Actualités - CHRONOLOGIE
Une culture de la violence
le 22 avril 1999 à 00h00
La fusillade du lycée de Littleton est le produit d’une «culture de la violence» entretenue dans certains États américains, mais doit être relativisée, estime Sophie Body-Gendrot, sociologue. Politologue et spécialiste des violences urbaines aux États-Unis, co-auteur d’un rapport sur les violences remis l’année dernière au ministre de l’Intérieur Jean-Pierre Chevènement, Sophie Body-Gendrot n’est pas étonnée par cette tragédie. Depuis deux ans, en effet, plusieurs incidents semblables ont eu lieu dans des établissements scolaires aux États-Unis. «Ces violences, il faut cependant le rappeler, dit-elle, se sont toujours passées dans les États de l’Ouest et du Sud, où est entretenue une certaine culture de la gâchette, et où les armes circulent abondamment. On verrait sans doute moins ce genre de drames dans le Vermont ou le Maine». La culture des armes et d’une certaine violence ne suffit pas pour expliquer que des jeunes tuent leurs camarades, en apparence «gratuitement». Il faut ajouter, dit-elle, «l’influence de la vidéo et de certains sites Internet. Ce n’est pas anodin, car des jeunes un peu fragiles psychologiquement peuvent facilement être convaincus qu’ils sont menacés et souhaiter intégrer des groupes ou des gangs qui affichent leur force». L’année dernière, affirme Sophie Body-Gendrot, on a constaté une augmentation de 40 % des affiliations aux groupes néo-nazis et au Ku Klux Klan. La fusillade de Littleton «ressemble fort à une mission-suicide», poursuit la sociologue, et témoigne aussi «d’une insuffisante attention à la santé mentale des jeunes impliqués». «Ici comme là-bas, les jeunes ne sont pas suffisamment soutenus psychologiquement». Il faut cependant relativiser les risques. Les crimes violents aux États-Unis ont diminué, rappelle-t-elle, de 20 % chaque année entre 1994 et 1996. «Il y a une chance sur un million qu’un jeune soit tué dans son école, dit-elle. Entre 70 et 74 ans, on a deux fois plus de “chance” d’être victime des violences aux États-Unis qu’entre 10 et 14 ans». La sociologue ne voit pas d’un bon œil le coup de projecteur placé sur ces incidents, en raison des risques de contagion et de la tentation de dresser un mur autour des écoles. Fermer les écoles, placer des détecteurs de métaux à chaque entrée, «c’est aussi, dit-elle, envoyer un message à ces jeunes et avoir un effet tout à fait inverse à celui recherché». Elle privilégie le renforcement du lien social, une meilleure attention aux problèmes psychologiques des adolescents, ainsi que la présence accrue d’équipes d’adultes sur place. En France, ajoute-t-elle, «il y a très peu de risques que nous voyions ce genre d’incidents, car il n’y a pas autant d’armes en circulation, la violence des jeunes est encore surtout verbale dans les établissements scolaires, et la réponse institutionnelle n’est pas la même qu’aux États-Unis».
La fusillade du lycée de Littleton est le produit d’une «culture de la violence» entretenue dans certains États américains, mais doit être relativisée, estime Sophie Body-Gendrot, sociologue. Politologue et spécialiste des violences urbaines aux États-Unis, co-auteur d’un rapport sur les violences remis l’année dernière au ministre de l’Intérieur Jean-Pierre Chevènement,...
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