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Une fête entre consommation et superstition

Tradition et modernité se croisent dans la manière dont les Chinois célèbrent le Nouvel An lunaire : les croyances populaires reviennent en force, mais cette fête familiale est aussi pour ceux qui en ont les moyens une occasion de consommer ou de faire du tourisme. « Si je passe 15 jours à la maison, je vais m’ennuyer à mourir », déclare Sha Qingquan, assistante de rédaction âgée de 24 ans dans un journal de Shanghai. Avec 1 200 dollars de prime en poche pour le Nouvel An lunaire, elle va rejoindre quelques jours ses parents à Xian (Nord), et va ensuite partir en voyage à Lijiang, dans les montagnes du Yunnan (Sud-Ouest). « J’aimerais que mes parents viennent avec moi, mais je ne pense pas qu’ils aient envie de passer leur temps dans des bars. C’est pourquoi j’ai décidé d’y aller seule », ajoute Sha. Mercredi soir, la grande majorité des Chinois resteront chez eux, et beaucoup regarderont la soirée spéciale du réveillon à la télévision nationale, avec ses stars, ses chanteurs de charme et ses saynètes comiques. Toutefois, dans les grandes métropoles, ceux qui en ont les moyens choisissent de plus en plus souvent de sortir dîner en ville. « Qui veut encore se fatiguer à préparer le repas du réveillon et faire ensuite la vaisselle ? » lance Tang Zhengyi, directeur du restaurant Lubolang à Shanghai, où les tables pour le 21 janvier au soir, à 1 288 ou 1 888 yuans (155 à 230 dollars), sont toutes réservées depuis six mois. Les magasins s’attendent également à ce que les citadins profitent d’une semaine de vacances pour faire des emplettes. « Je n’arrive pas à expliquer pourquoi, mais mon envie de faire du shopping augmente à mesure que le Nouvel An approche », constate Sha. Les changements induits par la société de consommation s’accompagnent d’un retour des croyances populaires. Les temples de bouddhistes ou taoïstes s’attendent à une forte affluence. Au temple du Nuage Blanc à Pékin, les visiteurs devront payer 10 yuans (1,2 dollar) pour frotter pendant dix secondes un petit singe en pierre porte-bonheur. Les temples vendent aussi des horoscopes permettant aux natifs des douze signes du zodiaque chinois de savoir ce qui les attend durant l’année du Singe. Pour ceux qui sont nés sous ce signe turbulent, la tradition conseille le port d’une ceinture rouge, qui éloigne les influences néfastes. Ces ceintures sont en vente partout. Les pétards, prisés eux aussi parce qu’ils chassent les mauvais esprits, font l’objet d’une interdiction dans la plupart des grandes villes, pour des questions de sécurité. Aussi les Pékinois, de plus en plus motorisés, n’hésitent pas à se rendre à la campagne pour pouvoir en faire sauter. Lu Shengzhong, un spécialiste des arts et traditions populaires, demande cette semaine la levée de cette interdiction dans les colonnes de l’hebdomadaire Sanlian Shenghuo. « Faire sauter des pétards incarne l’aspiration à une vie meilleure. Leur bruit, leur éclat et leur odeur procurent un sentiment d’union et de félicité », explique-t-il. D’une manière générale, Lu constate une perte des nombreuses traditions locales. Mais dans la région d’Anshun de la province pauvre du Guizhou (Sud-Ouest), les spectacles de théâtre masqué, joués dans les rues, se multiplient parce qu’ils sont devenus une manne touristique et une importante source de revenu pour les paysans.

Tradition et modernité se croisent dans la manière dont les Chinois célèbrent le Nouvel An lunaire : les croyances populaires reviennent en force, mais cette fête familiale est aussi pour ceux qui en ont les moyens une occasion de consommer ou de faire du tourisme.
« Si je passe 15 jours à la maison, je vais m’ennuyer à mourir », déclare Sha Qingquan, assistante de rédaction...