Actualités - CHRONOLOGIE
Des Farès sans Pandanus
le 24 avril 1998 à 00h00
L’un des symboles du tourisme en Polynésie française, le toit des bungalows («farès») tressé en feuilles de pandanus, est aujourd’hui menacé de disparition, victime de son succès. Ce matériau, à l’origine bon marché, est devenu un produit de luxe, cher, à courte durée de vie et trop rare pour répondre à la demande. A terme, cette feuille naturelle menace de disparaître au profit des couvertures en matériaux synthétiques. Le pandanus est sans doute, avec le cocotier, la plante la plus typique des atolls et des îles de Polynésie française. Il y a longtemps qu’on ne mange plus son gros fruit rond, réservé dans les temps anciens aux périodes de disette. Mais deux îles, Maiao et Moorea, ont développé de manière systématique cette ressource naturelle depuis plusieurs décennies. Les longues feuilles séchées de cet arbuste de bord de mer aux racines aériennes – Pandanus tectorius de son nom latin, «fara» en tahitien – ont toujours été récoltées à terre, une fois tombées des branches. Elles sont alors sommairement tressées et permettent de fabriquer des éléments de toiture plus résistants et plus protecteurs que les palmes des cocotiers. Un toit de pandanus a une durée de vie de sept ans, selon les tresseurs, et de cinq pour les hôteliers, qui n’attendent pas les premières fuites pour les changer. Le cocotier ne dure lui que deux à trois ans en moyenne. Or le développement de l’hôtellerie en Polynésie française est aujourd’hui tel que les sources de pandanus, qui n’ont pas été épargnées par une saison chaude et cyclonique intense – conséquence d’El Nino – se tarissent petit à petit ou, du moins, ne peuvent plus satisfaire la demande. Pour hôtels Conséquence première sur l’offre, les prix des paquets de pandanus se sont envolés pour passer en deux ans de 25 dollars environ à 30 ou même 35 dollars aujourd’hui, faisant du pandanus une couverture de luxe. De plus, sa qualité – et donc sa durée de vie – baisse, car les tresseurs sont obligés d’aller beaucoup plus vite qu’en temps ordinaire. «Aujourd’hui», constate un négociant, «il n’y a plus que les hôtels qui soient assez riches pour pouvoir se payer des toits en fibres naturelles mais, le problème, c’est qu’on n’arrive pas à respecter les délais de livraison». De plus en plus d’hôteliers se tournent, faute de mieux, vers des revêtements synthétiques. Il est vrai que l’offre est très limitée. Une seule île, Maiao, produit de manière régulière et conséquente du pandanus. 12.000 à 15.000 paquets par an sont récupérés au rythme d’un millier environ par mois et par baleinière, l’île n’ayant ni port ni passe dans son récif de corail. A une vingtaine de kilomètres de Tahiti, Moorea, plus touristique, en produit elle aussi mais en quantité moindre. Il faudrait, dans d’autres îles, convertir une partie des terres et de leurs habitants à la culture du pandanus. Malheureusement, il faut plusieurs années pour que cet arbre «sauvage» soit rentable et personne n’est aujourd’hui tenté par une aventure qui ne serait bénéfique que sur le long terme. Les hôteliers notent qu’il leur faut 120 à 150 paquets par bungalow, l’équivalent de 3.500 à 5.000 dollars environ. S’ajoute ensuite la pose, longue et minutieuse. A terme, c’est tout le cachet, sinon des villages polynésiens – qui ont adopté la tôle depuis longtemps, du moins des complexes hôteliers, qui pourrait être remis en cause. «C’est comme si l’on voulait changer l’image de marque du paradis terrestre», observe un hôtelier. «Les touristes viennent en partie en Polynésie française, à Bora Bora notamment, pour vivre dans ce style mariant aux pilotis, au-dessus des lagons turquoise, le luxe des installations et la rusticité exotique de la toiture», poursuit-il. Les prix sont souvent compris entre 400 et 700 dollars la nuit. (Reuters).
L’un des symboles du tourisme en Polynésie française, le toit des bungalows («farès») tressé en feuilles de pandanus, est aujourd’hui menacé de disparition, victime de son succès. Ce matériau, à l’origine bon marché, est devenu un produit de luxe, cher, à courte durée de vie et trop rare pour répondre à la demande. A terme, cette feuille naturelle menace de disparaître au profit des couvertures en matériaux synthétiques. Le pandanus est sans doute, avec le cocotier, la plante la plus typique des atolls et des îles de Polynésie française. Il y a longtemps qu’on ne mange plus son gros fruit rond, réservé dans les temps anciens aux périodes de disette. Mais deux îles, Maiao et Moorea, ont développé de manière systématique cette ressource naturelle depuis plusieurs décennies. Les longues feuilles...