Mandales sans mandat

En ces temps de canicule, se dit le barbouze, rien ne vaut un petit aouniste ou un ex-fleu pour faire passer ses nerfs. Faut dire que tous ses collègues, du gros gendarmissime au sandwich, au gendarminet fluo clignotant avec sifflet, en passant par les armoires à glace de l’armée, bardés de ferraille, tous, je te dis, sont sur les dents. Les dents des autres. Alors forcément, il abrège les procédures, le James Bond indigène. Un mandat d’arrêt ? V’là une mandale pour commencer ! Un petit coup de fil ? Tiens, prends d’abord quelques coups. En acompte sur le fil qui servira de menottes. Le motif, lui, est tout trouvé : «Atteinte à la sécurité de l’État». Depuis les années 30, on n’a pas inventé mieux. Même si la formule magique n’a plus cours que dans les pays émergents qu’on fait émerger à coups de trique, et qu’elle est aboyée par un troufion à tronche de cake, affublé d’un neurone unique. Et puis, y a ces photos qu’on colle, décolle et recolle. Dans le concours «ma binette partout», ce sont incontestablement les orphelins du Général qui remportent la palme. Sauf que depuis quatre ans, ils se trompent de Général. Et ça, ça ne pardonne pas. Alcazar contre Tapioca, Hergé doit frétiller dans sa tombe ! Si ça peut te consoler, je te rappelle que les râleurs se seraient fait tabasser pareil s’ils s’étaient aventurés : – il y a 12 ans du côté de Baabda avec des clichés d’Émile. – il y a 17 ans à Achrafieh avec des posters d’Istiz Nabeuh. – il y a 25 ans dans le Chouf avec un pin’s des phalangos. – il y a 43 ans à Gemmayzé avec une icône de Gamal Abdel. C’est ce qui s’appelle avoir de la tradition. Et il se trouve encore des niais qui bêlent : «Où sont les libertés publiques garanties par la Constitution ?» Eh bien, elles ont rejoint l’électricité qui trembloie, l’eau qui pissoie et le téléphone qui merdoie.