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Actualités - CHRONOLOGIE

Ambitieux projet de développement des régions déshéritées Un nouveau casse-tête pour l'Etat : où trouver mille milliards de livres ?

Ce sont deux grands dossiers que le Conseil des ministres vient d’ouvrir, en déférant l’affaire Toufayli devant la Cour de justice et en décidant d’un plan de près de mille milliards de livres libanaises (991 milliards précisément, soit 648 millions de dollars environ), pour développer les régions déshéritées. . La décision de faire comparaître cheikh Sobhi Toufayli et ses partisans armés devant la Cour de justice constitue un choc en soi, dans la mesure où l’ancien secrétaire général du Hezbollah constitue une figure mythique de la guerre, à laquelle sont liées des actions comme les spectaculaires attentats contre le QG des «Marines» et le poste français «Drakkar», ou les prises d’otages occidentaux. La décision sème, à n’en pas douter, le trouble au sein de la communauté chiite. Elle a été contestée par les trois ministres proches ou affiliés au mouvement Amal présidé par M. Nabih Berry. Il y a eu «précipitation», a jugé M. Mahmoud Abou Hamdane, qui a privilégié la dimension politique du mouvement de cheikh Sobhi Toufayli, tout en soulignant que le côté proprement judiciaire était en cours d’examen et qu’on aurait pu agir plus graduellement. Le fait est que la décision de traduire l’affaire Toufayli devant la Cour de justice a été prise par le président de la République, M. Elias Hraoui, sans la consultation préalable de M. Berry, ni même du président du Conseil, M. Rafic Hariri, qui n’en a été informé que durant la réunion de concertation traditionnelle précédant le Conseil des ministres. Pour sa part, M. Hraoui a jugé que les incidents du 30 janvier constituent une «atteinte à la sécurité de l’Etat» et a rappelé que lorsqu’il y a un mois, il avait déclaré qu’il ne permettrait pas «qu’il y ait un Toufayli par ci et un autre par là», personne n’avait pesé le sérieux de ses propos, qui prennent aujourd’hui toute leur portée. Le chef de l’Etat a considéré en outre qu’une «chance d’amendement» a été accordée à cheikh Sobhi Toufayli, par le biais du déploiement de l’armée, mais que cette offre a été rejetée, quand le chef de la «révolte des affamés» avait fixé au 8 février la date de la relance de son mouvement de contestation, sachant bien que la tâche spéciale de maintien de l’ordre confiée à l’armée expirait le 11 février à minuit. Il reste que, selon des sources politiques informées, les divergences sur la question entre MM. Hraoui et Berry ne doivent pas être exagérées, comme certains l’ont fait. Des commentateurs ont en effet évoqué la possibilité d’une démission des ministres pro-Amal du gouvernement. Ces velléités ont été démenties par les cercles concernés. Où trouver l’argent? L’autre grand dossier ouvert par le Conseil des ministres est celui du développement des régions déshéritées, ou plus objectivement «sous-développées». En avançant le chiffre de mille milliards de livres, pour le développement de ces régions, le chef du gouvernement s’est fixé un objectif très ambitieux, pour lequel il n’existe, pour le moment, aucune source de financement. Et la crainte immédiate que l’on peut légitimement avoir, c’est que cela ne signifie de nouvelles taxes, à plus ou moins brève échéance. C’est ce qu’estiment les cercles proches d’Amal, pour lesquels cette proposition est une manière de remettre sur le tapis le projet d’emprunt de 800 millions de dollars que le chef du gouvernement défendait voici quelques mois et dont le remboursement devait se faire grâce à une augmentation du prix de l’essence. Fait sans précédent, ce projet avait été rejeté par le gouvernement. Selon le mouvement Amal, nous sommes en présence, aujourd’hui, d’une proposition similaire, formulée autrement. Le plan de développement a soulevé par ailleurs, dans les mêmes milieux, un autre genre de réactions. Jugé inaccessible, dans l’état actuel des finances publiques, ce projet est susceptible de compromettre le projet de 150 milliards de L.L. pour le développement de la région de Baalbeck-Hermel, approuvé par le gouvernement et qui a déjà fait l’objet d’une loi, a-t-on estimé. Pour le mouvement Amal, le début d’exécution de projets de développement dans la région de Baalbeck-Hermel ne doit pas attendre la concrétisation du projet des 1.000 milliards. C’est ce qu’a affirmé en particulier l’imam Mohammed Mehdi Chamseddine, qui a formulé des «réserves» au sujet de la décision gouvernementale, soulignant l’urgence qu’il y a à commencer à dépenser la somme de 150 milliards de L.L., notamment pour les petits producteurs agricoles qui vivent à la saison. Malgré tous ses efforts pour dissiper le doute à ce sujet, M. Bassem el-Sabeh, qui rendait compte du Conseil des ministres, n’a pas convaincu. Il a même ajouté à la confusion en affirmant que le projet des 150 milliards «deviendra une partie» du projet plus vaste préconisé par le gouvernement, une fois que celui-ci sera mis en œuvre. Une partie de ce vague semble voulue. Pour l’Exécutif, en effet, il semble important de ne pas donner l’impression d’avoir cédé au mouvement de contestation de cheikh Toufayli, en mettant en route le plan de développement de 150 milliards de L.L. pour la région de Baalbeck-Hermel. Un plan qui, notons-le au passage, est absent du projet de budget. Ce serait, souligne-t-on, encourager la désobéissance civile dans les autres régions sous-développées. En jouant le développement global, on dissipe cette impression et, surtout, on ôte aux autres régions tout prétexte pour suivre l’exemple de cheikh Toufayli. Cet exemple avait même tenté un député du Kesrouan, M. Roucheid el-Khazen, rappelle-t-on. Ce quiproquo mis à part reste l’essentiel. Où trouvera-t-on les mille milliards de livres pour développer des régions laissées à l’abandon depuis pratiquement l’Indépendance? Et l’argent supplémentaire pour le retour des populations déplacées et pour la nouvelle échelle des salaires? Le chef de l’Etat a affirmé que le Liban doit exiger des pays arabes qui s’étaient engagés à son égard, financièrement, à tenir parole. Mais le moyen de le faire? Pour sa part, M. Hariri croit au financement interne et souhaite «placer le pays devant ses responsabilités», en mettant la «solidarité nationale» à l’épreuve. Le financement du plan de développement, affirme-t-il, doit être approuvé par tous les Libanais. Ce qui, compte tenu de la politique fiscale de M. Hariri, repose essentiellement sur la perception des «taxes faciles», comme celle de l’essence, augure de temps difficiles. Ne nous les avait-on pas annoncés?
Ce sont deux grands dossiers que le Conseil des ministres vient d’ouvrir, en déférant l’affaire Toufayli devant la Cour de justice et en décidant d’un plan de près de mille milliards de livres libanaises (991 milliards précisément, soit 648 millions de dollars environ), pour développer les régions déshéritées. . La décision de faire comparaître cheikh Sobhi Toufayli...