclave sera-t-elle régie par le consensus, par la force ou bien conformément aux résultats d’élections générales qui y seraient organisées ? Dans cette étroite bande de terre qui fut presque égyptienne durant la période comprise entre les deux guerres, celle de 1948 et celle de 1967, règne la misère la plus noire : 64 pour cent de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté, soit avec près de deux dollars par jour ; la proportion de jeunes (moins de 21 ans) dépasse 65 pour cent, en faisant l’un des chaudrons les plus dangereux du globe ; enfin, les voix des sirènes islamistes se font suffisamment insistantes pour attirer un nombre sans cesse grandissant de partisans.
La conséquence politique de « la folie des armes » – dixit Abdel Rahman Hamad, ministre dans le cabinet sortant – qui prévaut sur le terrain n’a pas tardé à apparaître. Tout comme Mahmoud Abbas au début du mois de septembre, son successeur, le brave Ahmed Qoreï, s’est résigné samedi à rendre son tablier de Premier ministre. Une démission qui demeure théoriquement suspendue jusqu’à la réunion, aujourd’hui lundi, du gouvernement. Mais déjà, elle a eu pour effet de compliquer encore plus une situation qui ne saurait indéfiniment être marquée par le surplace.
Ce qui est en question, c’est l’aptitude à choisir, une qualité qui fait défaut aujourd’hui au niveau de la direction palestinienne. En définitive, Yasser Arafat aura perdu trop de temps et d’énergie à arbitrer de vaines querelles, à naviguer entre toutes les eaux troubles internationales dont les vagues ballottaient le navire palestinien au point qu’aujourd’hui, même d’anciens collaborateurs l’accusent de ne pas avoir une vision à offrir aux siens. Plus grave : son Administration est tellement gangrenée par la corruption qu’elle en arrivée à perdre toute crédibilité. Les plus fidèles d’entre les fidèles, les Brigades des martyrs d’al-Aqsa, viennent à leur tour d’entrer en sédition ouverte, prenant d’assaut en week-end les locaux des services de renseignements, à Khan Younès, pour protester contre la désignation d’un neveu d’Abou Ammar, le général Moussa Arafat, à la tête des services de la sécurité générale.
Face à ce qu’il faut bien se résigner à appeler le chaos règne la plus totale des incohérences. Ariel Sharon, que n’étouffent pas les états d’âme, a déjà choisi de brûler ce qu’il a adoré. La décision d’ordonner le démantèlement des colonies de peuplement de la bande de Gaza et le rappel des soldats qui y sont stationnés a représenté un véritable coup de boutoir porté à son équipe, désormais menacée de dislocation. Privé de sa majorité, le chef du gouvernement israélien bat le rappel de ses adversaires de la veille : les travaillistes de Shimon Peres forts de 19 précieuses voix et les onze députés du Shass. Rien n’indique pour l’heure que la manœuvre est assurée de réussir. Ni que les motions de censure à répétition auxquelles il est soumis à la Knesset ne vont pas déboucher sur des élections législatives anticipées. C’est-à-dire sur l’inconnu.
Auquel cas, le piège mis en place pour prendre dans ses tenailles ce renard d’Abou Ammar se sera refermé aussi sur son auteur.
Christian MERVILLE
Surtout ne pas laisser le bouillonnement en cours dans les Territoires autonomes occulter les événements qui, depuis quelques jours, ont pour théâtre Israël. Pour se poser une question primordiale : tout comme la révolution dont parlait Georg Büchner, la douloureuse question de Palestine serait-elle en train de dévorer ses enfants ?
D’un côté, un général s’imaginant, moderne...
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