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Actualités - ANALYSE

Municipales : tout dépend de la chambre..



L’abnégation, le désintéressement si admirable du pouvoir révèlent chaque jour un peu plus leur pudique beauté. On apprend ainsi que, si d’aventure la Chambre devait rétrécir la marge de désignation du gouvernement dans le cadre des municipales, pour la cantonner à la seule enclave occupée, l’échéance serait tout bonnement renvoyée aux calendes grecques! Par contre, si les députés consentent à laisser la troïka nommer des édiles dans les grandes villes comme dans les centres de villégiature (autrement dit s’ils acceptent de laisser aux dirigeants le contrôle politico-municipal du pays), les soi-disant «élections» auraient bien lieu en avril prochain comme prévu…
Et c’est cette éventualité qu’un ministre juge «la plus probable car, dit-il, l’entente sur ce point entre les trois présidents leur garantit en principe une confortable majorité place de l’Etoile. On a ainsi vu des parlementaires juristes se récrier d’abord à l’idée antidémocratique des désignations puis se raviser pour l’approuver, après la conclusion de l’accord interprésidentiel de Baabda».
Après cette allusion — très claire pour les familiers de l’hémicycle —, à certains rouages des commissions qui ont planché sur le projet de loi, ce ministre ajoute qu’il lui paraîtrait «très étonnant que les membres du bloc Berry qui se sont d’entrée de jeu déclarés hostiles aux désignations maintiennent une telle position maintenant que leur chef de file est passé de l’autre côté de la barrière. Entre ce groupe, celui de Hariri, les quelques hraouistes estampillés et la dizaine d’indépendants sensibles à l’influence de Baabda, on dépasse facilement la barre des cinquante pour cent à la Chambre. Et à une poignée d’irréductibles près, il y aurait même une quasi-unanimité en faveur du projet gouvernemental si les décideurs devaient envoyer un mot d’ordre formel dans ce sens…».
En fait, nombre d’observateurs estiment pour leur part qu’une telle intervention des tuteurs resterait nécessaire pour que le Cabinet puisse l’emporter. Contrairement au ministre précité, ils pensent en effet, indique l’un d’eux qui a longtemps occupé de hautes charges officielles, que l’accord interprésidentiel «ne serait pas suffisant pour lever les objections des députés qui doivent tenir compte d’un électorat absolument opposé à toute disposition offrant un quelconque caractère arbitraire ou dictatorial. Aujourd’hui plus que jamais l’opinion est braquée contre les méthodes expéditives du pouvoir à cause de l’affaire de l’interview Aoun et de ses retombées sur le terrain. Les parlementaires le savent et ne voudraient pas être rangés dans le même panier que le pouvoir. Ils ne s’y résigneraient, la mort dans l’âme, que si les décideurs leur en donnent l’ordre formel. Et encore, non sans essayer quand même de modifier un peu le texte initial dans un sens un peu plus démocratique…».
Pour leur part, cependant, les opposants ne se font pas beaucoup d’illusions. «Il est vrai, remarque l’un d’eux, que dans les commissions nous avons réussi à faire jeu égal avec les loyalistes, le vote donnant exactement autant de «non» que de «oui». Mais en assemblée générale ce serait une autre paire de manches. Même si les tièdes devaient s’absenter, le camp d’en face reste bien plus fourni que le nôtre, il faut bien le reconnaître. Et il emporterait facilement la décision, avec ou sans intervention extérieure. Notre seule chance c’est qu’à la faveur des événements actuels la troïka ressoudée se disloque de nouveau, auquel cas le président Berry pourrait bien revenir à ses premières amours, c’est-à-dire exiger que les désignations d’édiles ne puissent avoir lieu que dans la bande frontalière occupée…».
Il y a bien une autre issue: le recours au Conseil constitutionnel. «C’est évidemment possible, une fois la loi votée», répond la même source «mais cela risque d’arriver trop tard et de ne servir à rien puisque les élections sont pour avril. En outre, comme on l’a vu précédemment, beaucoup de signataires potentiels de la motion de recours se récuseraient si les décideurs devaient leur taper sur les doigts…».
«En réalité, qui peut le plus peut le moins: on voit mal comment un pouvoir qui sur ordre a réussi à organiser des législatives tronquées ne pourrait pas rééditer ce douteux exploit au niveau des municipales…», conclut ce pessimiste.

L’abnégation, le désintéressement si admirable du pouvoir révèlent chaque jour un peu plus leur pudique beauté. On apprend ainsi que, si d’aventure la Chambre devait rétrécir la marge de désignation du gouvernement dans le cadre des municipales, pour la cantonner à la seule enclave occupée, l’échéance serait tout bonnement renvoyée aux calendes grecques! Par contre,...