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Actualités - REPORTAGES

Le Liban à l’époque des émirs

L’instauration du Royaume latin en Terre sainte, en 1099, a bouleversé le paysage démographique de l’Orient. Des populations musulmanes seldjoukides, turcomanes, kurdes, tcherkesses, arabes, persanes, venues d’Asie centrale, de Perse, d’Irak, de la péninsule arabique se sont installées au Proche-Orient pour le défendre contre l’invasion des Croisés. Le Liban, pays montagneux, était la place forte privilégiée pour mener à bien les opérations de défense et d’attaque contre l’État franc. Au XIIIe siècle et durant l’époque des Mamelouks, les familles princières, chargées de gouverner le Liban, étaient ainsi établies : les émirs Bohtor, branche de la célèbre tribu arabe des Tannoukh, étaient installés dans le Gharb sur les hauteurs ouest de Beyrouth, les émirs Assaf dans le Kesrouan et Bilad Jbayl, les Saifa à Tripoli et Akkar, les Bânu Amilah et les Bânu Béchara al-Husseini dans le Sud qui porte encore aujourd’hui leurs noms : Bilad Béchara, et Jabal Amil, les émirs Ma’an dans le Chouf, et les Chéhab à Wadi at-Taym sur les contreforts de l’Hermon. Les maronites étaient établis dans le Nord autour de la vallée de Qâdisha. C’est à partir de cette époque que commence ce qu’on appelle avec euphémisme «Le Liban des émirs». Ces émirs gouvernaient leurs provinces conformément aux traditions tribales de l’époque, mais devaient allégeance aux sultans mamelouks d’Égypte et à ceux de Turquie qui leur succédèrent. Deux partis : qaïssite et yéménite, se disputaient la vie politique du pays. Le premier avait le suffrage de la population ; il était le plus fort et le mieux organisé ; le second – équilibre politique oblige – bénéficiait des faveurs des autorités du Caire et, plus tard, de celles d’Istanbul. Les plus célèbres de ces tribus princières, qui ont profondément marqué l’histoire du Liban, étaient les Ma’an et les Chéhab. Le Liban sous les Ma’an (1120 – 1697) Les Ma’an se sont installés sur les hauts plateaux du Chouf vers l’an 1120, pour le défendre contre les attaques des Croisés. Leur capitale était Baakline. Plus tard, ils l’abandonnèrent pour s’établir à Deir el-Qamar sur les contreforts de la montagne. La prépondérance des Ma’an fut consolidée au XVIe siècle sous l’émir Fakhreddine Ier qui s’allia au sultan ottoman Sélim Ier, lors de sa conquête de Syrie en 1516. Son fils Qorkomaze (1544 – 1584) connut un sort tragique ; il fut assassiné dans des conditions demeurées obscures. Ses fils Fakhreddine et Younès, encore enfants, furent soustraits, par leur mère, Sitt Nassab, aux représailles turques et confiés à leur oncle Saifeddine al-Tannoukhi, qui prit en main la destinée du pays. En 1590, celui-ci remit à son neveu Fakhreddine, devenu majeur, le gouvernement du Chouf, fief de sa famille. Mêlant le courage à l’ambition, Fakhreddine noua des relations suivies avec les grands-ducs de Toscane qui désiraient supplanter, dans les échelles du Levant, la puissance décroissante de la Sérénissime République. En 1608, il conclut un «accord», demeuré verbal, avec Leoncini, envoyé de Ferdinand Ier, dans lequel l’émir promit l’accès de ses ports à la flotte commerçante toscane et son ravitaillement, contre la promesse du grand-duc de l’aider à consolider les fortifications du pays et de lui fournir armes et munitions. Cette tentative, très audacieuse de la part de Fakhreddine, ne pouvait manquer d’irriter le sultan. En effet, les conquêtes territoriales de l’émir sur les districts de ses voisins, districts qui, au demeurant, faisaient partie intégrante de la montagne, étaient loin de revêtir, aux yeux du Grand Seigneur, la gravité d’un «accord» qui donnait à un État chrétien européen, par les ports libanais, accès aux lieux saints. La réplique d’Istanbul ne se fit pas attendre. En 1613, les troupes ottomanes envahirent le Liban. Fakhreddine, se jugeant incapable de s’opposer à une armée régulière, s’embarqua pour la Toscane, le 13 septembre de la même année. Il profita de son séjour en Italie pour se familiariser avec la vie politique, économique et sociale dans les Républiques italiennes. En 1618, il retourna dans sa principauté à la suite d’une révolution de palais à Istanbul. Durant cette seconde période du gouvernement de Fakhreddine (1618 – 1632), le Liban connut une époque de prospérité sans précédent.
L’instauration du Royaume latin en Terre sainte, en 1099, a bouleversé le paysage démographique de l’Orient. Des populations musulmanes seldjoukides, turcomanes, kurdes, tcherkesses, arabes, persanes, venues d’Asie centrale, de Perse, d’Irak, de la péninsule arabique se sont installées au Proche-Orient pour le défendre contre l’invasion des Croisés. Le Liban, pays...