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Actualités - ANALYSE

Vie politique - Le Bloc national appelé à déterminer son devenir Multiples objectifs pour le nouveau Amid

L’hommage que l’on doit au Amid Raymond Eddé implique par lui-même qu’on s’interroge sur les effets que son absence peut produire sur la scène politique locale, notamment dans la perspective des prochaines élections législatives. Et, par voie de conséquence, qu’on se demande ce que son parti, le Bloc national, va devenir sans lui. Raymond Eddé avait succédé à son père à la tête du BN dans des conditions politiques difficiles. La lutte entre le camp d’Émile Eddé et celui de Béchara el-Khoury, alors président de la République, était à son paroxysme. Le pays avait connu deux ans auparavant la célèbre mascarade électorale du 25 mai, restée dans son histoire comme un stigmate de fraude généralisée. La Chambre ainsi parachutée avait voté sans encombre le renouvellement du mandat de Béchara el-Khoury. Une reconduction que dès son accession à la direction du BN Raymond Eddé avait dénoncée comme illégale puisque décidée par une Assemblée illégitime. Le Amid s’était alors imposé comme l’une des figures de proue de la coalition qui en 1952 devait dégommer le régime, sans effusion de sang. Au fil des décennies, malgré la guerre, malgré son propre éloignement et malgré quelques convulsions internes conduisant à la radiation de certains cadres, Raymond Eddé avait réussi à maintenir le Bloc national à flot. Il avait gardé un même cap, en se fondant sur des principes intangibles. Et c’est d’ailleurs pour ne pas trahir ces constantes qu’il avait dû, à l’occasion, sacrifier de vieux compagnons de route dont les orientations divergeaient des siennes. Il était soucieux de bonne discipline et d’ordre interne. N’admettant aucun dérapage, il préférait une formation aux effectifs réduits, mais bien soudés, à un parti pléthorique mais brouillon. Son successeur, Carlos Pierre Eddé, qui affronte des conditions politiques délicates, et qui est nouveau venu en politique, a-t-il quelque chance de réussir ? Sans vouloir être familier, on peut tout d’abord souligner à son avantage qu’en principe, il a de qui tenir. Son père, Pierre Eddé, après sa brillante victoire électorale sur Pierre Gemayel à Baabda dans les années cinquante, avait prononcé au Parlement un discours d’anthologie, s’imposant d’entrée de jeu comme une personnalité de premier plan. Il avait ensuite, comme on sait, assumé avec compétence et avec brio le portefeuille ardu des Finances, donnant à ce pays une prospérité que seule la guerre devait détruire. Il était devenu un recours auquel on faisait automatiquement appel pour redresser la barre en temps de crise. Nul besoin de le rappeler : Raymond et Pierre Eddé étaient cités partout comme des parangons de vertu civique, républicaine, démocratique, des modèles de probité et d’intégrité morale. Ils plaçaient au-dessus de tout l’intérêt de la patrie. Leur lucidité n’était jamais prise en défaut. C’est donc un héritage précieux qu’ils laissent à Carlos Eddé. Il en aura besoin pour répondre aux défis qui se posent à lui. Et qui se résument dans les interrogations suivantes : – Pourra-t-il réunifier la base du Bloc national, en réintégrant les cadres qui ont été remerciés ou qui sont partis ? Estimera-t-il que cette récupération n’est pas possible car elle serait un désaveu des décisions prises par le Amid Raymond Eddé ? – Voudra-t-il annuler, en ce qui concerne les élections, une décision de boycott que justifient les présences étrangères qui empêchent l’organisation d’un scrutin régulier ? Jugera-t-il que le moment est venu d’entrer en lice, non seulement en permettant aux militants de voter mais aussi en présentant des candidats et en contractant des alliances avec les formations politiques de même sensibilité ? S’il décide de maintenir les directives de boycott, comment cela serait accueilli par les militants et surtout par les candidats potentiels, maintenant que l’autorité et le charisme d’un leader de stature historique ne s’exercent plus sur eux ? Le fait est que, comme presque tous les autres partis locaux, le BN a beaucoup perdu de son emprise populaire durant la guerre. Un simple coup d’œil sur la scène politique locale permet de constater que les formations traditionnelles n’y jouent plus un grand rôle. Avec la paix, les partis tentent cependant d’opérer un redressement. Le Parti syrien national social, ex-PPS, par exemple a réussi à réunifier ses rangs. Les Kataëb tentent avec obstination de se ressouder et il en va de même pour les communistes. Mais seules les formations de l’Ouest très proches des décideurs, comme le Baas, Amal, le PSP ou le Hezbollah, présentent à ce jour un organigramme vraiment sain et une solide unité des rangs. Cela n’est pas suffisant, tant s’en faut, pour que l’on se prenne à rêver d’un régime des partis.
L’hommage que l’on doit au Amid Raymond Eddé implique par lui-même qu’on s’interroge sur les effets que son absence peut produire sur la scène politique locale, notamment dans la perspective des prochaines élections législatives. Et, par voie de conséquence, qu’on se demande ce que son parti, le Bloc national, va devenir sans lui. Raymond Eddé avait succédé à son...