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Actualités - BOOK REVIEWS

Livres - « Le message » par Andrée Chédid - Réflexion sur la vie, - la mort, l’amour, la guerre

… «Je t’attendrai dans une semaine, ce sera dimanche à midi. Je serai assis sur le muret à l’angle du grand pont comme à notre premier rendez-vous d’adolescents. Tu seras à l’heure, je te connais, je t’aperçevrai de loin, mon cœur battra au rythme du tien. Tout le reste s’effacera, je te tiendrai dans mes bras, je te garderai pour toujours... Mais au bout d’une heure d’attente, si tu ne viens pas, je comprendrais que tout est définitivement rompu entre nous... Je t’aime...» Dans son dernier ouvrage, Le message (Édition Flammarion), Andrée Chédid raconte une histoire triste et pleine de questionnements. Un pont séparait Marie de Steph, dans cette ville détruite. Ils se connaissent depuis l’enfance, une relation riche, dense, tumultueuse avec des brouilles, des controverses, des mouvements abrupts. Mais ils se retrouvaient toujours et renouvelaient leur promesse : «Quels que soient nos chemins aux derniers jours, je serais près de toi». Marie est prête à tout faire pour rejoindre Steph. Dès le message reçu, elle s’achemine à l’heure dite vers le lieu convenu. L’amour et la vie unissaient ces deux êtres, dans cette ville en proie à la violence et à la destruction. Soudain, ce fut bref, inattendu, cuisant, Maris reçoit une balle dans le dos, elle s’écroule, abattue par un franc-tireur. Le pont n’est plus qu’à une vingtaine de minutes de distance, elle pense pouvoir l’atteindre à l’heure convenue, mais son corps ne la suit pas. Petit à petit, elle n’est plus qu’une masse de tissu jaune et fleuri, recroquevillée sous le soleil. Un vieux couple, fuyant les bombardements, la découvre par hasard, il est medecin, il essaie de la soigner, pendant que sa femme se propose d’aller avertir Steph, que Marie avait bien l’intention de le retrouver. Steph pourra-t-il rejoindre Marie ? Se reverront-ils ? Pourront-ils se réconcilier ? Le récit est un «thriller» qui nous tient en haleine, palpitant, émouvant. Il pourrait avoir lieu à Beyrouth, à Sarajevo ou ailleurs. Mais au-delà de l’histoire d’amour, des questions fondamentales imprègnent ce récit : Dieu, la vie, la mort, l’amour, la guerre, l’horreur de la guerre sont omniprésents. «Pourquoi et dans quel but cette quête d’amour se trouve-t-elle au cœur de l’humanité ? Comment mêler Dieu à cet ordre ou à ce désordre de l’humanité ? Comment l’en exclure ? Comment et pourquoi des peuples d’une minuscule et même planète à la longevité si courte, voués à la même mort, comment peuvent-ils s’entretuer et s’en glorifier ?» Ces questions surgissent avec la poésie d’une écriture puissante, brûlante, tragique. Chez Andrée Chédid il y aura toujours cette interrogation : «Demain, où serons-nous ? Mon amour ?». Comment ne pas mentionner dans l’horreur de la guerre le portrait type du franc-tireur, juché sur les ruines et tirant sur tout ce qui bouge, «sur l’ennemi», dit-il. Qui est l’ennemi ? Il n’en sait rien. Sa baïonnette affirme sa virilité. Commencée par quelques remarques subtiles sur son état d’esprit, ses rapports avec sa famille, on s’aperçoit qu’une profonde analyse psychologique de son comportement se développe au cours du récit. Étrange, le chapitre de sa confrontation avec les livres, «ses lectures disparates» dont il tire les citations qui lui conviennent, les notes sur son calepin, en se promettant d’y réfléchir plus tard : «Vivre est gloire». Il éprouve à ces lectures un véritable plaisir. Ce côté humain est touchant. Avait-il conscience du prix de la vie avant son face-à-face avec la victime ? Les phrases-répliques d’Andrée Chédid sont bouleversantes, des phrases toutes simples, mais qui vous arrachent le cœur. «Marie l’aperçut de loin. De très loin Marie l’aperçut» Plus loin - Venez c’est par ici. C’est ici. - Elle est restée en vie pour vous attendre. - Et si je n’étais pas venu ? - Elle serait morte depuis un long moment ? Et pour dire la mort, le départ de Marie, Andrée Chédid écrit une des plus belles phrases de ce magnifique livre. «Le passage se déroula calmement, sans heurt, Marie s’évada en douceur, vers une substance translucide, avant de n’être plus».
… «Je t’attendrai dans une semaine, ce sera dimanche à midi. Je serai assis sur le muret à l’angle du grand pont comme à notre premier rendez-vous d’adolescents. Tu seras à l’heure, je te connais, je t’aperçevrai de loin, mon cœur battra au rythme du tien. Tout le reste s’effacera, je te tiendrai dans mes bras, je te garderai pour toujours... Mais au bout d’une...