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Iran : une indépendance éphémère
Par BIBAS Benjamin, le 30 avril 1999 à 00h00
L’Iran présente une construction nationale différente du cas turc : selon la Constitution de 1906, aucune obligation d’utiliser le persan dans l’enseignement et l’administration n’est proclamée. Les Kurdes ne sont pas exclus a priori de la communauté nationale. La signature, sur l’initiative iranienne, du pacte dit «antikurde» de Saadabad (1937) avec l’Afghanistan, l’Iraq et la Turquie, rend en outre peu probable la perspective d’un mouvement kurde transfrontalier partant d’Iran. Celui-ci voit pourtant le jour durant la Seconde Guerre mondiale. Sous l’occupation de l’Iran par les armées britannique et soviétique, un parti autonomiste – l’Organisation pour le renouveau du Kurdistan – est créé à Mahabad en septembre 1942. En 1945, sous l’influence de son chef, Qazi Mohammad, l’organisation prend le nom de Parti démocratique du Kurdistan d’Iran (PDKI) et revendique notamment l’autonomie administrative «dans les limites du territoire iranien», l’enseignement et l’utilisation du kurde, enfin l’élection d’une assemblée provinciale kurde. Qazi Mohammad fonde la République kurde de Mahabad le 22 janvier 1946. Il est bientôt rejoint par le Kurde-irakien Mustapha Barzani. Toutefois, dès la fin de l’occupation anglo-soviétique, l’armée iranienne met fin à cette tentative et Qazi Mohammad est pendu le 31 mars 1947. Ainsi s’achève l’unique expérience d’une nation kurde indépendante. La suite de l’histoire des Kurdes d’Iran est suspendue aux relations irano-irakiennes. Le Pacte de Bagdad (1955) délimite d’abord le cadre de la coopération entre les deux pays. Puis les relations s’enveniment avec l’arrivée au pouvoir du général Abdel Karim Kassem en Irak (1958). Chacun des deux pays encourage alors les révoltes kurdes chez son voisin. La signature de l’accord d’Alger (6 mars 1975) met un terme à cette guerre larvée par minorités kurdes interposées : les deux gouvernements renoncent à aider les autonomistes kurdes de l’autre côté de la frontière. À partir de 1979, la Constitution islamique satisfait certaines des revendications kurdes : «l’emploi des langues régionales (…) dans (…) les médias et l’enseignement de leur littérature (…) est libre à côté du persan» (art. 15). Pourtant, les Kurdes boycottent le référendum du 1er avril 1979 plébiscitant la République islamique. Leur opposition se cristallise autour de deux partis : le PDKI (tendance communiste) et le Komela («Organisation révolutionnaire des travailleurs du Kurdistan »), d’inspiration maoïste. En septembre, la répression militaire iranienne écrase Mahabad (plus de 600 morts). Les troubles se poursuivent et les Kurdes d’Iran et d’Irak sont à nouveau utilisés par la partie adverse pendant la guerre opposant les deux pays (1980-1988). Ce dernier conflit engendre une émigration massive des Kurdes d’Iran vers les villes de l’intérieur du pays. Après conflits et exodes, ainsi, la désintégration et la détribalisation de la société kurde iranienne semblent aujourd’hui telles que l’émergence d’une nouvelle revendication nationale y apparaît peu probable dans un avenir proche.
L’Iran présente une construction nationale différente du cas turc : selon la Constitution de 1906, aucune obligation d’utiliser le persan dans l’enseignement et l’administration n’est proclamée. Les Kurdes ne sont pas exclus a priori de la communauté nationale. La signature, sur l’initiative iranienne, du pacte dit «antikurde» de Saadabad (1937) avec l’Afghanistan, l’Iraq et...
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