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Actualités - REPORTAGE

Journée mondiale dans la lutte contre le fléau Cri d’alarme de Oum el-Nour à l’intention des parents : les toxicomanes sont de plus en plus jeunes

«Vous avez plus de pouvoir que vous ne le pensez. ». La campagne antidrogue menée cette année par l’ONG Oum el-Nour, spécialisée dans la réhabilitation des toxicomanes, à l’occasion de la Journée mondiale contre la drogue (qui tombe aujourd’hui), est principalement dirigée vers les parents. Avec pour message essentiel : « informez-vous et discutez-en ». Les parents en effet ont un rôle essentiel à jouer auprès de leurs enfants, autant au niveau de la prévention que de l’accompagnement lors de la réhabilitation, constate Mona Yazigi, directrice générale de Oum el-Nour. L’association organise d’ailleurs, dans le cadre de sa campagne de prévention, des conférences de sensibilisation et d’information à l’intention des parents. La Journée mondiale contre la drogue est aussi une bonne occasion de rappeler que l’usage des substances illicites est en hausse au Liban, même si, selon les estimations, les chiffres restent moins impressionnants qu’en Europe ou aux États-Unis. Autre fait inquiétant : on commence à se droguer de plus en plus jeune. À titre d’exemple, les 14-19 ans ne constituaient que 5 % des personnes qui se présentaient à l’accueil de Oum el-Nour en 1999. En 2003, cette même tranche d’âge représente 15 %. Mais c’est les 20-24 ans qui sont champions en cette même année puisqu’ils atteignent un sommet de 35 %. Oum el-Nour interprète ces données comme une confirmation de la tendance à la baisse de l’âge de la première prise, et par conséquent celui de la dépendance. Autre chiffre éloquent : 60 % des personnes qui s’adressent à l’association ont fait leur premier essai entre 10 et 19 ans, contre 22 % entre 20 et 24 ans. Toutefois, Mme Yazigi relève un point positif dans toute cette affaire. « Si les personnes qui s’adressent à nous sont de plus en plus jeunes, cela signifie également qu’elles prennent conscience de leur problème à un âge plus précoce, constate-t-elle. Cela prouve que les campagnes de prévention portent leurs fruits et que l’entourage du toxicomane, notamment les parents, est plus averti. » Une étude effectuée en 2002 par Idrac et UNODCCP a estimé que le pourcentage d’étudiants libanais ayant consommé au moins une fois de la drogue est de 8 % (un chiffre qui s’élève à 11 % si l’on ajoute les médicaments sans prescription). Même si la proportion d’universitaires ayant touché à la drogue au Liban est de 22 %, ces chiffres pâlissent en comparaison de la situation aux États-Unis (48 %), ainsi qu’en France et en Italie (35 %). Par ailleurs, il faut préciser que 20 à 25 % de ceux-là développent généralement une dépendance à la drogue. Commentant ces chiffres, Mme Yazigi indique qu’« ils pourraient être sous-estimés » et que, de toute façon, il ne faut pas minimiser le problème qui connaît une croissance rapide. « Le discours à adopter avec les jeunes doit être finement dosé : d’un côté, clair et convaincant, et d’un autre côté, ni diabolisant, ni dramatisant, ni banalisant », dit-elle. Oum el-Nour propose un programme de réhabilitation global (et gratuit) dans ses centres, qui dure de 12 à 18 mois. Mais cette association ne travaille pas dans des cas urgents qui sont, eux, pris en charge par les hôpitaux pour une cure de désintoxication d’une dizaine de jours. Le programme de réhabilitation, quant à lui, apporte un support psychologique au toxicomane et travaille à le défaire de la dépendance psychique à la drogue. « Mais il faut, pour cela, que le toxicomane soit un minimum consentant pour que son séjour dans l’un de nos centres soit une réussite », explique Mme Yazigi. « Le problème, c’est que les places dans les hôpitaux pour les cures de désintoxication sont assez nombreuses pour répondre aux besoins, mais qu’elles sont beaucoup plus limitées pour les séjours de réhabilitation chez nous. De plus, comme nous développons de plus en plus nos méthodes pour assurer au toxicomane le maximum de chances de guérir totalement, il en découle que les patients passent plus de temps chez nous et que les listes d’attente s’allongent. » Ainsi, en 2003, Oum el-Nour n’a pu accepter que 83 dossiers de 306 demandes. Outre le manque de places, l’ONG souffre de lacunes de financement pour ce qui est des frais d’administration, que ne couvrent pas les dons en général. D’autre part, les ministères de la Santé et des Affaires sociales, avec lesquels l’association a signé des contrats et qui devraient assurer 37% de ses revenus, accusent un retard considérable dans les paiements. Malgré cela, Oum el-Nour inaugure en automne 2004 un nouveau centre d’une capacité de 15 lits. Pour ce qui est des personnes admises, Mme Yazigi affirme que 40 % d’entre eux terminent le programme et optimisent leurs chances de ne pas récidiver. Elle soutient que ce taux est l’un des meilleurs au monde dans les centres de réhabilitation (dont le taux de succès oscille entre 5 et 45 %). De ces 40 %, quelque 95 % ne connaissent pas de rechute. « Toutefois, tout chiffre doit être relativisé, dit la directrice générale de l’ONG. Même si un toxicomane fait partie des 60 % qui ne vont pas jusqu’au bout de leur séjour dans nos centres, il aura du moins pu comprendre son problème et sera à même de l’analyser en cas de rechute. C’est autant de gagné. Tout pas en avant est positif. ». S. B. Adresse et numéros Pour contacter Oum el-Nour, il est possible d’appeler au 09-210285 ou au 09-223731. L’association a un site Internet, www.oum-el-nour.com. L’adresse électronique est la suivante : oumnour@inco.com.lb. Profil du toxicomane libanais Quel est le profil du toxicomane au Liban ? Selon des informations recueillies à Oum el-Nour, la toxicomanie n’est pas un problème lié à l’ignorance et à la pauvreté, comme dans d’autres régions du monde. Les universitaires sont nettement majoritaires et les analphabètes n’ont jamais dépassé les 5 %. Ils sont, à 90 % des usagers réguliers de drogue, pour la plupart des polytoxicomanes (habitués à plus d’un genre de drogue), et surtout des héroïnomanes. 67 % d’entre eux sont célibataires. Les raisons qui poussent les jeunes à tenter l’expérience de la drogue sont multiples. Une enquête sur les raisons qui poussent les universitaires à se lancer dans cette voie, parue dans an-Nahar en février 2002, a donné les résultats suivants : 56,6 % ont évoqué la curiosité, 15,3 % la quête du plaisir, 14,7 % la pression du groupe, 6,6 % l’état d’ivresse, et 6 % le désespoir. Seules 0,7 % des personnes interrogées ont déclaré avoir consommé de la drogue à leur insu, une proportion bien faible qui montre que l’usage des stupéfiants est généralement volontaire.
«Vous avez plus de pouvoir que vous ne le pensez. ». La campagne antidrogue menée cette année par l’ONG Oum el-Nour, spécialisée dans la réhabilitation des toxicomanes, à l’occasion de la Journée mondiale contre la drogue (qui tombe aujourd’hui), est principalement dirigée vers les parents. Avec pour message essentiel : « informez-vous et discutez-en ». Les parents en...