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Actualités - REPORTAGES

Couverture de santé, l’action insuffisante de l’État

La protection sociale, ses choix, son organisation, sa gestion, son financement et ses effets considérables sur le plan social, économique, démographique et humain, sont aujourd’hui au centre des principaux débats des sociétés modernes. Le Liban n’éechappe pas à ces controverses, d’autant plus que la longue crise politico-économique des années 1975-1990 a profondément affecté les structures sociales, d’une part, et leurs systèmes d’organisation, d’autre part. Les projets de reconstruction et de réhabilitation alimentent encore plus les polémiques qu’ils ne les calment, souligne Roger Melki, conseiller auprès de l’ECE (Études et consultations économiques). La protection sociale au Liban a évolué d’une manière très heurtée depuis l’indépendance du pays dans les années 40. Marquée par les options libérales de l’économie et par les difficultés politiques et administratives des dernières années, la protection sociale au Liban ne peut être classée dans aucune des catégories modernes des concepts globaux de la protection sociale. Deux formes de protections sociales sont assurées aujourd’hui. L’une est institutionnelle, réservée principalement aux salariés pour une partie de leurs besoins sociaux, l’autre informelle et revêt essentiellement un caractère d’assistance, souple et précaire. Ces deux formes s’appuient sur plusieurs piliers. Les uns sont publics d’autres sont privés, et à l’intérieur de chaque catégorie plusieurs distinctions peuvent être effectuées. Ainsi pour les couvertures institutionnalisées, l’État est très présent à côté d’organismes impliquant le secteur privé. L’action publique n’est pas concentrée deans une seule institution et plusieurs formules de protection existent. Même constat pour l’assistance informelle où l’on retrouve plusieurs organismes et structures publics qui s’occupent de l’aide sociale, à côté d’une multitude de sources privées et d’appuis civils, les unes religieuses, les autres familiales, sans oublier les élans de générosité externes ou patronaux. La gestion de la maladie au Liban reste principalement du ressort de l’individu et du secteur privé. L’État intervient dans ce domaine, mais son action directe a toujours été insuffisante et liée aux besoins des personnes défavorisées. Elle s’est d’ailleurs profondément transformée au cours des années de crise. À côté d’une faible action de contrôle général des structures privées, l’intervention publique en matière de santé s’articule autour de deux axes : développer une infrastructure hospitalière et sanitaire publique, en parallèle avec celle du secteur privé ou caritatif, et participer à la couverture des frais de santé de certaines catégories sociales ou assurer le financement d’actes médicaux lourds effectués par les institutions privées. S’y ajoutent la création et la gestion, totale ou partielle, d’organismes de prise en charge des frais de santé, notamment la Sécurité sociale et les coopératives publiques. À l’image de l’ensemble de la politique sociale, la politique publique libanaise de santé reste très mal définie, faiblement productive, et décidée en fonction de la conjoncture politique et économique du moment. Côté financement, il n’y a pas de ressources dominantes et toutes les formes sont mises à contribution. On fait aussi bien appel à l’impôt qu’à la solidarité sociale ou religieuse en passant par les cotisations, les transferts de charges entre malades et les contributions personnelles directes des ménages. Cette multitude de sources de financement fragilise encore plus le système et laisse de grandes interrogations pour le futur. Dans cette phase de reconstruction et de réhabilitation des structures socio-économiques, le système de santé au Liban est aujourd’hui caractérisé par une forte dérégularisation induite aussi bien par les effets pervers des longues années de crise, que par la politique de redressement adoptée par les pouvoirs publics après le retour au calme. Les multiples transformations des structures et les errements de l’action de l’État en matière de santé, observés au cours de ces dernières années, ont brouillé les tendances fondamentales du système sanitaire libanais. Un système insuffisant Il n’y a pas de ressources financières dominantes du système de santé libanais. On trouve côte à côte le financement propre des ménages, les cotisations sociales, l’impôt, les transferts entre malades ou les différentes sources de solidarité. Cette multitude de formes de financement, conséquence des choix stratégiques de base et de l’évolution historique du système, est fixée aussi bien par des décisions publiques, que par les lois du marché ou le modèle de solidarité sociale et communautaire. Nombreux sont les dispositifs utilisés par les pouvoirs publics libanais pour participer aux frais du secteur de la santé. Ils s’articulent en fait autour de trois axes. Les deux premiers sont directs et normalement assurés par les impôts. Ils visent, d’une part, le financement des structures publiques sanitaires et d’autre part, le financement de certaines prestations assurées par le secteur privé. S’y ajoute la participation de l’État aux prestations sanitaires de la CNSS. Le troisième volet des dispositifs publics est indirect et repose sur des décisions publiques de redistribution de revenus qui, en principe, infléchissent les lois du marché en faveur des patients et des malades. Les pouvoirs publics et les systèmes d’assurance sont loin d’être suffisants pour alléger à eux seuls la facture sanitaire des ménages libanais. Ces derniers sont obligés donc de couvrir totalement ou partiellement leurs frais sanitaires. Même pour les catégories les mieux couvertes par l’assurance, publique ou privée, le taux de contribution directe reste très élevé pour certaines prestations de santé. La dentisterie, la lunetterie ou les prothèses ne sont que très marginalement remboursées par les assureurs. En fait on peut remarquer que la participation financière directe des ménages reste très élevée pour les soins ambulatoires, et dans une moindre mesure pour les médicaments, alors qu’elle est relativement moins lourde pour les soins hospitaliers. Paradoxalement, ce sont les individus les plus fragilisés qui sont les plus exposés aux charges directes. C’est ainsi que les retraités et les personnes âgées ne sont qu’exceptionnellement pris en charge par les assureurs privés et la CNSS ne couvre plus ses propres assurés une fois qu’ils sortent du marché du travail. Même les cotisations volontaires ne sont pas acceptées par la Caisse. La solidarité sociale en matière de santé ne se limite pas à l’action entreprise par le biais des institutions publiques ou parapubliques. Diverses autres sources d’assistance servent aussi à financer les frais de santé des ménages les moins nantis. Ces aides viennent essentiellement en complément aux autres formes de financement ou elles couvrent des actes spécifiques notamment en matière de soins ambulatoires. Les différentes formes d’aides peuvent se résumer comme suit : les aides externes, familiales, communautaires et religieuses, ainsi que les aides patronales.
La protection sociale, ses choix, son organisation, sa gestion, son financement et ses effets considérables sur le plan social, économique, démographique et humain, sont aujourd’hui au centre des principaux débats des sociétés modernes. Le Liban n’éechappe pas à ces controverses, d’autant plus que la longue crise politico-économique des années 1975-1990 a profondément...