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Actualités - OPINION

Le système Taëf toujours sur la sellette Les pouvoirs de nouveau à couteaux tirés

Mystères de la langue française : on peut aussi bien dire que le rabibochage n’a pas fait long feu, et que la réconciliation a fait long feu. C’est une question de nuances. La première expression relève d’une notion de durée, et la deuxième de l’insuccès. Tout compte fait, c’est blanc bonnet et bonnet blanc. Et l’on se retrouve avec les mêmes bonnes chamailleries troïkistes. Les dirigeants se tirent allégrement dans les pattes, pour un oui pour un non. Et pour la bonne raison que la Constitution définit trop mal les prérogatives pour empêcher les empiètements. De ce fait le principe de la séparation des pouvoirs reste une simple vue de l’esprit. En pratique, cela se traduit par un étrange paradoxe. L’on voit en effet le Parlement, personnalisé (c’est le mot) par son speaker, s’immiscer à tout bout de champ dans les options du gouvernement. Tout en souffrant d’un réel déficit de pouvoir en tant qu’institution. Aussi bien en matière de législation qu’en ce qui a trait à son rôle de censeur par rapport aux actes de l’exécutif. Ce dernier s’efforce cependant de mettre les points sur les i. Le staff relations publiques du président du Conseil a de la sorte publié, au sujet du sommet, un firman qui se veut définitif. Pour rappeler, au sujet du prochain sommet arabe, que c’est au seul Conseil des ministres de trancher. Tout comme il lui appartient de définir les orientations politiques ou diplomatiques du pays. C’est là, est-il besoin de le souligner, un rappel à l’ordre républicain à l’adresse de M. Nabih Berry. Qui s’était distingué sur la scène arabe en réclamant le renvoi et la délocalisation de la conférence prévue à Beyrouth pour les 27-28 mars. Tout en chapeautant la campagne chiite menée contre l’éventuelle participation de Kadhafi le Libyen, accusé d’avoir fait disparaître l’imam Moussa Sadr en 1978. Lequel Kadhafi s’est empressé d’exiger le transfert de la réunion au Koweït ou dans les Émirats. Bref, la Ligue s’en est trouvée toute secouée. Et son secrétaire général, l’Égyptien Amr Moussa, a dû rappliquer à toute allure dans la zone, pour arranger les choses, parlant tour à tour avec son ex-boss Moubarak, avec les Séoudiens, avec les Syriens et enfin avec les Libanais. Qu’en est-il sorti au juste ? La confirmation d’un malaise interarabe à deux leviers. Tout d’abord, bien sûr, la question occurrente de la date et du site. Ensuite, l’ordre du jour. C’est-à-dire, en clair, le litige récurrent entre faucons et colombes. Entre les radicaux qui veulent soutenir l’intifada même si Arafat ne le demande pas. Et les modérés qui souhaitent ne pas trop titiller l’Amérique de l’après 11 septembre. Mais localement, et du moment que la politique étrangère n’a qu’à s’aligner sur les positions syriennes, les préoccupations suscitées par le débat s’articulent autour de la bataille des chefs. Des deux présidents, Berry et Hariri. Le Premier ministre, malgré l’apparente solidité de son argumentation sur le plan constitutionnel, s’est immanquablement attiré de vives critiques de la part des pôles chiites. Qui font valoir, non sans un zeste de pertinence, que dans la pratique l’exercice du pouvoir exécutif par le Conseil reste une illusion, à l’ombre du système de la troïka. En rappelant que nombre de ministres, de toutes tendances, se plaignent régulièrement de ce que les décisions effectives soient prises en dehors du Conseil, qui se les voit imposer. Ces défenseurs de M. Berry oublient cependant qu’il en va de même pour l’Assemblée nationale. Où il se trouve toujours une majorité docile aux directives du pouvoir réel, que cela soit celui de la troïka ou celui des décideurs. Les deux présidents sont donc quittes, en quelque sorte. Cependant, à tort ou à raison, c’est M. Berry que les professionnels chargent plus volontiers. Peut-être à cause de sa transparence plus prononcée en matière d’appétences. Il n’hésite pas en effet à réclamer ouvertement une part, dès que les intérêts de sa communauté ou encore mieux de son mouvement lui paraissent en jeu. L’un des derniers exemples en date est, bien entendu, celui des nominations. Et plus particulièrement de la direction générale de la Sécu, toujours vacante à cause de son conflit avec M. Hariri. Aujourd’hui, donc, le match reprend. Les haririens semblent croire, un peu naïvement sans doute, que leur communiqué va suffire pour réguler le jeu en leur faveur. Dans la mesure où cette position s’affiche comme éminemment constitutionnelle. Mais les politiciens pensent que cette mise au point risque d’aggraver le problème. D’une part parce qu’elle aura froissé le sens civique des berriyistes. Ensuite parce que, tout comme il l’avait laissé déjà entendre au sujet des nominations, M. Berry pourrait être tenté d’accorder le point à l’adversaire. Pour mieux rebondir ensuite lors du débat budgétaire, qui aura lieu sur son propre terrain (de chasse). Et les institutions ? Plus que jamais à vau-l’eau. C’est ce que déplore avec une pointe d’amertume le vice-président de la Chambre, M. Élie Ferzli. Ainsi du reste que le patriarche Sfeir, dont les sermons n’y font rien. Philippe ABI-AKL
Mystères de la langue française : on peut aussi bien dire que le rabibochage n’a pas fait long feu, et que la réconciliation a fait long feu. C’est une question de nuances. La première expression relève d’une notion de durée, et la deuxième de l’insuccès. Tout compte fait, c’est blanc bonnet et bonnet blanc. Et l’on se retrouve avec les mêmes bonnes chamailleries...