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Actualités - ANALYSE

Plaidoyer haririen pour le gel des dossiers litigieux

Le président Rafic Hariri se dit aujourd’hui partisan du gel de toute question litigieuse. Une vieille recette, un peu trop utilisée et qui explique en partie pourquoi le Liban, faute d’avancer, ne cesse de reculer. Ainsi le chef du gouvernement veut renvoyer aux calendes grecques, sous prétexte que le sacro-saint consensus fait défaut, le traitement de sujets cruciaux comme la loi électorale, le code des statuts personnels, les révisions constitutionnelles, la loi des naturalisations ainsi que la mise sur pied d’un comité national pour l’abolition du confessionnalisme politique. Il estime qu’il vaut mieux laisser le soin de régler tous ces problèmes au prochain régime… dont il espère bien être le parrain indéboulonnable. Là où il marque certainement un point c’est quand il note que le temps qui reste d’ici la fin du mandat Hraoui, qui expire en novembre prochain, n’est pas suffisant pour ouvrir des dossiers aussi lourds, d’autant qu’il faut également s’occuper en mai des municipales… M. Hariri n’a peut-être pas tort non plus quand il relève que les débats sur de telles questions ne pourraient qu’envenimer un climat politique déjà chargé jusqu’à la gueule par les tensions que les présidentielles suscitent et qui risquent d’aller crescendo. Mais M. Hariri, soulignent ses contempteurs, fait de l’amalgame. A leur avis il n’y a pas de raison pour qu’on mette toutes les questions précitées dans le même sac «et si la loi électorale peut attendre un peu, pourquoi voudrait-on passer à la trappe la formation du comité national pour l’abolition du confessionnalisme politique?» s’étonne l’un d’eux. A quoi le président du Conseil répond en remarquant que la mise sur pied d’une telle instance se heurterait, pour le moment, dans la foulée du tollé contre le projet de mariage civil, à une levée de boucliers similaire de la part des autorités religieuses du pays chrétiennes et musulmanes. Il ajoute, qu’à son avis, on aurait mieux fait de l’écouter quand il mettait en garde contre une présentation inopportune, en Conseil des ministres, du projet de loi sur le mariage civil, à preuve que cette initiative présidentielle a provoqué une tempête dont le pays se serait volontiers passé. On sait que lors de la fameuse séance du Conseil, le président de la République avait insisté pour qu’il y ait vote, soulignant que le texte se trouvait entre les mains des ministres depuis plusieurs semaines et que dès lors le fait qu’ils n’avaient pas exprimé de remarques signifiait qu’ils l’approuvaient. En d’autres termes: qui ne dit mot consent… Aussitôt après, un premier vote sur une motion proposant qu’on ajourne le débat a été rejetée. Puis le ministre de la Justice, M. Bahige Tabbarah, qui devait voter contre, a fait un long exposé émaillé d’observations critiques. Ce qui a incité le chef de l’Etat à prier les ministres, par esprit démocratique, à remettre leurs remarques s’ils en ont au secrétariat général de la présidence du Conseil pour qu’elles soient transmises à la Chambre en même temps que le projet de loi. Un mécanisme tout à fait inhabituel critiqué par les députés qui rappellent que «la Chambre se saisit d’un projet de loi portant le sceau de l’Exécutif et pas de remarques en marge qui n’ont rien d’officiel». Rebondissant sur un tel avis, le président Hariri et ses partisans au sein du Cabinet affirment que les remarques ministérielles doivent être nécessairement rajoutées au texte de loi qui pourrait s’en trouver modifié, ce qui implique forcément un deuxième débat en Conseil. A l’issue duquel un nouveau vote aurait lieu et s’il y a approbation par une majorité des deux tiers, les membres du Cabinet concernés seraient tenus de contresigner le projet, alors qu’ils ne s’y sentent pas obligés tant que la mouture finale n’a pas été mise au point. Des arguments que les hraouistes réfutent par les points suivants: 1) Les remarques officieuses des ministres peuvent parfaitement être transmises à la Chambre puisque tout aussi officieusement celle-ci étudie tout d’abord tout projet de loi en commissions, lesquelles commissions disposeraient ainsi d’une batterie plus large d’avis pour opérer leur examen. 2) La transmission de ces remarques à l’Assemblée dispense l’Exécutif d’un deuxième débat sur une question déjà tranchée. 3) S’il devait y avoir quand même nouvelle discussion, à titre d’échanges de vues, elle ne saurait en aucun cas être suivie d’un second vote puisqu’il y a chose jugée et décision prise sur le fond comme dans la forme. Toujours est-il que le président du Conseil invoque presque pour sa part le cas de force majeure pour expliquer pourquoi il n’entend pas parapher le projet de loi aux fins de transmission à l’Assemblée. Il se demande en effet en substance «ce qui se serait produit si j’avais signé, dans un climat politico-religieux aussi tendu, les retombées pouvant fort bien se situer au niveau d’une agitation de rue, de manifestations rendant impossible le recours aux institutions constitutionnelles. Et si cela devait être (entendre si le projet pouvait être débattu à la Chambre), la pression populaire influerait sur les décisions qui devraient être prises…» Ce serait donc en quelque sorte pour laisser au mariage civil toutes ses chances que le président du Conseil refuse d’y adhérer! A cette nuance près que la «pression populaire» évoquée, présumée hostile au projet, n’est jamais que celle qui se déploie aux alentours des instances religieuses, alors que Baabda soutient que 80% des Libanais sont favorables au mariage civil facultatif, ce que les témoignages in vivo recueillis par les médias auprès de la population semblent plus ou moins confirmer. Cependant les haririens — pour qui toute l’opération vise la stature de leur chef —, reprennent à leur compte une maxime que Riad Solh et Hamid Frangié se plaisaient à répéter: mieux vaut un mauvais arrangement entre Libanais qu’un bon procès. Quoi qu’il en soit, même s’il n’en a pas constitutionnellement le droit, le président du Conseil peut fort bien ne pas signer le projet de loi car il n’y a ni délai ni sanction en cas de dérobade…
Le président Rafic Hariri se dit aujourd’hui partisan du gel de toute question litigieuse. Une vieille recette, un peu trop utilisée et qui explique en partie pourquoi le Liban, faute d’avancer, ne cesse de reculer. Ainsi le chef du gouvernement veut renvoyer aux calendes grecques, sous prétexte que le sacro-saint consensus fait défaut, le traitement de sujets cruciaux comme la...