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Actualités - INTERVIEWS

"C'est en chef de milice que Nabih Berry se comprte aujourd'hui", déclare le député de Jezzine Nadim Salem propose à Nassib Lahoud la création du Liban pour tous(photo)

Nadim Salem a la stature, le regard et la diction d’un homme qui sait. Qui sait ce qu’il veut. Qui sait ce qu’il a à dire et ce qu’il a à faire. La langue de bois, il ne sait pas trop ce que ça veut dire, le candidat grec-catholique de Jezzine. Un homme convaincu et convaincant. Et courageux. Il le sait bien, Nadim Salem, qu’il ne peut pas changer le découpage électoral «aberrant» de l’an 2000. Il l’a combattue, la loi électorale – au début ils étaient 20 députés à le faire, et elle a été votée. «Nous sommes en démocratie, nous avons donc accepté le vote de la majorité mais n’étant pas convaincus, nous avons déposé un recours au Conseil constitutionnel». Sauf que plus aucun député ne les a soutenus, Nadim Salem, Nassib Lahoud et Najah Wakim, dans leur combat. Alors quelles sont ses armes aujourd’hui, sachant que le divorce avec son allié de 1996, le président de la Chambre Nabih Berry, est définitivement consommé ? «Je me présente individuellement, et je m’en remets aux électeurs. En leur demandant de voter massivement, quel que soit leur choix. C’est à eux de décider par quel genre de personnes ils souhaitent être représentés». Et ça n’a rien donné au niveau des alliances éventuelles avec Kamel el-Assaad ou Habib Sadek ? «J’ai essayé de rapprocher les points de vue de tous les opposants à la coalition Berry-Hezbollah. Le compromis a été malheureusement impossible». Encore une histoire de fantômes ? «Peut-être... L’entente claire entre MM. Assaad et Sadek n’a pas pu être réalisée, il y aura juste une complémentarité entre leurs deux listes». M. Salem n’ayant pu ni réunifier ni rapprocher, il a préféré se présenter seul, avec des accords, «si possible», avec les deux hommes. Et si jamais Nabih Berry lui tend, aujourd’hui, la main ? «Il ne la tendra pas. Et quand bien même, je ne la prendrai pas». Au moins c’est clair, net et sans ambages. «Au départ, M. Berry et moi étions partenaires, et c’étaient le respect mutuel et la liberté d’opinion qui prévalaient. C’était l’époque où le président Berry, de chef de milice, allait vers le statut d’homme politique». Le divorce entre le député et son chef de file date de 1998, c’étaient les affaires de Jezzine, les réunions de Mar-Roukoz, M. Salem et d’autres voulaient bouger pour Jezzine, pour sa population, amener l’État à assumer ses responsabilités. «Et ça, M. Berry n’a pas supporté». Pourquoi ? Orgueil ? «C’est l’orgueil, et la politique d’un chef de milice, chassez le naturel, il revient au galop. Et moi, même si c’est contre mes intérêts personnels, je ne peux pas souscrire à ce qui va à l’encontre des intérêts de ma région, du Sud, ceux du Liban». Et Nadim Salem d’insister, personne pour l’instant ne l’a convaincu qu’il était sur le mauvais chemin, «je suis un homme comme les autres, je fais des gaffes, comme tout le monde, d’ailleurs je suis de plus en plus convaincu lorsque je vois l’appui populaire qui se manifeste à mon égard, dans tout le Sud, et toutes les confessions». Deux mots sur ce «néoféodalisme» dont il parlait récemment. «Ce que Nabih Berry fait, c’est utiliser l’État et toutes ses institutions à des fins personnelles et électorales». L’impartialité du chef de l’État Comment il explique la position du chef de l’État qui refuse de s’impliquer de quelque façon que ce soit dans le processus électoral ? «J’estime que le général Lahoud doit changer ce discours. Je ne conçois pas qu’un président de la République n’intervienne pas lorsque les services de l’État sont utilisés à des fins personnelles. C’est très grave pour le Liban». Il a des contacts avec Samir Azar ou Sleiman