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Actualités - ANALYSE

Les remous provoqués par l'affaire de la diffusion par satellite des émissions politiques télévisées Le pouvoir et la loi : incompatibilité d'humeur..

Comme le souligne un ancien ministre, qui a l’avantage d’être juriste de formation et sait ce qu’Etat de droit veut dire, «le problème des gens du pouvoir, comme on le voit dans l’affaire des médias et à mainte autre occasion, c’est qu’ils ne parviennent tout simplement pas à s’ajuster avec la loi, notion ou concept de base qu’ils ont de la peine à assimiler pour élémentaire qu’elle soit. Ne parvenant pas à en appliquer les termes, ils improvisent au coup par coup avec une inquiétante désinvolture des mesures qui sont autant de flagrantes transgressions des règles qu’ils ont eux-mêmes établies. Donc, vue du côté institutionnel, la question de l’audiovisuel touche aussi, mais tout à fait paradoxalement, à l’affaire des libertés dans ce sens qu’elle révèle les libertés que le pouvoir prend avec la loi! Sous cet angle précis, les incidences actuelles ne sont qu’une des péripéties d’une longue chaîne de bavures ou de fautes intentionnelles commises depuis la conclusion des accords de Taëf et qui ont totalement tronqué, dénaturé ce pacte national. On peut rappeler, à titre d’exemple, le décret anticonstitutionnel de 1993 interdisant les rassemblements, les manifestations et les sit-in et on peut rappeler aussi que si on a pris soin de l’appliquer contre les syndicalistes désarmés, on a oublié de le faire contre les gens de Toufayli! Autrement dit, le pouvoir foule aux pieds le cas échéant même les contre-lois qu’il fabrique à sa convenance. Il gouverne à coups de sautes d’humeur ce qui est la définition même de l’arbitraire. Et de l’impuissance caractérisée: un appareil d’Etat qui est sûr de lui ne gomme aucun droit d’expression et quand il s’agit d’une expression de rue, il se contente de la faire encadrer par des forces consistantes de police pour éviter la casse. Cela lui aurait permis de ne pas se désavouer lui-même face à Toufayli: au lieu de faire de Baalbeck-Hermel une zone militaire, mesure trop extrême, il aurait laissé le cheikh manifester à loisir, quitte à l’embarquer en cas de débordement, ce qui s’est d’ailleurs produit sans qu’on n’interpelle l’intéressé. Le comble de la faiblesse, c’est de frapper les faibles et de ménager les forts». «Il en a été ainsi, ajoute cette personnalité, pour les chaînes télé ou les stations radio ou pour les dossiers dits criminels; mais le plus accablant, c’est sans doute la politique fiscale qui pénalise les démunis et favorise les nantis. Sans compter les abus et les passe-droit: n’a-t-on pas entendu à maintes reprises le chef de l’Etat sermonner ministres et députés qui ne paient ni quittances ni impôts, alors même qu’ils contribuent allègrement par des dépenses somptuaires, sans parler de la corruption, à creuser le trou profond du budget général et à ruiner le Trésor…? Quand l’exemple vient d’aussi haut, il devient compréhensible qu’un demi-million de consommateurs, des régions entières, ne paient pas l’électricité sans que le courant ne leur soit coupé parce qu’ils sont politiquement «protégés». L’EDL est dans le rouge, l’Etat doit lui avancer chaque année des milliards de LL alors qu’il est lui-même en difficulté». «Avec les médias, c’est le même problème au fond. Le pouvoir, incapable d’appliquer la loi a posteriori, choisit le chemin de la facilité en interdisant à l’avance tout ce qui pourrait le déranger, ce qui est hautement illégal comme l’a souligné le Conseil d’Etat dans l’arrêté cassant la censure préalable. Puis le gouvernement, face aux tempêtes que ses mesures discrétionnaires à l’emporte-pièce provoquent, fait machine arrière, au prix du crédit et de l’autorité d’un Etat qui se passerait volontiers de virevolter comme girouette au vent. Comme résultat, les dirigeants auront surtout servi leurs adversaires qui sortent vainqueurs des affrontements, en champions faciles des libertés et en vedettes applaudies par un public friand d’empoignades médiatiques. Et le pire c’est qu’après cela il n’est plus question de prendre des sanctions contre les médias ou les personnalités qui se mettent en faute et on laisse tout dire alors que la loi ne permet pas tout… C’est d’autant plus regrettable qu’il faut comprendre que la portée d’une émission transmise par satellite est tout à fait différente, en termes d’image du pays, que celle d’une émission uniquement destinée à la consommation interne. Les Arabes ne sont pas aussi habitués que les Libanais à une certaine liberté de ton et de sujets; ils peuvent mal comprendre et prendre leurs distances par rapport à un pays trop anarchique à leurs yeux. Cela risque, conclut l’ancien ministre, d’avoir des retombées sur la situation économique nationale, car les investisseurs étrangers pourraient se faire encore plus rares, effrayés de constater qu’aucun cadre légal effectif ne protégerait éventuellement leur bon droit et leurs intérêts». E. K.
Comme le souligne un ancien ministre, qui a l’avantage d’être juriste de formation et sait ce qu’Etat de droit veut dire, «le problème des gens du pouvoir, comme on le voit dans l’affaire des médias et à mainte autre occasion, c’est qu’ils ne parviennent tout simplement pas à s’ajuster avec la loi, notion ou concept de base qu’ils ont de la peine à assimiler pour...