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Actualités - ANALYSE

Administration : le chaos imputable au gouvernement

Dans un de ces iftars qui, durant un mois, lui ont permis de s’épancher, le président du Conseil, M. Rafic Hariri, a prononcé ce plaidoyer aussi bref que définitif: — «Suis-je donc le maître du pays? Y a-t-il au Parlement un parti qui porte mon nom? Est-ce ce parti qui a élu le président de la République, le président de la Chambre ou désigné les ministres? Le gouvernement est-il libre de ses mouvements en ce qui concerne la réforme administrative et ne se trouve-t-il pas confronté à des pressions politiques de blocage que tout le monde connaît en faisant semblant de les ignorer? Ne sait-on pas que tout ce qui s’apprend ne peut pas se dire?» Commentant cette envolée, un ancien député qui se pose en juge impartial acquitte M. Hariri sur le plan du partage global des responsabilités: «Il est vrai, dit-il, que cet homme n’est pas le seul détenteur du pouvoir ni même le chef du parti de la majorité, que cela soit au sein du Parlement ou du gouvernement. On ne peut donc lui attribuer à lui seul la responsabilité des fautes commises. Quand lui ou d’autres font approuver des projets en Conseil des ministres puis à l’Assemblée, ce sont les institutions, et l’ensemble de leurs membres, qui en deviennent conjointement responsables. Une fois qu’un ministre ou un député a approuvé un projet il n’a plus le droit de le critiquer après mise en pratique, comme on voit nombre d’entre eux le faire couramment. Dans le même esprit, l’opposition, et l’opinion également, ne doivent pas réclamer des comptes à uniquement M. Hariri comme s’il était le seul chef de la majorité au pouvoir. Il faut que la responsabilité des autres pôles de décision, dont la Chambre elle-même, ne soit pas oubliée». «Ceci étant, poursuit l’ancien député, M. Rafic Hariri reste responsable du fiasco de la réforme administrative qu’il avait formellement promise. Il ne peut s’armer du prétexte des pressions politiques exercées pour l’empêcher de mener à bien une opération aussi essentielle pour le pays. Il aurait dû y faire face de toutes ses forces, quel qu’en soit le prix car il y a là une vraie priorité. Il aurait eu sans nul conteste le soutien total de la population devant qui il aurait clairement dénoncé les auteurs de telles pressions dont la finalité est de garder le Liban sous la coupe dévastatrice de la corruption, de la gabegie et de l’incompétence. Au lieu d’affirmer que «tout ne peut pas se dire», M. Hariri aurait dû au contraire avoir à cœur de tout révéler justement, s’il voulait être à la hauteur de la mission nationale qui lui incombe». Communication Relevant une autre faille, cette fois au niveau de la communication gouvernementale, l’ancien parlementaire estime que «c’est au cours des longs échanges préparatoires avec les commissions parlementaires que le chef du gouvernement en sa qualité de ministre des Finances ou son ministre délégué dans ce département auraient dû se livrer aux explications détaillées sur l’emprunt des deux milliards qu’ils n’ont développées que durant le débat devant l’Assemblée. S’il existe des commissions parlementaires, c’est bien pour que les députés comprennent bien ce que veut le gouvernement avant de discuter en séance de ses projets. Or tout le monde est arrivé au débat sur l’emprunt sans rien savoir de ce qu’est le zéro coupon, on a perdu beaucoup de temps en explications et l’amendement Hoss accepté par le gouvernement aurait pu être déjà intégré au texte s’il avait été étudié par les commissions. Au-delà de la perte de temps, il y a dans le comportement gouvernemental matière à jeter le doute sur la volonté de coopération et de transparence du Cabinet. Ce dernier fait peu de cas donc de l’opinion comme de l’Assemblée et oublie que nous sommes en principe dans un régime démocratique parlementaire. Cela se retourne d’ailleurs bien des fois contre lui: quand un député apprend par hasard l’existence d’un décret qu’on a omis de rendre public, il croit découvrir le «scandale du siècle» et pousse des cris d’orfraie qui sont reçus cinq sur cinq par une opinion très sceptique quant à un Exécutif qui lui cache tant de choses. C’est ce que l’on a vu pour l’affaire du terrain de Kraya qui n’aurait pas provoqué un tel remue-ménage à la Chambre si le gouvernement avait pris la peine d’expliquer, comme il l’a fait avec retard, que ce projet mort-né de 1996 visait à encourager la création d’une zone industrielle et non l’implantation des Palestiniens». «Mais la Chambre de son côté, juge cette source, ne réclame pas assez d’éclaircissements et ce mot s’impose quand il s’agit de l’EDL. A ce propos le ministre de tutelle, M. Elie Hobeika, a dénoncé devant le Parlement les institutions officielles qui n’acquittent pas leurs quittances d’électricité, sans les nommer et sans que les députés insistent pour qu’il le fasse. Une révélation d’autant plus nécessaire que la facture en question atteint les 35 milliards de LL, soit la coquette somme de 21 millions de dollars. Les députés n’ont pas non plus cherché à savoir pourquoi dans ces conditions le courant n’est pas coupé à ces mauvais payeurs, pour étatiques qu’ils soient, comme cela s’est vu dernièrement en Russie». Et de conclure en soulignant que «M. Hariri ne peut pas être tenu pour seul responsable des décisions entérinées par les institutions. Mais il est certainement comptable de l’action ou plutôt de l’inaction des ministères comme des ministres car il entre constitutionnellement dans son rôle de veiller à ce que les normes de rendement soient respectées. Et il semble l’oublier…» E. K.
Dans un de ces iftars qui, durant un mois, lui ont permis de s’épancher, le président du Conseil, M. Rafic Hariri, a prononcé ce plaidoyer aussi bref que définitif: — «Suis-je donc le maître du pays? Y a-t-il au Parlement un parti qui porte mon nom? Est-ce ce parti qui a élu le président de la République, le président de la Chambre ou désigné les ministres? Le...