Rechercher
Rechercher

Actualités

Affaire Hassoun - Une libération rocambolesque avec plusieurs zones d’ombre Le jeune GI n’est devenu citoyen américain qu’à l’aéroport de Beyrouth

Moins d’une semaine après son départ pour les États-Unis, Wassef Ali Hassoun continue à intriguer les milieux politiques et diplomatiques. Son enlèvement en Irak, à la fin du mois de juin, avait suscité une grande émotion au Liban et la nouvelle de sa remise en liberté a provoqué des rixes à Tripoli, causant la mort de deux personnes. Bref, d’informations contradictoires en supputations diverses, le mystère n’a cessé de s’épaissir. Si le jeune GI est aujourd’hui à l’abri, il a bien failli ne pas quitter le territoire libanais, faute de papiers d’identité. C’est donc en toute vitesse que l’ambassade américaine lui a fabriqué un passeport, et le jeune homme qui subit actuellement un « debriefing » sans doute serré peut se vanter d’avoir obtenu le plus rapidement du monde la nationalité américaine. Une grande consolation après ce qu’il a subi ? Wassef Ali Hassoun, un Américain d’origine libanaise, âgé de 24 ans, est devenu célèbre à mesure que ses déboires augmentaient. Des recoupements effectués auprès de sources diverses, notamment certaines ayant suivi l’enquête de près, montrent que ce jeune homme, originaire de Denniyé, fief des intégristes libanais, se serait engagé dans les Marines américains en contrepartie de la promesse d’obtenir la nationalité au bout d’une période de quatre ans. Cette procédure accélérée serait proposée depuis le déclenchement de la guerre en Irak aux jeunes étrangers en situation plus ou moins irrégulière aux États-Unis. S’ils acceptent de combattre pour une durée déterminée, ils peuvent, à la fin de ce « service militaire » sur le terrain, présenter une demande pour obtenir la nationalité. Beaucoup de jeunes d’origine latino-américaine auraient sauté sur l’occasion, ainsi que quelques jeunes d’origine arabe. Wassef Ali Hassoun en ferait partie. C’est donc fort de cette promesse qu’il s’est envolé pour Bagdad, où il n’était pas vraiment en terrain hostile, puisque un de ses frères travaille sur la ligne Bagdad-Damas-Beyrouth. Un faux enlèvement ou une véritable mésaventure ? En fait, pour cette raison et pour d’autres sans doute moins claires, nul ne s’attendait à la nouvelle de son enlèvement. Et là, les informations ne sont pas tranchées. Pour certaines sources, Hassoun aurait monté, avec des amis de son frère, le scénario de son enlèvement pour pouvoir rentrer clandestinement au Liban. Pour d’autres, il aurait été bel et bien enlevé, les ravisseurs appartenant à des nébuleuses intégristes qui ne veulent pas que des jeunes d’origine arabe puissent s’enrôler ou aider l’armée américaine. Ce qui est sûr, c’est qu’après avoir disparu fin juin à Bagdad, le jeune homme est réapparu de façon très éphémère à Tripoli, dimanche dernier. Sa famille a, en effet, utilisé tous les moyens à sa disposition pour s’attirer la sympathie des ulémas musulmans, demandant à des hommes de religion libanais proches des courants salafistes d’intervenir en sa faveur. La famille a aussi multiplié les déclarations sur son engagement en faveur des causes arabo-musulmanes, allant même jusqu’à nier toute coopération avec les Américains. De fait, les ulémas libanais ont publié un communiqué dans lequel ils ont vivement souhaité la remise en liberté du jeune Hassoun. Et, un miracle peut arriver, les ulémas irakiens ont été sensibles à cette demande. C’est en tout cas la version officielle, celle qui adopte la thèse de l’enlèvement. Elle ne suppose pas vraiment l’existence de réseaux occultes entre les ulémas irakiens et libanais, car les premiers peuvent décider de répondre positivement à une demande faite par des « confrères », uniquement par principe. Wassef Ali Hassoun a donc regagné le Liban dans la plus grande discrétion, passant clandestinement la frontière irako-syrienne puis syro-libanaise, peut-être dans une voiture affrétée par son frère, spécialiste des transports routiers, avant de se réfugier à Tripoli, auprès des membres de sa famille. Il aurait pu y rester plus longtemps, si des rixes n’avaient éclaté à Tripoli même, entre certains de ses proches et des habitants qui l’accusaient, ainsi que sa famille, d’être des « collaborateurs des occupants américains ». Un scénario discret remis en cause par la Sûreté générale Le jeune homme aurait alors pris peur et ne se sentant plus en sécurité au Liban, il a contacté l’ambassade américaine pour lui demander de le faire évacuer. C’est ainsi que les autorités libanaises ont appris sa présence à Tripoli. L’ambassade arrange alors un rendez-vous avec l’otage libéré, et après un bref entretien, l’emmène à Awkar, où il sera mis à l’abri. Des arrangements sont pris avec l’armée libanaise pour l’évacuer à bord d’un avion militaire américain qui doit atterrir à l’AIB. L’avion devait décoller vendredi dernier à 12h15 et les Américains espéraient obtenir un départ discret, sans que le jeune homme ne passe par la Sûreté générale libanaise, pour hâter son arrivée en lieu sûr. Mais la Sûreté ne pouvait accepter un tel scénario, exigeant de pouvoir examiner les papiers du voyageur. Alertés, les responsables politiques ont appuyé la position de la Sûreté qui défendait la souveraineté libanaise. C’est ainsi que les autorités ont découvert que le jeune Hassoun n’avait pas de papiers, et surtout pas un passeport américain. L’ambassade s’est alors empressée de lui en fabriquer un, afin qu’il puisse quitter le territoire libanais. Et le jeune homme peut se vanter d’avoir battu les records d’obtention de passeport américain. Il a même prêté le serment réglementaire, à l’AIB, en présence de nombreux officiers, au cours d’une cérémonie étrange et à la limite de l’absurde. L’avion a finalement décollé à quinze heures et il n’a fallu que deux heures 45 minutes au jeune Hassoun pour devenir citoyen américain. C’est donc avec cette nationalité que le caporal Wassef Hassoun a quitté le Liban. Désormais, c’est aux autorités américaines qu’il doit rendre des comptes et raconter ce qu’il lui est réellement arrivé à Bagdad. Pour le Liban, l’honneur est sauf : le jeune homme a été libéré en Libanais et il est parti en Américain, avec des papiers en règle et dans le respect des procédures libanaises. Pour le reste, le mystère demeure entier. Scarlett HADDAD
Moins d’une semaine après son départ pour les États-Unis, Wassef Ali Hassoun continue à intriguer les milieux politiques et diplomatiques. Son enlèvement en Irak, à la fin du mois de juin, avait suscité une grande émotion au Liban et la nouvelle de sa remise en liberté a provoqué des rixes à Tripoli, causant la mort de deux personnes. Bref, d’informations contradictoires...