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Actualités - REPORTAGE

La présidence britannique veut éviter la réédition du fiasco de Malte Palerme:une conférence aux ambitions limitées

Sous l’impulsion de la Grande-Bretagne, qui assure la présidence tournante de l’Union européenne et croit si peu à l’Europe politique, la conférence euroméditerranéenne de Palerme a des ambitions particulièrement limitées. C’est ainsi qu’elle ne comporte ni ordre du jour ni document de travail écrits. De surcroît, les ministres et délégués qui prennent la parole au cours des séances plénières ne doivent pas donner lecture d’un texte et se contenter d’un exposé oral. Ce profil minimum a été imposé par le chef du Foreign Office, Robin Cook, qui préside la conférence, pour éviter la réédition du fiasco auquel avait abouti la précédente rencontre euroméditerranéenne de Malte, en avril 1997. A Malte, tous les efforts des Hollandais, qui présidaient la conférence, avaient pour objectif d’organiser une rencontre entre Yasser Arafat et David Lévy, alors ministre des Affaires étrangères d’Israël. Elle avait bien eu lieu, mais n’avait servi à rien. Aujourd’hui, à Palerme, ni Robin Cook ni ses collègues européens ne se font d’illusion et aucun objectif politique n’est fixé à la conférence. Du reste, les Israéliens, en n’envoyant pour les représenter qu’un fonctionnaire, Eytan Ben Tzur, directeur général du ministère des Affaires étrangères, soulignent le peu d’importance qu’ils accordent à celle-ci. Dans ces conditions, on peut se demander à quoi sert la conférence de Palerme qui se tient à la Villa Igiea, un superbe bâtiment Art Nouveau dû à l’architecte Ernesto Basile. Tout juste à maintenir le contact, le fil tendu entre les Euro-Méditerranéens, afin que l’agonie dans laquelle se trouve le processus de paix au Moyen-Orient ne torpille complètement le partenariat entre les Quinze et les douze Etats de la Méditerranée engagés dans le processus lancé à Barcelone en novembre 1995 alors que Netanyahu n’était pas encore au pouvoir et qu’on pensait qu’après Madrid, la paix globale était possible. Les délégués arabes, et en particulier M. Farès Boueiz, chargé par ses collègues à Beyrouth d’assurer la coordination entre eux et les Européens, vont s’efforcer malgré tout d’introduire un peu, dans cette curieuse conférence, le problème du blocage par Israël du processus de paix. Dans le cadre des trois volets de discussion prévus, relatifs respectivement au politique, à l’économique et au culturel, le chef de la diplomatie libanaise fera valoir qu’on ne peut pas, comme cherchent à le faire certains Européens et comme le veut Israël, dissocier le processus de Barcelone de celui de Madrid. Il soulignera qu’on ne peut envisager de conclure, dans le cadre du partenariat euroméditerranéen, des accords politiques, économiques, culturels et de sécurité alors qu’Israël continue d’occuper des terres arabes et de se refuser non seulement à appliquer les résolutions de l’ONU, mais aussi d’honorer les accords qui il a lui-même signés. Avant même l’ouverture officielle de la conférence, M. Boueiz a soutenu cette thèse au cours de ses entretiens en tête à tête successivement avec le sous-secrétaire d’Etat au Foreign Office, Derek Plumbly, le vice-président de la Commission européenne, Manuel Marin, et, enfin, avec Robin Cook lui-même. Palerme sera en définitive une rencontre de mi-parcours entre celle de Malte et celle prévue en 1999 à Stuttgart. Elle permettra tout juste un simple échange de vues, mais ne débouchera sur rien de concret. Robin Cook pourrait, en clôture des réunions, donner lecture d’un bref communiqué relatif aux délibérations. Il pourrait tenir cette rencontre avec la presse, conjointement avec Farès Boueiz. Au cours de la première séance de travail, qui s’est tenue à partir de 19h30 heure de Beyrouth, les débats ont tourné principalement autour du point de savoir si l’on pouvait dissocier le processus de paix de Barcelone de celui de Madrid. Contrairement à ce qui s’était passé à la conférence de Malte, le lien entre les deux processus a été plus facilement admis, peut-être parce que la conférence de Palerme revêt un caractère «informel», alors que celle de Malte