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Actualités - OPINION

Le mythe d’un président-sauveur a prouvé son inanité

« Un changement est requis à tous les niveaux, qu’il s’agisse des méthodes d’action ou des personnes. » Cette phrase de Tammam Salam à Bkerké a retenu l’attention des milieux politiques et parlementaires, qui se sont interrogés sur la possibilité d’un tel changement de méthodes, si les conditions anormales dans lesquelles vit le Liban ne changent pas. Selon ces milieux, les conditions dans lesquelles la classe politique actuelle gouverne rendent absolument impossible un changement de méthode. Bien plus, selon le principe qui veut que les mêmes causes produisent les mêmes effets, ces méthodes de gouvernement, même avec la meilleure volonté du monde, s’imposeront à quiconque voudrait les modifier, à supposer que, par un heureux hasard, un homme mû par une sérieuse volonté de changement accédait au pouvoir... Pour les milieux parlementaires et politiques cités, ce principe s’applique en particulier à la personne du chef de l’État. L’échéance présidentielle peut bien représenter, pour certaines parties au Liban et à l’étranger, une bouffée d’oxygène, et des espoirs de changement peuvent bien être placés dans la personne du nouveau président, il n’en restera pas moins que ce dernier ne pourra pas imprimer au pays l’élan réformateur dont il a tant besoin si les conditions d’exercice du pouvoir politique ne changent pas. Et pour commencer, ce président ne pourra obtenir la formation du gouvernement auquel il aspire et qui pourrait inspirer confiance à la population ; il ne pourra organiser des élections législatives sur des bases équitables qui aboutiraient à une Chambre véritablement représentative. Pour mieux saisir cette vérité, il est utile de rappeler le précédent Raymond Eddé. Quand ce dernier avait été sollicité pour faire acte de candidature à la présidence de la République, il avait réclamé au préalable le retrait des forces israéliennes et syriennes du Liban. Faute d’être réaliste, Raymond Eddé faisait ainsi preuve de lucidité. Le maintien des troupes israéliennes et syriennes sur le sol national déterminait les modalités d’une vie politique dont nulle vertu présidentielle ne pouvait se dégager ou venir à bout. « Je ne suis pas prêt à être un mohafez ou un fonctionnaire chez d’autres. Si je ne peux être un président libre de ses décisions, il n’y a aucun sens à être président », avait déclaré en substance le Amid du Bloc national. De fait, le mythe d’un président-sauveur a prouvé son inanité. Aucun des présidents de la République qui se sont succédé depuis trois décennies n’est réellement parvenu à gouverner le Liban selon sa conscience et en toute liberté, encore moins à voir naître le gouvernement auquel il aspirait, à favoriser l’émergence d’une Chambre représentative et responsable devant les électeurs, à protéger le pouvoir judiciaire des ingérences politiques, à réformer l’Administration, à lutter contre la corruption. (Ni à empêcher la dette publique d’atteindre des montants astronomiques jamais vus au Liban...). Bien au contraire, ces présidents ont dû s’accommoder de la situation anormale qui prévalait dans le pays, pratiquer la politique du possible, accepter des gouvernements boiteux et des Parlements girouettes. Des Parlements dont les députés étaient élus grâce à des listes imposées par ruse ou par force, et qui répondaient de leurs actes à leurs tuteurs politiques et non aux électeurs. Voilà pourquoi, concluent les milieux politiques et parlementaires cités, il est vain d’espérer un changement avec l’arrivée au pouvoir de nouvelles figures. Ce sont les conditions anormales qui prévalent au Liban qu’il faut changer, si le vœu de Tammam Salam, exprimé à la porte de Bkerké, doit réellement se réaliser. Il est vain de garder les yeux rivés sur l’échéance présidentielle, en espérant un miracle, alors que la solution réside dans un Liban débarrassé de toutes les tutelles, souverain, indépendant et libre. Émile KHOURY
« Un changement est requis à tous les niveaux, qu’il s’agisse des méthodes d’action ou des personnes. » Cette phrase de Tammam Salam à Bkerké a retenu l’attention des milieux politiques et parlementaires, qui se sont interrogés sur la possibilité d’un tel changement de méthodes, si les conditions anormales dans lesquelles vit le Liban ne changent pas.
Selon ces...