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Actualités - BOOK REVIEWS

TRIBUNE - À propos d’une signature

Violaine Prince, informaticienne, professeur des Universités, nous surprend dans Pays d’Ombre, par un bouquet de poèmes au parfum étrange. On est bien loin des poèmes poignants des Marches du désert où la violence vécue suscite des complaintes désespérées et où l’amour du terroir se confond avec celui des morts mal-aimés. Elle en témoigne sur un ton venu des profondeurs : «Ils dorment là les miens De lumière et de paix Sous la vigne et les pins Tout près de l’aire à blé» En Pays d’Ombre, écrit vingt ans après, tout change. Les appartenances sont écartées, gommées, la mélancolie réprimée. C’est un corps-à-corps avec les aléas de l’existence qui rythme le parcours poétique. Est-ce qu’on croise toujours, dans ces poèmes, ces vers enchanteurs tout empreints de tendresse ? Sans doute, mais ils sont moins nombreux que dans Les marches du désert. L’usage et l’écriture informatique auraient-ils changé la donne et plié la facture des poèmes à une poétique propre ? Ou bien serait-on devant une situation qui se prête mal à la douce musique du cœur et aux envols de l’imaginaire ? Le poète tranche sans hésiter : «Et voilà que je peins avec d’autres couleurs». Avec des couleurs ternes : le gris et le noir, qui racontent la faim de l’enfance et les frissons des vieillards. Des couleurs qui peignent une humanité laissée-pour-compte, vouée à l’abandon. Une humanité qui oscille entre une vie brisée et une mort inéluctable. Avec tous les malheurs qui jalonnent ce pénible intervalle. Sous le poids de ces tourments qui le secouent, le poète est amené à révoquer en doute une science impotente et, par là même, celle qu’il dispense : «Tous nos savoirs sont des images sur le sable». Nihilisme ? Je ne crois pas ! Mais plutôt constat d’une science aventureuse, déboussolée, et d’un monde kafkaïen qui imprègne notre existence, vécue comme une incompréhensible servitude. On serait tenté de croire que dans ce Pays d’Ombre la Lumière pourrait surgir, comme lueur timide, évanescente, pour nous donner l’espoir d’un sauvetage possible, grâce au dévoilement de quelque transcendance. Mais n’allons pas si vite ! Car, «La terre est sans raison... Et mon âme ne rencontre Que le désert des âmes ... La source n’est plus qu’un mythe Désordonné». Ce n’est donc pas le seul procès du savoir que le poète fait, mais aussi celui de l’Autre, réduit à un désert d’âme. Aussi, tourne-t-il «le dos aux servitudes pour s’asseoir au bord du vide». Et là il s’interroge sur le sens de sa vie : «Qu’ai-je donc accepté et pourquoi ? Et pour qui ?» Ainsi se sent-t-il condamné à la résignation et au silence. Mais il y a des silences invocateurs qui se passent de mots. Dans la science on ne lit que l’incertitude, et dans la communication l’échec. «Qui donc tendra la main, est-ce Ombre ? Est-ce Lumière ? «Nul ne peut le dire, car Il est silence et dans le silence réside la perfection». Par-delà l’ombre et l’inhérence de ses aléas, et par-delà la mort qui l’entoure, que pourrait signifier un silence qui serait néant ? Le pari de Violaine Prince demeure toujours à l’horizon du vide et c’est au-delà, dans «la crainte et le tremblement», qu’il côtoie la transcendance. Cet itinéraire du poète, que rythme la chronologie des poèmes, a la transparence d’une poésie qui coule de source et qui s’achève dans une admirable montée vers la Lumière.
Violaine Prince, informaticienne, professeur des Universités, nous surprend dans Pays d’Ombre, par un bouquet de poèmes au parfum étrange. On est bien loin des poèmes poignants des Marches du désert où la violence vécue suscite des complaintes désespérées et où l’amour du terroir se confond avec celui des morts mal-aimés. Elle en témoigne sur un ton venu des...