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Actualités - OPINION

Questions pour un champion

Bien troublant timing que celui du redéploiement syrien. Une décision entérinée, il y a neuf jours, avec un respect presque religieux des formes, par les commandements militaires libanais et syrien. Une décision pourtant prise alors que les territoires palestiniens bouillonnaient, et que la ligne bleue commençait à connaître ses premiers soubresauts. Un timing bien troublant – moins troublant pourtant que l’absence d’un bilan, censé être tout aussi officiel que l’était elle-même l’annonce de redéploiement, un bilan que tout Libanais est en droit d’attendre. «Mieux vaut tard que jamais» Effectivement, cette application (tout de même un peu personnelle) de Taëf – le redéploiement en vue d’un retrait total –, on l’attendait. Depuis 1992. Une preuve s’il en est, du moins dans la forme, que la ténacité, la pugnacité, voire même parfois l’héroïsme des uns ou des autres – Nasrallah Sfeir, Walid Joumblatt, Kornet Chehwane, journalistes et, surtout, étudiants – peuvent payer. Et qu’ils restent, plus que jamais, indispensables. Parce qu’il est évident, sans abonder trop longtemps dans le «c’est historique» façon Assem Kanso, que cette étape, toute floue soit-elle, est un indispensable premier pas. Mais jusqu’à quand la Syrie continuera-t-elle à tutoriser, à contrôler et à quasiment gérer un pays, ses dirigeants et sa décision politique ? À s’immiscer dans son quotidien ? Jusqu’à quand Damas, et avant lui Anjar, continueront-il à être les incontournables passages obligés (ou escales) de tout responsable libanais ? Jusqu’à quand Bachar el-Assad se sentira-t-il, en terres libanaises, de Baabda jusqu’au Phoenicia, comme chez lui ? Jusqu’à quand Abdel-Halim Khaddam consacrera-t-il autant de temps à réconcilier Émile Lahoud, Nabih Berry et Rafic Hariri ? Jusqu’à quand le palais Bustros sera-t-il une annexe du ministère syrien des Affaires étrangères ? Jusqu’à quand la Syrie continuera-t-elle à télécommander le Hezbollah ? Jusqu’à quand la Syrie continuera-t-elle à chapeauter toute élection se déroulant au Liban ? Ou toute nomination, même ministérielle ? Jusqu’à quand les hommes des Services de renseignements syriens vendront-ils des galettes au sésame ou des fraises de saison ? Jusqu’à quand les travailleurs syriens continueront-ils à prendre le Liban pour un nouveau Klondyke ? Jusqu’à quand l’agriculture libanaise souffrira-t-elle du poids syrien ? Jusqu’à quand la mafia d’affaires syrienne se servira-t-elle du Liban comme d’une poule aux œufs d’or ? Jusqu’à quand continuera-t-on à invoquer le mauvais timing, la situation régionale ou les fluctuations du zloty pour éviter de repenser entièrement les relations libano-syriennes ? Jusqu’à quand râbacherons-nous interminablement, et aux quatre vents, que la présence et la satellisation syriennes sont le premier maillon d’une chaîne (celle de l’Anti-Liban ?) qui n’en finit plus de priver le Liban de toute réforme politique, de toute réforme politique donc ? Jusqu’à quand continuera-t-on à attendre qu’un homme de bonne volonté – un homme capable d’imposer ses vues, libanais fût-il ou syrien – dise enfin qu’il est temps pour notre pays, si fort quand il était libre, de s’émanciper enfin des jupes de cette «grande sœur» somme toute bien autoproclamée ? Jusqu’à quand espèrera-t-on ce visionnaire ? Jusqu’à quand va-t-on attendre une bonne – la bonne – définition pour ce concept un peu fourre-tout, un peu poudre aux yeux et très clinquant : les «relations privilégiées» ? Le seul problème, c’est que l’ensemble, ou presque, de la classe politique de ce pays semble s’être habitué à tout cela. À ce délicieux ronron de ce qu’elle pense être un confortable assistanat. Ziyad MAKHOUL
Bien troublant timing que celui du redéploiement syrien. Une décision entérinée, il y a neuf jours, avec un respect presque religieux des formes, par les commandements militaires libanais et syrien. Une décision pourtant prise alors que les territoires palestiniens bouillonnaient, et que la ligne bleue commençait à connaître ses premiers soubresauts. Un timing bien troublant...