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Actualités - CHRONOLOGIE

Une économie en faillite

Le président Suharto a finalement été poussé au départ par la faillite d’une économie qu’il avait mis 32 ans à développer et le ressentiment face à l’enrichissement considérable des membres de sa famille grâce au boom. Ironie du sort, l’économie, qui aurait dû être la plus grande réalisation portée à l’actif de ce bilan après deux décennies de forte croissance, est devenue la cause essentielle de sa chute. La crise financière qui a commencé en juillet en Asie avec des attaques spéculatives contre la roupie a débouché sur un désastre politique qui a mis fin au règne musclé du vétéran des dirigeants asiatiques sur ce pays de 200 millions d’habitants. Le «père du développement» avait sorti l’Indonésie du sous-développement pour lui apporter un boom économique avec un taux de croissance annuel d’au moins 6% depuis les années 70 et jusqu’à l’année dernière. Le PIB est passé de 50 dollars par tête, quand le général Suharto est arrivé au pouvoir en 1965-66, à environ 1.000 dollars avant le déclenchement de la tourmente en Asie. La proportion d’Indonésiens dans la pauvreté avait fortement reculé pendant les années Suharto et la politique économique avait été donnée en exemple en Occident aux pays en voie de développement. Cette politique s’était notamment appuyée sur la diversification: le pétrole et le gaz n’étaient plus la seule priorité et le pays s’ouvrait sur la production manufacturière et les textiles. En 1984, le pays est devenu autosuffisant en riz après avoir été pendant des décennies le plus gros importateur mondial de ce produit alimentaire de base. De tels succès ont permis de cantonner au second plan le ressentiment des gens ordinaires devant les intérêts grandissants accumulés par la famille Suharto dans les banques, la grande distribution, l’aéronautique ou le transport maritime. Ses enfants contrôlent des centaines de compagnies et la fortune du clan est estimée au total à près de 40 milliards de dollars. Des excès Mais quelques mois auront suffi pour que les succès économiques ne se transforment en désastre. Et les excès commis par la famille Suharto ont catalysé l’exaspération populaire. L’effondrement de la roupie, qui a perdu 80% de sa valeur depuis juillet dernier, a aussi mis en évidence les faiblesses de l’économie indonésienne et poussé Djakarta à demander un plan de sauvetage international de 40 milliards de dollars. Ce plan exige en contrepartie des réformes douloureuses, y compris le démantèlement des monopoles et des cartels — dont de nombreux sont contrôlés par la famille ou les associés de M. Suharto — et la fin des pratiques commerciales douteuses. L’engagement du président Suharto vis-à-vis de ces réformes a été ambigu, et les marchés financiers n’ont pas accordé de répit à son gouvernement en dépit de trois accords passés avec le Fonds monétaire international (FMI). Le gouvernement a toutefois voulu montrer la réalité de son engagement en faveur des réformes en début du mois en levant les subventions dans le secteur énergétique. Cette mesure, qui a entraîné une flambée brutale des prix, a déclenché des violences et des pillages qui ont fait plus de 500 morts et précipité la chute du président. Le dirigeant de 76 ans laisse aussi derrière lui un secteur privé endetté à hauteur de 80 milliards de dollars et une économie en récession cette année. Les négociations sur le rééchelonnement de la dette prévues à partir de 26 mai à Francfort ont été reportées. «Nous aurons besoin de faire une grande réévaluation de la situation quand les choses se calmeront», a expliqué cette semaine à l’AFP Dennis de Tray, représentant de la Banque mondiale en Indonésie. L’agence américaine Standard and Poor’s a estimé que la crise politique en Indonésie avait éclipsé «les récents progrès d’une stabilisation macroéconomique». «Même avec un changement en douceur du régime, les incertitudes politiques pourraient persister (...) entravant les efforts économiques d’un nouveau gouvernement», a averti l’agence. (AFP)
Le président Suharto a finalement été poussé au départ par la faillite d’une économie qu’il avait mis 32 ans à développer et le ressentiment face à l’enrichissement considérable des membres de sa famille grâce au boom. Ironie du sort, l’économie, qui aurait dû être la plus grande réalisation portée à l’actif de ce bilan après deux décennies de forte croissance, est...