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Actualités - CHRONOLOGIE

Noël Jean-Paul Sartre et la Nativité

Pour ce jour de Noël, voici un texte rare écrit par Jean-Paul Sartre sur la Nativité. Ce passage est un extrait d’une pièce sur Noël intitulée Bar Jona, écrite en captivité et jouée par des prisonniers. «La Vierge est pâle, elle regarde l’enfant. Ce qu’il faudrait peindre sur son visage, c’est un émerveillement anxieux qui n’a paru qu’une fois sur une figure humaine. Car le Christ est son enfant, la chair de sa chair et le fruit de ses entrailles. Elle l’a porté neuf mois et lui donnera le sein et son lait deviendra le sang de Dieu. Et par moments, la tentation est si forte qu’elle oublie qu’il est Dieu. Elle le serre dans ses bras et elle dit : “Mon Petit”. Mais à d’autres moments, elle demeure interdite et elle pense : Dieu est là, et elle est prise d’une horreur religieuse pour ce Dieu muet, pour cet enfant terrifiant. Toutes les mères sont ainsi arrêtées par moments, devant ce fragment rebelle de leur chair qu’est leur enfant, et elles se sentent en exil devant cette vie neuve qu’on a faite avec leur vie et qu’habitent des pensées étrangères. Mais aucun enfant n’a été plus cruellement et plus rapidement arraché à sa mère, car il est Dieu et il dépasse de tous côtés ce qu’elle peut imaginer... Mais je pense qu’il y a aussi d’autres moments, rapides et glissants, où elle sent à la fois que le Christ est son fils, son petit à elle, et qu’il est Dieu. Elle le regarde et elle pense : Ce Dieu est mon enfant. Cette chair divine est ma chair. Il est fait de moi, il a mes yeux et cette forme de sa bouche, c’est la forme de la mienne, il me ressemble. Il est Dieu et il me ressemble. Et aucune femme n’a eu de la sorte son Dieu pour elle seule, un Dieu tout petit qu’on peut prendre dans ses bras et couvrir de baisers, un Dieu tout chaud qui sourit et respire, un Dieu qu’on peut toucher et qui rit. Et c’est dans un de ces moments-là que je peindrais Marie, si j’étais peintre».
Pour ce jour de Noël, voici un texte rare écrit par Jean-Paul Sartre sur la Nativité. Ce passage est un extrait d’une pièce sur Noël intitulée Bar Jona, écrite en captivité et jouée par des prisonniers. «La Vierge est pâle, elle regarde l’enfant. Ce qu’il faudrait peindre sur son visage, c’est un émerveillement anxieux qui n’a paru qu’une fois sur une figure humaine. Car...