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« Un véritable scandale », dénonce Michel Eddé

Ministre de la Culture et de l’Enseignement supérieur d’octobre 1992 à mai 1995, puis de mai 1995 à novembre 1996 (c’est sous son mandat que le décret des normes et critères d’ouverture et de fonctionnement des établissements a été adopté), Michel Eddé porte un jugement très sévère sur ce qu’est devenu l’enseignement supérieur au Liban après la prolifération d’établissements qu’il qualifie d’« officines ». «Le Liban ne peut absorber 41 universités et instituts, c’est un scandale », s’indigne-t-il. « Avec sept ou huit universités privées et l’université publique, l’enseignement supérieur était largement assuré aux étudiants libanais, arabes et étrangers, puisque le Liban a une vocation universitaire internationale. » Selon lui, « on a délivré autant de permis en si peu de temps parce qu’on a ignoré les lois et réglementations en vigueur ». L’irruption de plus de quarante établissements a donc, selon lui, déstabilisé le secteur universitaire. « Déjà un certain nombre des universités précédemment établies fabriquaient des chômeurs, parce que l’enseignement qui y était dispensé n’était souvent pas conforme à la demande du marché du travail », estime M. Eddé. « Le nombre d’étudiants dans les disciplines littéraires et les sciences humaines était anormalement gonflé, alors que les marchés libanais et arabes ne pouvaient assurer de débouchés à ces étudiants. Le droit, la médecine et le génie, par exemple, sont sursaturés. » « D’autre part, poursuit-il, le niveau de certaines universités déjà établies laissait à désirer et, dans certaines facultés ou sections, le niveau était franchement mauvais. Ce qui a aggravé encore la situation des futurs diplômés, leur interdisant l’accès au marché du travail. En effet, le diplôme proprement dit n’est plus pris en considération. Ce qui importe, c’est l’entretien auquel sont soumis les candidats quand ils postulent pour un poste, quel qu’il soit. Durant cet entretien, les connaissances générales du postulant, sa personnalité, sa formation et sa connaissance des langues sont des facteurs déterminants. Désormais, le trilinguisme est devenu pratiquement indispensable. » Qu’en est-il, donc, de l’invasion des nouvelles universités ? « Tout d’abord, il est regrettable de constater que la très grande majorité d’entre elles ne remplissent pas les conditions requises pour une véritable université », souligne M. Eddé. « Les espaces verts et les bâtiments généraux sont pratiquement absents. Ces soi-disant universités n’occupent que quelques étages où sont entassés les étudiants, sans bibliothèque et sans laboratoires. » De fait, « l’immense majorité des diplômés de ces officines ne remplissent pas les critères nécessaires, ce qui les amène à être rejetés, puis à devenir aigris, contribuant ainsi au désespoir de leurs parents ». Interrogé sur son mandat, il précise n’avoir pas délivré de permis avant que les textes normatifs et réglementaires n’aient été élaborés, malgré les « pressions politiques ». « Nous avons refusé de délivrer des permis lorsque les demandes ne s’appuyaient pas sur un dossier conforme aux conditions, normes et critères prévus par les lois et les décrets », dit-il, précisant que la seule nouvelle université autorisée avant son départ du ministère était l’Université islamique, tous les autres permis ayant eu pour objet de régulariser la situation de facultés créées au sein d’établissements existants. Selon lui, la solution au problème ne devrait pas passer par l’adoption de nouveaux textes, mais par l’application des lois existantes. Pour arrêter le « naufrage » de l’enseignement supérieur au Liban, il préconise qu’aucun nouveau permis ne soit délivré par le gouvernement, qu’un suivi du fonctionnement de toutes les universités existantes soit instauré, pour s’assurer de leur conformité aux normes et aux critères, et que des mesures soient prises à l’encontre de tous les établissements qui commettent des irrégularités.Prochain article : Abus et écueils à éviter
Ministre de la Culture et de l’Enseignement supérieur d’octobre 1992 à mai 1995, puis de mai 1995 à novembre 1996 (c’est sous son mandat que le décret des normes et critères d’ouverture et de fonctionnement des établissements a été adopté), Michel Eddé porte un jugement très sévère sur ce qu’est devenu l’enseignement supérieur au Liban après la prolifération...