Le modèle perdu de la jeunesse

Bill Clinton a menti, il a trompé sa femme et ses amis sur ses frasques avec Monica Lewinsky: le président est tombé de son piédestal pour une jeunesse américaine très au fait de la sexualité mais pour laquelle la tricherie n’est pas morale, notent experts, parents et enfants U.S. Cette affaire a créé «une énorme déception chez les enfants et les adolescents», souligne au lendemain des aveux présidentiels le Dr Paramjit Joshi, directrice du service de psychiatrie pour les jeunes aux Instituts Johns Hopkins de Baltimore (Maryland). En effet, a-t-elle rappelé au cours d’un entretien téléphonique, le président, comme certains vedettes de cinéma ou du sport, sert de «modèle» à ces jeunes qui «portent leur regard sur ces personnes et copient leurs attitudes». Lundi soir, leurs programmes favoris, y compris un match de football américain, ont été coupés: le président est apparu sur les écrans pour avouer: «J’ai trompé le public, y compris ma femme». Depuis des mois, la jeunesse américaine voit s’étaler dans toute la presse, avec force détails, les révélations sur les affaires sexuelles qui auraient lié Bill Clinton et des femmes comme Paula Jones, Monica Lewinsky ou autre Kathleen Willey. Mais la sexualité en elle-même ne les choque pas outre mesure: les derniers sondages officiels indiquent que 48,4% des élèves de 14 à 18 ans ont déjà eu une relation sexuelle, 16% ayant même eu au moins quatre partenaires. Chez les Noirs, 81% des garçons de cette tranche d’âge et 67% des filles étaient sexuellement actifs en 1995. Une sexualité commencée en moyenne à l’âge de 16 ans et demi et même, dans certains Etats, avant 13 ans pour environ 20% d’entre eux, soulignent les Centres de prévention et de contrôle des maladies (CDC) d’Atlanta (Georgie). Le Dr Joshi note qu’en revanche les jeunes ont mal accepté que le président ait menti: «C’est une question de confiance», leurs «fondations ont été ébranlées», déclare-t-elle. Une jeune fille de 15 ans ayant requis l’anonymat estime que la conduite de Clinton «n’était pas convenable du tout» et que le fait qu’il ait menti «rendait l’affaire encore pire». A l’adolescence, note le Dr Joshi, les filles «se sentent vulnérables». Celles qu’elle a reçues en consultation se sont notamment déclarées désolées pour la fille du président, Chelsea, 18 ans. Elle conseille d’ailleurs aux parents d’être «ouverts» avec leurs enfants sur cette affaire. Selon elle, «il ne faut pas leur dire: Tu es un enfant et tu ne peux pas comprendre».(AFP)