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Actualités - REPORTAGES

PSYCHANALYSE - PSYCHIATRE - Vers une complémentarité ? Les manifestations psychosomatiques , une façon de dire sa vérité à moitié

«Si la parole est d’argent, le silence est d’or», dit l’adage. Pour les psychanalystes, ce serait non seulement le contraire, mais ils iraient même jusqu’à dire que cette «parole est plus importante que la vie» et, par extension, que le silence équivaudrait à la mort. La mort dans l’âme, les déprimés, névrosés et autres personnes souffrant de “mal d’être” et de toutes les maladies du corps et du cœur – puisqu’elles vont souvent de pair – ne savent plus très bien à quel «interlocuteur» se vouer, les «auditoires» s’étant multipliés durant les deux dernières décennies. Une seule phrase continue toutefois de retentir dans leurs têtes : «Taisez-vous, laissez-moi parler» ! C’était la première phrase dite par une “hystérique” à Freud! Psychanalystes, psychiatres ou thérapeutes de tout genre, le choix est d’autant plus difficile aujourd’hui que les écoles, les discours et les méthodes abondent. De quoi aggraver votre névrose ! «Aujourd’hui, nous sommes dans une société qui bannit les fous», relève le Dr Chawki Azouri, un psychiatre repenti et “récupéré” depuis longtemps déjà par la psychanalyse. Oui, les «fous», comme on dit communément, ne sont pas très affectionnés par la société. Depuis les temps les plus reculés, les personnes «démentes» ont été souvent embarrassantes, quoique charismatiques, parfois même extrêmement “intelligentes” ( les oracles, les fous du roi, etc.). Mais n’est-ce pas un très grand mot que de parler de fous et de folie? Après tout, ne le serions-nous pas tous un peu par petites bribes d’aliénation et de phobies et de manies que l’on développe d’une manière ou d’une autre? 90 % de la population «Toutes les personnes sont en “mal d’être”», répondent psychiatres et psychanalystes ( pour une fois en chœur !) ; mais c’est seulement lorsque ce malaise devient de plus en plus handicapant dans la vie de tous les jours, et qu’il s’incarne dans des symptômes physiques (douleurs d’estomac, migraines, insomnies, frigidité ou stérilité, délire, phobies et toutes formes de maladies psychosomatiques) qu’il faudra peut-être commencer sérieusement à «en parler»! C’est précisément sur ce point-là que les psychanalystes commencent à diverger des psychiatres. Car, pour l’école psychiatrique justement, si la parole est d’argent, la pilule est d’or. Et c’est sur «la pilule du bonheur» et toute la série d’antidépresseurs et traitements biochimiques que toute une génération de psychiatres misent pour «rétablir» une personne souffrant de troubles psychiques relativement sérieux. Cependant, ces personnes qui endurent ces «malaises» et perturbations de leur système psychique seraient plutôt rassurées de savoir qu’elles font partie des 90 % de la population. Ce sont quelque 30 % des gens qui seraient de structure psychotique, 3 % de structure névrotique, et 30 % ce que l’on appelle les border-line ou les inclassifiables, de quoi reléguer les 10 % restants, c’est-à-dire les normaux, au rang de marginaux ! Bref, c’est dire l’ampleur de ces soi-disant «gros malaises» qui habitent les gens, et secouent nos sociétés. C’est aussi et surtout pour démystifier la notion de «folie» tout en usant, avec précaution toujours, d’une terminologie qui, sans cela, risquerait de froisser les plus «normaux» d’entre nous. Cependant par delà “le conflit des mots”, c’est un autre type de querelle qui est actuellement sous-jacent au désaccord psychiatrie/psychanalyse, et ce sur plusieurs aspects : celui de savoir lequel des deux corps de métier, prétrend à “un savoir supérieur” et, par conséquent, à une connaissance et à “un pouvoir” en termes de rémission des troubles psychiques. En d’autres termes, quelle est la discipline qui aurait réussi, un tant soit peu, à trouver le véritable chemin ou formule pour guider les personnes perturbées à travers leur mal et les amener à un bien-être relatif ? Lequel, psychanalyste, psychiatre ou (autre) thérapeute, est-il à même de les amener à opérer une réorganisation fonctionnelle de leur vie et à atteindre une certaine quiétude intérieure qui est la raison même pour laquelle une personne souffrante s’est jetée corps et âme dans les bras de l’un ou de l’autre ? Toute la question est là. Mais le débat ne fait que commencer. Aujourd’hui et demain, un premier colloque sur la psychanalyse réunira des figures éminentes du monde psychanalytique et présentera le processus analytique sous toutes ses formes. Les participants auront également pour autre tâche de redéfinir la place de la psychanalyse qui – bien que menacée de toutes parts – continue de s’affirmer grâce à ses prophètes et ses nombreux défenseurs. Ceux-là affirment, par ailleurs, comme on peut s’y attendre, que cette discipline «est encore plus pertinente en face des neuro-sciences et de la médecine parce qu’elle a son champ particulier». On s’attend à un débat houleux, tant il est vrai que la psychanalyse ainsi que son fondateur, Sigmund Freud, continuent, jusqu’à nos jours, de susciter les réticences et les confrontations que l’on sait. On s’attend aussi – et on l’espère vivement – que les psychiatres fassent écho, à leur tour, par un autre colloque axé sur l’école psychiatrique, car là aussi le métier est souvent la cible d’attaques que l’on voudra croire infondées. Entre-temps, dans des espaces de pénombre, des milliers de gens souffrent en silence. Certains reprennent avec plus ou moins de courage la vie de tous les jours, portant un masque d’autant plus épais que personne, absolument personne, ne doit découvrir leur névrose obsessionnelle, leur phobie, leur hystérie, ou autres troubles psychiques. Quelques-uns, n’ayant pas la chance d’être “repêchés” à temps, croupissent, dans les hôpitaux psychiatriques, recroquevillés sur leurs peurs, leurs angoisses, délires, et toute la gamme d’horreurs. Peut-être, et en sus du traitement biochimique – dont peu de gens remettent aujourd’hui en cause l’efficacité “immédiate” – fallait-il tout simplement les écouter longtemps, très longtemps durant, et bien patiemment, afin qu’ils arrivent un jour à «accoucher de leur propre savoir… sur leur propre mal», bien mieux que psychiatres, thérapeutes et psychanalystes réunis ! C’est en tout cas ce qu’a voulu nous enseigner Freud il y a 100 ans auparavant.
«Si la parole est d’argent, le silence est d’or», dit l’adage. Pour les psychanalystes, ce serait non seulement le contraire, mais ils iraient même jusqu’à dire que cette «parole est plus importante que la vie» et, par extension, que le silence équivaudrait à la mort. La mort dans l’âme, les déprimés, névrosés et autres personnes souffrant de “mal d’être” et de...