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Actualités - ANALYSE

ÉCLAIRAGE - Hariri au Qatar, un prétexte pour éviter un Conseil des ministres, demain jeudi Glissement progressif de l’Exécutif et du Législatif vers l’hibernation

L’État libanais semble commencer lentement mais sûrement à multiplier les signes annonciateurs présageant de son glissement progressif sinon en hibernation du moins, allègrement, dans une période stérile de pouces tournés. À l’heure où le Liban a besoin d’un Exécutif et d’un Législatif carrément stakhanovistes pour espérer sortir de ces centaines de fossés dans lesquels il n’en finit pas d’agoniser, la politique du « comboloï » et du temps perdu ressemble bien plus à de la haute voltige qu’à de la simple inconscience. Et ce n’est pas parce que les tenants du pouvoir actuel sont intrinsèquement inaptes à la gouvernance que leurs gouvernés n’ont pas le droit de les juger. Pourquoi n’y aura-t-il pas, encore une fois, une énième fois, de Conseil des ministres demain jeudi ? Pourquoi et comment Nabih Berry, en infligeant une fin de non-recevoir aux demandes de certains députés, se permet-il de refuser aussi tranquillement de faire ce pour quoi il est payé ? Il est certes de notoriété publique que lorsque les Trente actuels se réunissent, ils sont incapables de fournir plus de 20 % de ce qui devrait être réellement fait, de ce qu’un véritable gouvernement d’entente nationale aurait été à même de réussir. Il n’empêche : ce n’est pas une raison suffisante d’occulter ces 20 %. Officiellement, il n’y aura pas de Conseil des ministres demain parce que Rafic Hariri s’est envolé aujourd’hui pour une visite de 48 heures au Qatar. Officiellement. Question : quelle urgente raison d’État a-t-elle bien pu pousser le Premier ministre à s’absenter le jour de la réunion des Trente ? Réponse : ses conflits et ses tiraillements avec le chef de l’État, qui n’en finissent pas de stériliser la (toute petite) performance de l’équipe actuelle. Les répliques du séisme de la semaine dernière continuent de secouer l’Exécutif, encore sonné par les remontrances tonitruantes d’Émile Lahoud à l’encontre de deux haririens pure souche, Samir Jisr et Fouad Siniora, accusés de tous les torts dans le dossier des enseignants et dans le projet de Sannine. Sans compter la victoire écarlate de Jean-Louis Cardahi dans l’affaire de la téléphonie mobile. Rafic Hariri n’a certes pas bronché, mais il n’en demeure pas moins que la pilule n’est vraiment pas passée. Le chef du gouvernement a-t-il voulu marquer le coup et aller, à défaut de Sardaigne, bouder au Qatar ? Ou bien le très actif Rustom Ghazalé a-t-il tenu à calmer les esprits, à tiédir les sangs, à prévenir tout clash, à donner le temps, justement, à Baabda et à Koraytem de bien relire leurs cahiers des charges ? Damas, soutiennent quelques observateurs cités par l’agence al-Markaziya, a d’ailleurs été plutôt active en fin de semaine dernière pour tenter de circonscrire les feux de la dernière séance en date de l’Exécutif. Et de couper l’air, ajoutent ces mêmes observateurs, aux rumeurs quant à un éventuel et proche changement de gouvernement. Lequel, s’il avait à démarrer en grande pompe la campagne générale de la présidentielle d’octobre, n’interviendrait qu’après le vote du budget. Au minimum. Le vote de la loi de finances 2004, supposé se dérouler fin mars-début avril, sera dans tous les cas une étape charnière. Parce que Nabih Berry ne compte en aucune manière inviter les députés à exercer leurs droits et à remplir leurs devoirs avant que ce budget ne soit bouclé. Faisant fi de la Constitution et prétextant un manque de politesse et de respect de la part des députés du Front national pour la réforme – il vise principalement son rival de toujours, Hussein Husseini –, le n° 2 de l’État, rentré la semaine dernière visiblement (très) ragaillardi de Damas, où il y a rencontré à peu près tout le monde à commencer par Bachar el-Assad, a décidé de mettre les élus du peuple au chômage technique. Le lui a-t-on demandé, pour éviter tout soubresaut indésirable ? Jusqu’au bugdet. Qui viendra rompre brièvement, comme les municipales après lui, la règle désormais d’or jusqu’à l’élection du successeur d’Émile Lahoud : l’expédition des affaires courantes. Le seul problème – mais il est de taille : ce budget est d’un creux tellement sidéral que son vote devrait se faire en deux temps, trois mouvements. Les responsables politiques se contenteront donc, d’ici à octobre, de tuer le temps en attendant que le temps, un beau jour d’automne, ne les tue – politiquement. À moins, bien entendu, d’une petite bombinette, tout aussi politique, en provenance des rives du Barada et qui viendrait, avant cette échéance tant attendue et tant redoutée à la fois, changer provisoirement toutes les donnes. Ziyad MAKHOUL

L’État libanais semble commencer lentement mais sûrement à multiplier les signes annonciateurs présageant de son glissement progressif sinon en hibernation du moins, allègrement, dans une période stérile de pouces tournés. À l’heure où le Liban a besoin d’un Exécutif et d’un Législatif carrément stakhanovistes pour espérer sortir de ces centaines de fossés dans...