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Actualités - ANALYSE

Institutions - Le fonctionnement de l'Etat reste capricieux Une révision technique de la Constitution plus nécessaire que jamais

La Constitution issue de Taëf est un véritable gruyère truffé de trous, c’est-à-dire de lacunes. Le pays, confronté à un défaut de réglementation, a de la sorte connu mainte crise institutionnelle. On peut citer, entre autres exemples, le blocage survenu une fois sous le précédent régime du fait que le chef de l’État et le président du Conseil désigné n’arrivaient pas à s’entendre sur la formation d’un nouveau Cabinet. La Constitution n’a pas prévu ce cas, pourtant élémentaire. Et l’on voit de nouveau, avec l’exemple que donne M. Sélim Hoss en refusant de contresigner un décret présidentiel, qu’un chef de gouvernement peut bloquer quand bon lui semble le fonctionnement de l’État de droit. Aussi la plupart des juristes spécialisés et des hommes politiques avertis de tous bords redisent aujourd’hui qu’il est tout à fait nécessaire de corriger les failles multiples que présente la Constitution issue de Taëf. Pour ce qui est du cas occurrent, les cercles politiques concernés pensent en général que le président du Conseil aurait pu assez facilement s’éviter le tracas d’une secousse inopportune et s’épargner les critiques. Soit en déléguant explicitement son paraphe au vice-président du Conseil, ou à un autre ministre, pour qu’il signe à sa place tout décret dont lui-même ne serait pas convaincu. Soit en présentant un projet de loi urgent abolissant la peine capitale. Ou encore en faisant modifier la Constitution pour qu’il y soit précisé qu’un décret non contresigné dans les 15 jours devient automatiquement exécutoire. Une autre suggestion veut que l’intéressé puisse lier sa signature à l’avis de la majorité des membres du Cabinet. Mais ce sont là, comme on voit, des propositions politiques ponctuelles, limitées au cas d’actualité. Les juristes pour leur part ont plutôt tendance à considérer le problème sous son angle global. Ils soulignent en chœur que l’intérêt national commande de toute évidence qu’on révise les dispositions de la Constitution qui suscitent de la confusion, des déséquilibres ou des malentendus entre les pouvoirs. Pour eux, il est illogique qu’en l’absence du président du Conseil, nul, pas même le chef de l’État qui en préside pourtant les travaux, ne puisse convoquer le Conseil des ministres sauf avec l’accord précis du chef du gouvernement. Ainsi, s’il y a absence prolongée ou conflit entre les deux têtes de l’Exécutif, ce dernier se trouverait paralysé, même s’il y avait un problème majeur à traiter. Une autre faille connue : un président du Conseil désigné n’est tenu par aucun délai pour former son équipe et l’Assemblée nationale ne peut lui retirer son assentiment, même s’il devait laisser traîner les choses pendant des années. Dans le même cadre, et comme le conflit Hraoui-Hariri susmentionné l’avait prouvé, le pays peut se retrouver indéfiniment sans direction si le chef de l’État et le président du Conseil désigné ne parviennent pas à s’entendre sur la composition du nouveau Cabinet, pour la bonne raison que la Constitution ne dit pas ce que l’on peut faire dans ce cas. La solution, estiment certains, peut être que le président du Conseil désigné forme son équipe sous son entière responsabilité, l’Assemblée nationale décidant alors si elle veut ou non lui accorder sa confiance. On sait aussi, car M. Hraoui en avait fait un cheval de bataille, que par un étonnant contresens constitutionnel, seul le chef de l’État est tenu de respecter des délais déterminés pour signer les lois, faute de quoi elles deviennent automatiquement exécutoires, le président du Conseil et les ministres concernés en étant pour leur part pratiquement exemptés, dans ce sens que la Constitution ne précise pas ce qu’il faut faire s’ils s’abstiennent de respecter l’obligation de contreseing. C’est d’ailleurs ce que M. Hoss vient de faire. De son côté, faute de dispositions constitutionnelles adéquates, le président de la Chambre peut se jouer comme il veut des projets de loi revêtus du caractère d’urgence que le gouvernement adresse au Parlement. Les textes ne précisent pas bien en effet quand le délai de quarante jours imparti à l’Assemblée commence à courir, si c’est au moment de la réception ou de l’inscription à l’ordre du jour. Comme le relève le juriste Émile Bejjani, en laissant les textes soumis à l’interprétation par manque de clarté, on peut craindre que ce ne soit l’avis de la partie la plus forte qui prévale. L’équilibre de la balance, ainsi que le note de son côté M. Fouad Boutros, les pressions comme le contrôle sont pour le moment assurés par des forces extérieures au système institutionnel. En cas de grippage, le risque de crise de pouvoir serait immense. Le président Hraoui avait proposé l’amendement des articles 55,57, 58, 65 et 77 de la Constitution. Mais on avait estimé que les circonstances ne permettaient pas une telle révision. Les choses ont-elles changé aujourd’hui ?
La Constitution issue de Taëf est un véritable gruyère truffé de trous, c’est-à-dire de lacunes. Le pays, confronté à un défaut de réglementation, a de la sorte connu mainte crise institutionnelle. On peut citer, entre autres exemples, le blocage survenu une fois sous le précédent régime du fait que le chef de l’État et le président du Conseil désigné n’arrivaient...