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Actualités - CHRONOLOGIE

Afrique du sud - Une milice veut revenir aux châtiments corporels La croisade contre le crime ... à coups de fouet

Montle Magolego a fait de sa vie une croisade contre le crime: à 54 ans, ce commerçant noir aux airs bonhommes préside une milice de 35 000 volontaires décidés comme lui à «guérir l’Afrique du Sud à coups de fouet». En Sepedi, une des neuf langues africaines du pays, le nom de son organisation «Mapogo A Mhatamaga» résume son programme: «si tu agis comme un fauve, ta victime répondra comme un fauve». En anglais, le groupe a plus sobrement été baptisé «Business Shield» —le bouclier des affaires. «Mapogo A Mhatamaga» s’inscrit dans la tradition sud-africaine des «tribunaux populaires» — la communauté juge et punit les siens sans en référer à la justice — perpétrée sous l’apartheid par un système indifférent à la délinquance dans les quartiers noirs. «Nous retrouvons les criminels et nous leur apprenons à ne pas recommencer», explique M. Magolego. Début décembre, le comité local de Groblersdal, une bourgade du Nord-Est, s’est saisi d’un vol d’ordinateur dans un centre médical: le casseur a été identifié, fouetté jusqu’à l’aveu, puis livré à la police. Pour une fois, l’affaire a eu des échos dans la presse nationale: le voleur était blanc, il a déposé plainte; ses justiciers, trois volontaires noirs, ont été inculpés pour agression. Comme eux, une cinquantaine de membres de «Mapogo A Mhatamaga» doivent être jugés pour les violences allant jusqu’au meurtre, commises au nom de la lutte anticrime. «Le gouvernement protège les criminels, notre économie est au bord du gouffre», fulmine le président de «Mapogo A Mhatamaga». Pour lui, le seul moyen de sauver le pays est de revenir aux châtiments corporels qui permettent de «purifier la chair». «Les détenus coûtent 75 rands par jour (environ 12 dollars), le pays dépense des sommes folles pour eux et cela ne génère que l’exclusion. Notre solution coûte 20 rands (environ 3 dollars) à l’achat: le fouet guérira l’Afrique du Sud», assure-t-il. Les Blancs séduits Fondée en août 1996 dans la bourgade de Nebo (Province du Nord), son organisation n’a depuis cessé de s’étendre et revendique aujourd’hui 80 comités locaux à travers le pays. Les deux dernières branches ont été inaugurées à Ventersdorp, bastion de l’extrême droite blanche, puis à Moletsi, une cité noire en banlieue de Pietersburg. Car le discours et la méthode de «Mapogo A Mhatamaga» conquièrent autant les Noirs des ghettos urbains que les fermiers blancs, dans ce pays classé comme un des plus violents au monde où la criminalité galopante exacerbe les peurs, où les compagnies de sécurité prolifèrent et où les partisans de la peine capitale crient plus fort chaque jour. À quelques mois des prochaines élections générales, plusieurs partis politiques ont pris des contacts: l’extrême gauche noire du Congrès Pan-Africain, le Mouvement démocratique Uni (UDM) et le Parti National (au pouvoir avant 1994). Mais M. Magolego se réserve: il n’exclue pas, «plus tard», de créer son propre mouvement politique «pour mieux faire entendre sa voix». Déjà, il use avec talent de ses dons d’orateur. Et pour mieux impressionner les foules, apparaît en grand uniforme pour ses interventions publiques —tunique noire à col droit, épaulette à franges dorées, revers doublés en imprimé zèbre. Ses militants, eux, opèrent en civil. L’organisation ne fonctionne pas comme une compagnie de sécurité mais comme une association civique: pour adhérer, il faut verser une cotisation annuelle — allant de 50 rands pour les chômeurs à 5 000 rands pour les entreprises — et œuvrer au quotidien pour le maintien de l’ordre. Chaque comité local définit ses objectifs en réunion hebdomadaire. En cas de démêlés avec les autorités, l’organisation paye les cautions judiciaires et assure les frais de défense. Ces derniers mois, les autorités se sont plusieurs fois inquiétées des méthodes violentes de «Mapogo A Mhatamaga», et plus généralement des groupes d’autodéfense qui prétendent prendre la loi entre leurs mains. Mais leurs avertissements restent sans grand effet, alors que le ministre de la Justice (ANC) Dullah Omar se prononce lui-même régulièrement pour la légalisation des «tribunaux populaires» — dans le cadre d’une réforme plus globale destinée à soulager le système judiciaire des affaires de petite délinquance.
Montle Magolego a fait de sa vie une croisade contre le crime: à 54 ans, ce commerçant noir aux airs bonhommes préside une milice de 35 000 volontaires décidés comme lui à «guérir l’Afrique du Sud à coups de fouet». En Sepedi, une des neuf langues africaines du pays, le nom de son organisation «Mapogo A Mhatamaga» résume son programme: «si tu agis comme un fauve, ta...