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Actualités - ANALYSE

Baabda caresse toujours l'idée d'une révision constitutionnelle et d'une refonte des status personnels...

A dix mois de son départ de Baabda, le chef de l’Etat n’a pas l’air du tout de renoncer à ses projets. Son dernier pèlerinage à Damas en apporte une preuve confortée par l’intention qu’on lui prête de remettre sur le tapis ses propositions explosives concernant la révision constitutionnelle et l’éclatement du système des statuts personnels en vue notamment d’instituer le mariage civil… Pour quelles raisons le président de la République envisagerait-il de livrer une dernière bataille aux résultats évidemment incertains du moment que ses idées sont fermement rejetées par ses partenaires au pouvoir et par nombre d’instances religieuses du pays toutes communautés confondues? De cette question découlent d’autres interrogations: le président Elias Hraoui veut-il provoquer des remous, un remue-ménage interne simplement pour marquer de son sceau la dernière tranche de son mandat? Cherche-t-il par ses relances sinon à redorer son blason politique au niveau de la rue chrétienne du moins à ne plus s’en faire condamner et à en obtenir quitus? Veut-il que le régime suivant se retrouve avec un dossier compliqué qui l’amène, à travers la recherche d’un compromis, à lutter à son tour pour atténuer les déséquilibres qui existent entre les pouvoirs? Avant de tenter de répondre, il convient de se rappeler que M. Hraoui se proposait dès 95 de faire de la réalisation de cette double refonte institutionnelle le fleuron de son deuxième mandat présidentiel. Il ne s’agit donc pas d’un montage ponctuel à caractère tactique et ces changements l’intéressé y croit fermement. Il s’en était ouvert au président syrien lors du premier sommet qui avait suivi la prorogation. Mais comme M. Nabih Berry avait déclenché sa campagne antirévision avant cette rencontre, le président Hafez el-Assad avait conseillé à son homologue libanais de temporiser, d’attendre des circonstances plus favorables pour reprendre son projet… Difficultés Des circonstances qui ne se sont jamais présentées depuis, l’opposition aux vues de M. Hraoui restant toujours aussi vive et aussi étendue. Il n’en a pas pour autant démordu, revenant assez régulièrement sur le sujet pour indiquer que lorsqu’il aurait achevé les moutures des deux projets, il ne manquerait pas de les soumettre au Conseil des ministres. Les conditions ne sont pas plus propices maintenant, à cette différence près qu’un président en partance n’a évidemment plus grand-chose à perdre s’il lui prend l’envie de proposer ceci ou cela. Sauf que, bien entendu, il ne voudra pas indisposer Damas. Alors une autre question se pose: au cours de sa dernière rencontre avec le président Assad, M. Hraoui est-il revenu à la charge pour en obtenir le feu vert? Selon les indications officielles, les deux hommes n’auraient traité au cours de cette rencontre que de la conjoncture régionale et n’auraient pas abordé les questions intérieures. C’est bien possible, mais un peu difficile à admettre dans la mesure où la coordination en matière de politique extérieure va naturellement de soi, se trouve assurée par les canaux diplomatiques ordinaires, n’a pas grand besoin de concertations au plus haut niveau et ne requiert en tout cas qu’un temps d’horloge réduit, alors que les audiences du président Assad se distinguent toujours par leur étendue… Beaucoup d’observateurs pensent donc que M. Hraoui a fort bien pu évoquer de nouveau ses projets et peut-être recevoir le même conseil de laisser de côté toute question susceptible de provoquer une controverse intérieure, à un moment où l’unité des rangs face à Israël doit passer avant tout. Mais nonobstant l’élément syrien, un ministre estime que «le président Hraoui embarrasserait beaucoup le camp haririen s’il soumettait ses deux projets au Conseil des ministres en demandant un vote car le Cabinet apparaîtrait alors comme nettement divisé, ce qui serait d’autant plus préjudiciable à son image de marque que le clivage risque fort de prendre une coloration confessionnelle. Mais en pratique l’opération a peu de chances de réussir. En une première étape, en effet, pour que les deux projets soient inscrits à l’ordre du jour, il faut l’agrément du président du Conseil; faute de quoi, le chef de l’Etat peut certes les proposer, mais en dehors de l’ordre du jour, ce qui est un handicap institutionnel. Ensuite, il faut une majorité des deux tiers, donc pour commencer la présence de vingt ministres sur trente, ce qui est difficile à assurer quand il n’y a pas accord entre les présidents…». Une façon d’avouer que les ministres se laissent gentiment convaincre de ne pas assister au Conseil quand le défaut de quorum intéresse l’un ou l’autre des deux pôles de l’Exécutif… La même source souligne ensuite que «si d’aventure les deux projets devaient franchir le cap du Conseil, ce serait probablement pour sommeiller ensuite durablement dans les tiroirs de la Chambre où ils iraient échouer…». Il est donc très peu probable qu’ils voient le jour avant la fin du présent régime. Cependant il est encore plus probable que l’objectif n’est pas leur concrétisation rapprochée mais bien un empoignade qui pourrait déteindre longtemps sur la vie politique locale. Une façon comme une autre de laisser des traces et de se rappeler au bon souvenir des Libanais après le prochain changement de régime. E. K.
A dix mois de son départ de Baabda, le chef de l’Etat n’a pas l’air du tout de renoncer à ses projets. Son dernier pèlerinage à Damas en apporte une preuve confortée par l’intention qu’on lui prête de remettre sur le tapis ses propositions explosives concernant la révision constitutionnelle et l’éclatement du système des statuts personnels en vue notamment...