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FÊTE DE LA MUSIQUE Braves petits soldats sous la bannière sonore

Écouter de la musique gratuitement. Voilà la grande affaire de la Fête de la musique, qui a entériné sa 23e édition en France et sa quatrième réalisation dans le centre-ville de Beyrouth. Dans l’Hexagone, la nuit du 21 juin est l’occasion d’une gigantesque liesse populaire, durant laquelle la ville est investie par ses habitants et ses visiteurs. Le lendemain, il est encore possible, moyennant, c’est vrai, l’achat d’un billet, d’écouter de la musique. Au Liban, et même dans sa capitale, c’est presque impossible. Les bars à musique de concert sont extrêmement rares et préfèrent opter pour le karaoké. C’est dire combien cette manifestation, importée de France grâce au concours de son ambassade, est capitale dans ce qu’elle révèle de la scène active locale. D’abord, il semble qu’il faille attendre à Beyrouth, et dans quelques autres gros bourgs, l’arrivée de l’été pour que la musique se réveille, comme une Belle au Bois dormant. Byblos et son festival ont gagné la course en lançant les festivités dès le début de ce mois. Vont suivre, à un train d’enfer, le festival «Dance» du plus grand disquaire de la ville, le festival «jazz» de la plus grosse société de gestion privée du pays, et cela rien que pour la capitale intra muros. Le mois prochain, dans les environs immédiats, se déroulera une nuit folle, celle d’une marque d’alcool et d’une radio locale. La grosse cavalerie, celle de Baalbeck et de Beiteddine, aura à peine pris son élan jusqu’au sprint final, fin août. Les outsiders, Tyr, Tripoli, Deir el-Qamar et Zouk Mikaël, pour ne citer que ces noms-là, honorent la musique à leur tour, prolongeant la saison de la musique jusqu’en septembre. Soit. À part la Fête de la musique et le festival «Dance» du géant de la place des Canons, le son est largement payant. Plus rien de populaire dans tout cela. Et surtout, les artistes sans maison de disques, sans mécène, sans rien du tout en fait rentrent chez eux jouer dans leur chambre, en attendant qu’un pub ou qu’une marque de café veuille bien les contacter. Mais cela est une autre histoire, la triste, celle de tous les jours. Prêche, chanson à texte et pierre d’achoppement 21 juin 2004, 18h. Dans les églises, les formations se mettent en place. Elles ne manquent pas de talent et de charisme, poussées qu’elles sont par de puissants rassemblements chrétiens. Ainsi, les Strongholds, au nom éloquent, dont les trois solistes chantent les paroles du Christ, accompagnés à la batterie, au synthétiseur ainsi qu’aux guitares sèche, électrique et basse. Ils prouvent assez qu’il n’y a rien de plus galvanisant pour les fidèles qu’un prêche en musique. Chorales d’enfants, ensembles d’étudiants et solistes classiques doués – on se souviendra des interprétations des pianistes Lynn et Simon el-Ghraichy, n’ayant pas encore atteint leurs 17 ans –, voilà pour la fin de l’après-midi. Dès 20h, la musique sort dans la rue. Et c’est à celui qui en demande le plus. La colère du rap à Gemmayzé et sur la place des Canons – où la tension est d’ailleurs passablement montée, vers 23h, avant d’être rapidement résorbée –, la douceur du jazz et du blues dans des rues chargées en restaurants et autres terrasses. Les Thermes romains, présentant l’avantage des gradins, permettent aux artistes qui s’y produisent, ayant pour caractéristique commune la tradition et la chanson à texte, de s’assurer un public fidèle et enthousiaste. Cela rappelle qu’une salle de concert en bonne et due forme manque toujours cruellement à Beyrouth. La circulation de personnes et des rythmes est intense. Chacun y va de sa préférence, de son enthousiasme pour un univers, pour un message, pour un cri de révolte aussi. Le rap à la méthode libanaise est certainement la pierre d’achoppement de ce 21 juin 2004. Celle qui a osé glisser, dans son phrasé heurté, les vrais dessous de l’affaire, celle d’un pays qui étouffe. Rassemblement, visibilité et message: sous cette belle bannière sonore, il faut applaudir les braves petits soldats de la Fête de la musique, en priant qu’ils préfèrent toujours leur guitare à un fusil. Diala GEMAYEL
Écouter de la musique gratuitement. Voilà la grande affaire de la Fête de la musique, qui a entériné sa 23e édition en France et sa quatrième réalisation dans le centre-ville de Beyrouth. Dans l’Hexagone, la nuit du 21 juin est l’occasion d’une gigantesque liesse populaire, durant laquelle la ville est investie par ses habitants et ses visiteurs. Le lendemain, il est...