(Dé) mesures - La plus belle fille du monde ne pourra jamais donner que ce qu’elle a.

Excitant, terriblement excitant – et un peu inquiétant aussi. Un des plus beaux, un des plus gros défis que le Liban a eu l’intelligence un peu téméraire d’accepter : organiser le IXe sommet des chefs d’État et de gouvernement des pays francophones. Et tout ce qui se passera en amont. Une gageure, une vraie. Faire un retour fracassant sur la scène internationale tout en rêvant au porte-parolat de l’arabité ? Il serait temps. Se souvenir et prendre soin de la diaspora libanaise un peu partout dans le monde ? Il serait temps. Faire avancer hommes politiques et simples Libanais dans la même voie, celle d’une disponibilité de tous les instants, active, énergique et citoyenne, un garde-à-vous pour tout un Liban ? Il serait temps. Faire se multiplier comme des petits pains, et pas uniquement sur Beyrouth, les événements culturels – théâtre, musiques, danse, cinéma, arts plastiques, photographie... Il serait temps. Tout cela est une promesse de pur bonheur, politique, économique, culturel, tous les secteurs seront concernés. Sauf que... Sauf que quoi ? Personne ne veut jouer les trouble-fêtes, les schtroumpfs grognons, les rabat-joie. Francophones ou pas, les Libanais vont un jour ou l’autre, bientôt, prendre conscience de l’importance de tout cela, l’événement le plus important depuis... Sauf qu’ici, les Libanais comme l’État, ne prennent pas souvent la juste (dé)mesure d’une chose. Parce que la Méditerranée, parce que la générosité, parce que l’ambition, parce que le tape-à-l’œil, parce que la poudre aux yeux, parce que l’orgueil, parce que l’envie de faire plus loin, plus vite, plus fort, plus haut... Qui trop embrasse... Mal étreint ? Déçoit ? Tombe de haut ? L’ambition n’est géniale que lorsqu’elle a – encore mieux, lorsqu’elle se donne – les moyens. Lorsqu’elle prend des mesures, les bonnes. Lorsqu’elle précise et raisonne sa démesure. Lorsqu’elle finit par se débrouiller pour faire du sur mesure. Que les peine-à-jouir continuent de ronchonner, personne ne les écoutera : octobre 2001 est, déjà, l’odyssée de tous les possibles. La divine surprise est à portée de mains : il n’y a que des hommes et des femmes de bonne volonté, les meilleures intentions. Il serait dommage et dommageable de laisser s’en aller, honteusement, en rasant les murs, cette surprise-là, en voulant trop en faire. La plus belle fille du monde ne pourra jamais donner que ce qu’elle a. Tout le monde croisera les doigts, tout le monde (se) donnera, mais par pitié, évitons de se jeter du douzième étage en appelant Dieu au secours.