était officielle. La complémentarité entre le processus de paix et le partenariat euroméditerranéen a été soulignée tout particulièrement par le chef de la diplomatie libanaise. Le ministre italien des Affaires étrangères, Lamberto Dini, a reconnu les répercussions d’un processus sur l’autre, mais a mis en relief le fait qu’il fallait poursuivre le dialogue. M. Boueiz a pris la parole à deux reprises, la première fois au nom du groupe arabe et la seconde au nom du Liban. Dans sa première intervention, il a souhaité l’admission de la Libye au sein du partenariat euroméditerranéen dont elle est exclue jusqu’à présent en raison de l’affaire de Lockerbie. Il a demandé également que le secrétariat de la Ligue arabe soit représenté aux réunions à l’instar des organisations de l’Union européenne. Tout en soulignant que le groupe arabe n’entendait pas aborder la conférence dans un esprit pessimiste, il a fait valoir que sur les deux points qui intéressent l’Europe, la sécurité et l’immigration, il était difficile d’enregistrer des progrès en raison de la politique israélienne hostile à la paix. Il a cité en exemple l’affaire de l’aéroport de Gaza financé par l’Europe et qui demeure fermé par décision des Israéliens. La sécurité, a-t-il encore dit, est liée à la politique. Ainsi, on ne peut parler de terrorisme sans prendre en considération le droit légitime des peuples à lutter pour récupérer leur territoires occupés. Egalement, il est difficile d’envisager la conclusion du pacte de sécurité et de paix prévu par le processus de Barcelone alors qu’Israël continue à occuper des territoires arabes et refuse d’appliquer les résolutions des Nations Unies lui ordonnant de les évacuer. Il a souligné que la paix était considérée par les Arabes comme une nécessité, mais a insisté sur le fait qu’il ne pouvait y avoir de paix que globale car le conflit oppose les Arabes en tant que tels à Israël et non pas les pays arabes pris séparément. Il a fait observer qu’il ne pouvait y avoir de paix et de sécurité si les droits arabes n’étaient pas intégralement respectés par Israël. Abordant la position des Etats-Unis, découragés par l’intransigeance d’Israël, il a appelé l’Europe à jouer un rôle plus dynamique, faisant valoir qu’elle était plus libre de ses mouvements. Il a réitéré la volonté des Arabes de reprendre les négociations avec Israël à partir du point ou elles s’étaient arrêtées à Wye Plantation. M. Boueiz a refusé, cependant, que les négociations reprennent dans un cadre différent des principes posés à la conférence de Madrid. Répondant au délégué israélien, qui avait affirmé que, pour son pays, la sécurité était primordiale et reproché aux Arabes de ne pas définir leur conception de la paix, M. Boueiz a insisté sur le fait que la paix devait reposer sur les principes de Madrid, ajoutant que la sécurité découlait de la paix et non l’inverse, comme le soutient Israël. Le délégué de l’Etat hébreu ayant également soulevé le cas du Hezbollah au Liban, M. Boueiz a rappelé le droit de la résistance à lutter pour récupérer les territoires occupés. A son tour, il a accusé Israël de suivre une politique de violence et de terrorisme en détenant ce qu’il a appelé des «otages libanais dans des camps militaires sans jugements et en violation de toutes les conventions internationales». Il affirme qu’Israël vide le concept de la paix de tout son contenu par la politique de violence et de terreur qu’il pratique. Le ministre libanais a rappelé que l’Etat hébreu refuse d’appliquer les accords d’Oslo, alors même que ceux-ci sont critiqués par les Arabes qui les trouvent insuffisants. Il a fait observer que Tel-Aviv applique la même politique au sujet de la résolution 425 cherchant à la vider de son contenu avant de l’appliquer. La conférence prendra fin aujourd’hui jeudi après deux nouvelles séances de travail.

Sous l’impulsion de la Grande-Bretagne, qui assure la présidence tournante de l’Union européenne et croit si peu à l’Europe politique, la conférence euroméditerranéenne de Palerme a des ambitions particulièrement limitées. C’est ainsi qu’elle ne comporte ni ordre du jour ni document de travail écrits. De surcroît, les ministres et délégués qui prennent la parole...