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Actualités - REPORTAGE

L'avenir demeure aléatoire, malgré l'arrangement conclu

BAGDAD, de notre envoyé spécial Paul KHALIFEH Succès personnel pour M. Kofi Annan, «victoire pour l’Irak», comme l’ont présenté hier les médias irakiens, l’accord écrit signé entre le secrétaire général de l’ONU et le vice-premier ministre, M. Tarek Aziz fait certainement baisser la tension dans la région, mais ne résoud pas le problème. Avant même le début de la mission du chef de l’ONU à Bagdad, les Etats-Unis s’étaient réservé le droit de rejeter tout accord qui ne serait pas conforme aux résolutions des Nations Unies et à leur «intérêt national». Pour ce qui est du premier point, M. Annan a assuré que le texte signé avec le gouvernement irakien «élimine un obstacle majeur devant l’application des résolutions de l’ONU». Concernant le second point, seul le président Bill Clinton et une poignée de ses adjoints peuvent exactement expliquer ce que signifie l’expression «intérêt national» des Etats-Unis. Il faut donc laisser une place, même minime, au doute, bien que M. Annan ait qualifié l’accord d’«acceptable» et M. Aziz d’«équilibré». Rien n’a filtré sur les détails de l’accord, à part les rares précisions données par ses deux signatures au cours d’une conférence de presse conjointe organisée au ministère de la Culture et de l’Information. Un mur de silence infranchissable s’est élevé entre les membres de la délégation onusienne et les journalistes. Les Irakiens aussi n’étaient pas loquaces. M. Annan a cependant précisé un point qui prouve que l’Irak a fait preuve d’une grande flexibilité. Il a dit que, «de façon catégorique, l’accord ne prévoit aucune date limite, ni aucun délai» pour l’inspection des huit sites présidentiels, ce qui implique que l’Irak a finalement accepté de revenir sur le délai de deux mois qu’il accordait aux inspecteurs internationaux. Le secrétaire général de l’ONU a toutefois ajouté: «...cela dit, je pense qu’il serait important d’essayer de faire de notre mieux pour achever le travail au cours d’une période raisonnable». Il est donc probable que l’accord signé insiste sur la nécessité d’accélérer les inspections des sites présidentiels sans fixer de délai. Lakhdar Ibrahimi coordinateur Aucun changement ne devrait intervenir dans la composition de l’UNSCOM, la commission de l’ONU chargée du démantèlement de l’arsenal d’armes de destruction massive irakien. Elle restera présidée par l’Australien Richard Buttler, et certains de ses membres que l’Irak accusait d’être «partiaux» resteront en place. Seul fait nouveau, la commission sera accompagnée lors de l’inspection des sites présidentiels de diplomates des cinq pays membres permanents du Conseil de Sécurité. Il s’agit du compromis proposé par la France et que l’Irak aurait finalement accepté. L’idée d’un «super chef» de l’UNSCOM aurait été abandonnée. Mais selon une information non confirmée, M. Lakhdar Ibrahimi, adjoint du secrétaire général de l’ONU, serait le coordinateur des diplomates qui accompagneront la commission du désarmement. M. Ibrahimi a d’ailleurs activement participé aux négociations, ainsi qu’à la longue discussion entre MM. Hussein et Annan. Des détails portant sur la tenue des inspecteurs de l’UNSCOM lors des visites des sites présidentiels ont également été réglés. En marge de la question de l’inspection des sites présidentiels, M. Annan s’est aussi entretenu avec les responsables irakiens de l’accord pétrole contre nourriture, dont le volume a été porté de 2 milliards de dollars à 5,2 milliards tous les six mois. Avant son départ de Bagdad, le secrétaire général a évoqué ce dossier avec le vice-président irakien, M. Taha Yassine Ramadan. Après le versement des indemnités au Koweit et le paiement des salaires des employés de l’UNSCOM, l’Irak ne percevait que 53% des deux milliards de dollars, soit un peu plus qu’un milliard. C’est-à-dire 8 dollars par Irakien. tous les mois. Cette somme va passer à 20 dollars, maintenant que Bagdad est autorisé à exporter pour 5,2 milliards de dollars par semestre. Selon des sources non officielles, les responsables irakiens auraient réclamé l’élargissement de l’accord pétrole contre nourriture pour permettre au pays d’importer des pièces de rechange pour les usines de l’industrie alimentaire. M. Annan a promis de s’atteler à cette tâche. L’objectif de l’Irak Si la crise actuelle se termine à ce stade (c’est-à-dire si l’attaque américaine est évitée), l’Irak aura enregistré un petit point. Il aura en effet réussi à gagner la sympathie de l’opinion et de certains gouvernements arabes et occidentaux et à rappeler au monde que 20 millions de personnes subissent depuis sept ans une punition collective. C’était peut-être le principal objectif du gouvernement irakien, comme l’a laissé entendre M. Aziz. «L’Irak a accompli une importante réalisation, celle d’avoir eu l’occasion d’exposer sa cause devant le monde entier», a déclaré le vice-premier ministre. La crise est peut-être passée... jusqu’à la prochaine. Parce qu’on s’imagine bien que l’enjeu dépasse de loin l’inspection de huit sites présidentiels. C’est des immenses richesses pétrolières et gazières enfouies dans le sol de l’Irak qu’il s’agit. Tant que le partage du butin n’aura pas eu lieu, le peuple irakien ne trouvera pas la paix. «Nous ne sommes pas en conflit avec l’ONU, mais avec les Etats-Unis qui veulent imposer leur volonté aux Nations Unies et à l’Irak. Cela, nous ne l’accepterons pas», a déclaré M. Aziz. Pour l’instant, l’Irak tient bon. Mais jusqu’à quand? Personne ne le sait. P. KH.
BAGDAD, de notre envoyé spécial Paul KHALIFEH Succès personnel pour M. Kofi Annan, «victoire pour l’Irak», comme l’ont présenté hier les médias irakiens, l’accord écrit signé entre le secrétaire général de l’ONU et le vice-premier ministre, M. Tarek Aziz fait certainement baisser la tension dans la région, mais ne résoud pas le problème. Avant même le début...