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Actualités - ANALYSE

Pour le prochain régime, des problèmes à la pelle

Taëf a sans doute retiré à la présidence de la République le pouvoir exécutif, pour le confier au Conseil des ministres. Mais le chef de l’Etat garde un rôle entraînant qui lui permet d’influer sur les décisions de l’Etat ou même de les faire tout seul, dans certaines circonstances. Personne n’oublie à cet égard que l’éviction par la force en 1990 du général Michel Aoun était beaucoup due à la volonté de M. Elias Hraoui qui a ainsi apporté une contribution majeure à la cessation de l’état de guerre dans ce pays et au rétablissement de l’ordre civil. Son successeur se retrouvera cependant devant des difficultés, qui appelleront de sa part le déploiement de qualités opiniâtres, pour que le pays cesse de glisser sur une pente savonneuse, sinon fatale. Il lui faudra en effet, avec les autres leviers du pouvoir, tenter de réaliser les objectifs suivants: — Reconsolider une stabilité sécuritaire qui devient de plus en plus précaire, que cela soit sur le plan des complots ou sur celui de la criminalité de droit commun. Par un faux paradoxe, cet objectif implique une préparation de fond devant permettre aux forces régulières libanaises d’assumer l’ordre toutes seules sur l’ensemble du territoire, sans le concours de troupes empruntées. Car c’est dans la souveraineté, l’indépendance, l’autonomie de décision qu’un Etat peut vraiment se stabiliser, en contrôlant étroitement un terrain qui autrement resterait criblé comme une passoire, perméable à toutes les provocations, à toutes les manipulations. — Lutter contre le marasme (pour ne pas dire contre la récession) socio-économique en assainissant pour commencer les finances publiques, par une compression budgétaire effective permettant d’alléger la dette publique, intérieure et extérieure. La stabilité politique est aussi nécessaire à cette fin que les efforts visant à attirer les capitaux étrangers. Et il est évident qu’une autre condition essentielle du redressement dans ce domaine reste l’épuration de l’Administration, mais aussi des mœurs politiques qui favorisent la corruption et entretiennent les magouilles. — Assurer des ressources pour le relèvement de l’échelle des salaires des fonctionnaires, pour le retour des déplacés et pour le développement des régions déshéritées. Exercice difficile, car il faudra augmenter les impôts sans léser les classes désargentées; autrement dit ne pas trop appuyer sur le champignon déjà surcomprimé des taxes indirectes qui touchent les pauvres plus que les nantis mais qui ont l’avantage d’être aisément perceptibles, ce qui est loin d’être le cas pour les impôts directs… Il y aurait donc, selon toute probabilité, de lourds sacrifices à consentir encore pour les Libanais des classes moyennes ou économiquement faibles; ils s’y résigneraient de meilleur cœur, s’ils avaient l’assurance que le pouvoir était propre, que chaque sou serait dépensé à bon escient et qu’au bout du compte il y aurait promotion de la justice sociale. Par contre, si le pouvoir ne devait pas jouir de la confiance générale, les mesures fiscales qu’il prendrait susciteraient sans doute de forts remous sociaux, voire un soulèvement populaire comme en mai 92… Refonte — Réaliser enfin cette réforme administrative dont on parle depuis des lustres, toutes les tentatives effectuées depuis l’indépendance s’étant soldées par de lamentables fiascos. Une refonte indispensable pour la bonne marche des affaires publiques du pays et pour son développement. Et qui devra comprendre trois volets intimement liés: une épuration radicale pour l’éradication de la corruption comme de l’incompétence; une modernisation des instruments et du système de travail; une réorganisation fondée sur la décentralisation administrative. — Laquelle pourrait conditionner en partie le redécoupage des circonscriptions électorales pour des législatives qui devraient se fonder sur un nouveau code, assurant l’égalité de tous les électeurs devant les urnes ainsi qu’une saine représentation parlementaire pour toutes les régions et toutes les communautés. — Toujours sur le plan politique, l’Etat devra s’efforcer, comme ses dirigeants ne cessent depuis des années d’en proclamer la nécessité, d’élaborer un nouveau code des partis. Afin de favoriser les formations nationales aconfessionnelles, au détriment des groupements à caractère communautaire voire sectaire qui tiennent encore le haut du pavé. Ceci, bien entendu, pour faciliter l’avènement d’une société aussi civique que civile, dans le cadre de l’abolition progressive du confessionnalisme politique pour lequel il faudra mettre enfin sur pied le comité supérieur prévu dans Taëf. — En ce qui concerne le système lui-même, le prochain régime devra tenter, pour suivre les recommandations de l’actuel locataire de Baabda, d’obtenir des amendements constitutionnels rééquilibrant les pouvoirs. — Enfin, il faudra peut-être faire face à divers impedimenta de nature régionale, que la paix se fasse ou qu’elle ne se fasse pas…
Taëf a sans doute retiré à la présidence de la République le pouvoir exécutif, pour le confier au Conseil des ministres. Mais le chef de l’Etat garde un rôle entraînant qui lui permet d’influer sur les décisions de l’Etat ou même de les faire tout seul, dans certaines circonstances. Personne n’oublie à cet égard que l’éviction par la force en 1990 du général...