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La crise constitutionnelle bat son plein

Le feuilleton devient un peu lassant. Puisque l’affaire NTV et ses conséquences – notamment les scènes de ménage qu’elle a générées entre les gens du pouvoir – continuent de rythmer la scène locale. Et de contaminer une très grande partie du quotidien politique libanais. Et ce malgré les nombreuses tentatives de rabibochage et autres volontés de sortir les responsables – les deux pôles de l’Exécutif surtout – de l’œil du cyclone NTV. Parce que tout continue d’aller mal entre Baabda et Koraytem et qu’aucun accord ne s’est fait concernant l’ordre du jour (qui n’a pas été distribué), il n’y aura probablement pas de Conseil des ministres demain jeudi. Nonobstant la dernière séance du Conseil des ministres, qui s’est tenue pour jeter aux yeux du monde la poudre du tout-va-bien-madame-la-marquise et pour jurer que les deux dirigeants ont digéré l’affaire NTV (on a même évité d’évoquer tous les sujets passibles de fâcher : tête-à-tête Lahoud-Hariri ; projet de loi de fusion des banques ; CDR ; nominations diplomatiques). Selon des sources bien informées, le Premier ministre voulait que dans cet ordre du jour figure tout ce qui a été écarté la semaine dernière. Il estime que ce sont des points vitaux (idem pour le projet d’entretien des routes sur une période de dix ans et pour un montant d’un milliard de dollars). Sauf que le chef de l’État ne voit pas la nécessité de représenter ces dossiers aux Trente avant qu’ils ne soient examinés et amendés selon les remarques faites par les différents ministres. Et pourtant... L’on s’attendait à ce que le coup de fil d’Émile Lahoud à Rafic Hariri après la lithotritie de ce dernier (il voulait s’enquérir de sa bonne santé) soit suivi d’une visite du Premier ministre à Baabda. Laquelle aurait brisé la glace entre eux. Sauf que ce scénario n’a pas eu lieu. Il n’empêche : les contacts se poursuivent – et Damas y participe – pour faire en sorte de réduire les tensions, afin que les deux cœurs puissent se laver de nouveau, et que l’on retrouve la productivité pré-NTV au niveau de la gestion du pays. Le vrai problème, au-delà de l’affaire de la télévision antiharirienne, ce sont les prérogatives des uns et des autres. Notamment celles du Premier ministre, son rôle et le point de savoir s’il est habilité à rédiger l’ordre du jour du Conseil des ministres, puis à simplement en informer le chef de l’État, ou s’il est censé le faire en accord avec le n° 1 de l’État. Sachant que l’article 64 de la Constitution (loi constitutionnelle du 21 septembre 1990) stipule que le chef du gouvernement « convoque le Conseil des ministres à se réunir et prépare son ordre du jour. Il informe à l’avance le président de la République des questions à l’ordre du jour et des affaires inopinément surgies et sujettes à délibération ». Comprendre par là que la Constitution n’implique pas la nécessité d’un accord entre les nos 1 et 3 de l’État sur le contenu de cet ordre du jour. Voilà pourquoi est née, de tout cela, une crise politico-constitutionnelle, alimentée notamment par l’attachement du Premier ministre à user de ses prérogatives constitutionnelles, surtout qu’il exhorte tout le monde à appliquer les lois et à respecter les institutions. Il ne reviendra donc pas sur sa position, d’autant plus que certains hommes politiques (parmi lesquels ses anciens alliés) l’ont critiqué, arguant que le lavage des cœurs a vite fait d’anéantir l’institution (notamment le Conseil des ministres). En un mot comme en cent : Rafic Hariri veut user, jusqu’au bout, de ses prérogatives. Quoi qu’il en soit, certains responsables politiques estiment qu’il y a quelque chose de caché derrière la brouille des deux pôles de l’Exécutif. Quelque chose de secret. On parle de l’échéance présidentielle de 2004 et de l’absence de tout consensus entre les responsables. Sinon, qu’est-ce qui expliquerait que cette brouille ait pris ces proportions et dure autant ? Parallèlement à tout cela, il y a les pressions exercées sur le gouvernement par le biais de la rue et des revendications populaires. On dit que tout cela est utilisé par certaines parties en conflit. De source gouvernementale, on s’étonne d’ailleurs de voir la CGTL – et tous ceux qui l’appuient – persister et signer (en ce qui concerne l’appel à la manifestation), alors que le budget 2003 a été radicalement amendé en commission (et les taxes et autres impôts ayant suscité l’ire des syndicats annulés). Des observateurs politiques reconnaissent que certaines factions essaient de soulever la rue contre le Premier ministre. Sauf que, dans tout ce noir, certains voient une petite lueur d’espoir. Que les choses pourraient reprendre leur cours naturel. Grâce à la séance exceptionnelle du Conseil des ministres (qui ne requiert, celle-là, aucun ordre du jour), censée se tenir avant le débat budgétaire à la Chambre et qui permettra aux ministres de prendre des notes des amendements apportés au projet de loi par les députés en commission. Cette séance exceptionnelle, qui sera initiée par le chef de l’État, pourrait, dit-on en coulisses, permettre de réchauffer les relations entre les gens du pouvoir. Philippe ABI-AKL
Le feuilleton devient un peu lassant. Puisque l’affaire NTV et ses conséquences – notamment les scènes de ménage qu’elle a générées entre les gens du pouvoir – continuent de rythmer la scène locale. Et de contaminer une très grande partie du quotidien politique libanais. Et ce malgré les nombreuses tentatives de rabibochage et autres volontés de sortir les...