Kanaan, les candidats chrétiens, présents sur la liste Berry-Hezbollah ? «Aucun». Quelque chose à répondre aux dernières déclarations de M. Azar qui lui reprochait d’avoir été «pendant huit ans un passager des élections-autobus» ? «Je ne réponds pas à M. Azar, je réponds à son patron». Et s’il était en face de lui, maintenant, M. Berry, que lui dirait-il ? «On se revoit après les élections». Sans commentaire... Et c’est quoi exactement cette histoire de «mains invisibles qui veulent me couler» dont il a parlé ? «Personne ne peut être coulé. Et ces mains invisibles, ce sont les services de l’État qui se mêlent d’élections et de politique locale. Leur rôle, c’est de s’occuper de la sécurité du pays et de tous les citoyens, et non pas d’espionner les candidats et les électeurs. Qu’ils laissent donc le peuple s’exprimer». Et la Syrie ? Décide-t-elle toujours de tout ? «Par rapport aux élections, je ne sais pas si l’intérêt de la Syrie est de s’immiscer dans la petite politique libanaise. Mon conseil aux Syriens est de ne pas entrer dans ce genre de conflits». Optimiste Nadim Salem ? «La bataille est très difficile, mais pas impossible». Et s’il n’est pas élu, continuera-t-il ? «Sûrement. On a autant d’impact – sinon plus, en dehors du Parlement qu’à l’intérieur». Et la représentativité du Parlement, il y croit ? «Si ça continue comme ça, comme on l’entend, comme on le voit, comme on le lit, et si l’État continue à se mêler des élections, certainement que non. En fait, je crois que nous sommes une démocratie de nom». Et la notion d’opposition ? «Elles est indispensable dans n’importe quelle démocratie, partout». En ce qui le concerne aujourd’hui, c’est pour ne pas noyer les chrétiens du Liban-Sud ? «C’est un fait, mais ce n’est absolument pas ma priorité, moi je suis ouvert à tous. Il y a un rouleau compresseur qui essaie de s’approprier la volonté des Sudistes et ceux qui n’essaient pas de lui barrer la route trahissent le Sud et trahissent le Liban». Elle durera, l’alliance Amal-Hezbollah ? «Je ne sais pas. Parce que c’est une alliance au sommet et pas à la base». « Le Liban pour tous » Qui sera, à son avis, le futur Premier ministre ? «Je voterai Hariri. En espérant qu’il sache profiter de ses erreurs du passé». On n’a pas besoin de sang neuf ? «Si. En deuxième choix, j’opterais pour Négib Mikati». Et les derniers revirements de Walid Joumblatt ? «Je crois que nous sommes, maintenant, en face du vrai visage de M. Joumblatt, un homme ouvert, en train de penser et de planifier dans l’intérêt du Liban». Le parallélisme Nadim Salem-Nassib Lahoud ? Ils ont le même combat, maintenant, l’un au Metn, contre Michel Murr, l’autre au Sud, contre Nabih Berry. «Oui. Sauf qu’au Sud, il y a 600 000 électeurs et toutes les confessions». Mais ils ne sont vraiment pas légion, ceux qui bataillent comme eux... «Il faut bien commencer quelque part. Je voudrais, après les élections et indépendamment des résultats, que Nassib Lahoud crée un mouvement, auquel j’adhèrerai immédiatement, un mouvement qui aille dans le sens de nos aspirations communes : la démocratie, la liberté, la liberté d’expression, le Liban économiquement libre. Et donner aux jeunes un État, qu’ils cessent d’aller mendier des visas aux ambassades. Nous pourrions l’appeler “Liban pour tous”, un mouvement ouvert à toutes les confessions, toutes les tranches d’âge. Pouvoir orienter la future nouvelle loi électorale dans le sens des partis. Celui de la démocratie». Enfin...
Nadim Salem a la stature, le regard et la diction d’un homme qui sait. Qui sait ce qu’il veut. Qui sait ce qu’il a à dire et ce qu’il a à faire. La langue de bois, il ne sait pas trop ce que ça veut dire, le candidat grec-catholique de Jezzine. Un homme convaincu et convaincant. Et courageux. Il le sait bien, Nadim Salem, qu’il ne peut pas changer le découpage électoral...