Zhang Yimou claque la porte

Le cinéaste chinois Zhang Yimou, longtemps mal vu du régime communiste, a décidé de retirer du Festival de Cannes les deux films qu’il comptait présenter cette année, afin de protester contre la «discrimination» qui frapperait les films chinois en Occident. «J’ai décidé de retirer mes deux films du festival», écrit le metteur en scène dans une lettre à Gilles Jacob, le délégué général du Festival international du film de Cannes, qu’il accuse de n’avoir «pas compris» ses films et de les avoir jugés selon des critères politiques. «Il est inacceptable que depuis longtemps les Occidentaux interprètent les films chinois selon des critères uniquement politiques et les divisent en deux catégories, selon qu’ils les considèrent hostiles ou favorables» au gouvernement chinois, ajoute-t-il, tout en espérant que cesse «cette discrimination à l’égard des films chinois». Selon Le Quotidien de la jeunesse de Pékin, qui reproduit la lettre, le réalisateur n’a pas apprécié des «commentaires faits publiquement» par Gilles Jacob, qui aurait accusé ses deux films de faire la propagande du régime chinois. Les deux films en question sont Yige dou bu neng shao (Pas un seul absent), autour d’une jeune institutrice en milieu rural, et Wode fuqin muqin (Mon père et ma mère), une histoire d’amour en Mongolie intérieure. Zhang Yimou, 49 ans, a connu la célébrité dans les festivals occidentaux dès la fin des années 1980 avec Le sorgho rouge, qui avait reçu l’Ours d’or à Berlin en 1988, puis Epouses et concubines, Lion d’argent à Venise en 1991, et Qiu Ju, une femme chinoise, Lion d’or en 1992. Il devra cependant attendre fin 1993 pour recevoir sa première récompense en Chine, où ses films restent pour la plupart distribués au compte-gouttes, les autorités les jugeant éloignés des critères patriotiques et moraux habituels. Fin 1997, Zhang Yimou avait encore eu maille à partir avec les autorités de Pékin en présentant Keep Cool à Venise, sans avoir obtenu le feu vert préalable du gouvernement. En 1994, lors de la présentation au Festival de Cannes de Vivre, il n’avait pas pu venir sur la Croisette.